Né en 1905 et décédé en 1983 dans la ville de Paris, Raymond Aron était un sociologue, philosophe et journaliste français. Particulièrement célèbre pour ses travaux sur le totalitarisme ainsi que dans le domaine des relations internationales, cet intellectuel pluri-spécialiste a également été l'intangible fer de lance du libéralisme et de l'atlantisme en France à l'époque de la Guerre froide.
Publié en 1967, les étapes de la pensée sociologique s'articule autour d'une double « galerie de portraits intellectuels » (R. Aron) qui fait apparaître en filigrane les origines de la sociologie moderne, fin véritable de cet ouvrage. A la première partie, consacrée aux fondateurs de cette science – Montesquieu, Comte, Marx, Tocqueville -, répond la seconde, sur ceux qu'Aron désigne par « la génération du tournant du siècle », c'est-à-dire Durkheim, Pareto et Weber.
En développant la pensée du sociologue allemand dans l'extrait considéré, Aron met en lumière une problématique fondamentale pour les sciences sociales. Face à la pluralité et la complexité événementielles caractérisant « le monde de la culture » (Weber), quel type d'analyse, de méthodologie, l'historien ou le sociologue doit-il adopter, afin d'obtenir une précise lecture du réel ? En d'autres termes, comment déterminer l'importance du rôle joué par les multiples antécédents d'un événement ?
[...] En ce sens, on comprend pourquoi celui-ci parle de solidarité entre la sociologie et l'histoire. . à l'origine de la méthode inductive wébérienne En redéfinissant les sciences sociologiques et historiques comme des sciences également causales, Weber donne toute son importance à la recherche des causes, qu'il va systématiser en construisant un modèle méthodologique. Or, comme l'énonce concisément Aron, le problème de la causalité est celui de la détermination du rôle des divers antécédents à l'origine d'un événement Comment savoir si X a pris une part importante dans la détermination de Y ? [...]
[...] Conclusion A travers ce passage extrait des Etapes de la pensée sociologique, Aron nous fait découvrir la conception wébérienne de l'histoire, entre interprétation et causalité, singularité et conceptualisation. Weber établit donc une définition synthèse des sciences de la culture insistant notamment sur la nécessité de formuler des concepts généraux, qui témoigne de la scientificité de ces premières. Dans cette optique et dans une volonté d'obtenir une juste lecture du réel, il forge ainsi une méthode visant à déterminer le rôle joué par les multiples antécédents d'un événement historique. [...]
[...] Pour Weber, ces sciences sont effectivement à l'intersection d'une interprétation compréhensive d'une individualité historique et d'une explication causale de cette individualité. L'analyse des déterminations causales est donc au cœur de la science historique, car, comme le souligne Aron, celles-ci garantissent la validité universelle des résultats scientifiques. L'individualité historique est nécessairement multi-causale Un événement historique est par nature complexe, i.e. le fruit d'un grand nombre de circonstances. Cette multiplicité inextricable de causes rend celles-ci partielles et seulement probables, non nécessaires, laissant toujours une marge de manœuvre à l'homme d'action. [...]
[...] La modification irréelle, préfiguration de la méthode contrefactuelle Parce que les relations causales sont diverses et enchevêtrées ce qui rend difficile la détermination du rôle joué par un antécédent précis Weber suggère un exercice mental d'ordre nouveau ; pour mesurer l'influence de cet antécédent sur l'événement étudié, il convient de supposer que ce premier ne s'est pas produit ou s'est produit différemment. Il s'agit donc d'opérer une modification irréelle d'un des éléments afin de comprendre comment les évènements se sont déroulés. Pour cela, il suffit de comparer l'évolution réellement observée à celle, hypothétique, à laquelle on aurait assisté si l'antécédent considéré avait été tout autre. La question de l'importance causative de l'issue de la bataille de Marathon sur la culture rationnelle illustre relativement bien ce propos. [...]
[...] Pour le sociologue, la conceptualisation de l'événement apparaît d'autant plus nécessaire qu'elle permette d'obtenir une compréhension de l'historique, c'est-à-dire d'aborder la réalité confuse avec des idées claires. Cet idéaltype, pour reprendre le terme wébérien, production idéalisée, n'a qu'une utilité logicienne ; il constitue un schéma de lecture qui permet de rendre intelligible des ensembles Un événement historique est par nature complexe, i.e. le fruit d'un grand nombre de circonstances. Cette multiplicité inextricable de causes rend celles-ci partielles et seulement probables, non nécessaires d'une réalité historique souvent impossible à saisir dans sa globalité. [...]
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