La sociologie de l'éducation a mis en évidence le fait que certains enfants sont favorisés non pas parce qu'ils seraient plus intelligents, mais parce qu'ils tiennent de leur milieu familial et de leur classe sociale des codes, des attitudes, des savoirs scolairement rentables. Parfois, ils savent déjà ce que l'école est censée leur enseigner : ainsi, ils savent lire avant que cet apprentissage ne devienne obligatoire. Le plus souvent, sans maîtriser d'avance la culture scolaire, ils disposent du capital linguistique et des habitudes de pensée qui placent les apprentissages scolaires dans le droit fil de la socialisation familiale. A d'autres élèves, cette familiarité fait au contraire défaut, ils ne trouvent guère de continuité entre leurs expériences extrascolaires et la culture scolaire.
Le thème principal de cet ouvrage porte sur les inégalités de l'accès à l'enseignement supérieur des étudiants issus de différentes classes sociales. L'origine sociale a un rôle primordial dans les inégalités d'accès à l'enseignement supérieur. Pour les auteurs la probabilité d'accès à l'enseignement supérieur est directement liée à l'origine sociale des étudiants. L'origine sociale est l'un des mécanismes fondamental de la sélection des étudiants des différentes origines sociales à l'entrée à l'enseignement supérieur. Cette sélection se traduit par l'élimination progressive des enfants des classes défavorisées de l'enseignement supérieur.
Le livre paraît à une période de croissance importante des effectifs de l'enseignement supérieur. Cette croissance s'observe dès le milieu des années cinquante. Le nombre d'étudiants augmente de 42.8% de 1952 à 1960, puis il double entre 1960 et 1965. Entre 1960 et 1969, le nombre d'étudiants est multiplié par trois, 203 000 en 1960 à 600 000 en 1969. Cette croissance de la scolarisation s'accompagne de nombreux débats sur la démocratisation de l'enseignement.
Dans les années soixante la part des enfants d'ouvriers à l'enseignement supérieur est de 6%. D'ailleurs, selon les auteurs un fils de cadre supérieur a quatre-vingts fois plus de chances d'entrer à l'université qu'un fils de salarié agricole et quarante fois plus qu'un fils d'ouvrier. L'expérience de l'avenir scolaire, l'entrée dans l'enseignement supérieur n'est pas la même pour un fils de cadre supérieur et pour le fils d'ouvrier. Le fils de cadre supérieur, qui a une chance sur deux d'aller en faculté, rencontre le plus souvent dans son milieu proche, (milieu familial ) les personnes ayant fait des études supérieures, pour lui les études supérieures sont un destin banal et quotidien. Alors que pour un fils d'ouvrier qui a moins de deux chances sur cent d'aller en faculté, et qui connaît le milieu universitaire seulement par des professionnels d'éducation, pour lui c'est un avenir impossible et incertain.
La probabilité d'accès aux études supérieures des filles et des garçons selon l'origine sociale est la même. Dans les classes défavorisées, les filles ont un peu moins de chances que les garçons issus du même milieu d'accéder à l'enseignement supérieur, huit chances sur cent, alors que les garçons ont dix sur cent. Par contre dans les classes favorisées les chances des filles d'accéder à l'enseignement supérieur sont pratiquement égales que celles des garçons. Donc, les chances d'accès à l'université sont assez proches pour les garçons et les filles de même origine sociale.
Les inégalités et l'élimination se traduisent ensuite par une restriction du choix des différentes filières universitaires. Ainsi, même si les chances d'accès à l'université des filles et des garçons s'approchent, le choix des filières se distingue : les études littéraires pour les filles et les études des sciences pour les garçons. On note cette tendance dans toutes les classes sociales. Quand les filles font des études scientifiques c'est dans le but d'accéder à l'enseignement.
En conclusion, les inégalités sont plus fortes selon l'origine sociale que selon le sexe des étudiants inscrits à l'université. La sélection par sexe des étudiants s'exprime par les orientations massives des filles vers les facultés de lettres alors que la sélection par origine sociale s'exprime par l'élimination des enfants issus des couches défavorisées de l'enseignement supérieur et par restriction du choix des filières offertes à ceux qui échappent à l'élimination. Ainsi, les études du droit, de médecine ou de pharmacie représentent 33.5% des chances pour les fils ou les filles de cadres supérieurs, 23.9% pour les fils ou les filles de cadres moyens, 17.3% pour les fils et filles d'ouvriers et 15.3% pour les fils et filles de salariés agricoles.
Soulignons aussi que plus de 50% des enfants inscrits dans les grandes écoles sont d'origine de cadres supérieurs.
[...] Elles doivent devenir comme naturelles de sorte que les dominés eux-mêmes adhèrent à l'ordre dominant tout en en méconnaissant le caractère arbitraire (sans cette méconnaissance, ils n'y adhèreraient pas). C'est ce processus qui constitue le principe de la violence symbolique. Les couches inférieures de la population reconnaissent la légitimité du style de vie dominant et essaient de l'imiter. C'est du reste, par exemple, une des raisons pour lesquelles les gens qui se sentent exclus de la culture excluent de leur discours ce qui les intéresse vraiment. [...]
[...] Bourdieu et J.C. Passeron. Les héritiers, les étudiants et la culture La sociologie de l'éducation a mis en évidence le fait que certains enfants sont favorisés non pas parce qu'ils seraient plus intelligents, mais parce qu'ils tiennent de leur milieu familial et de leur classe sociale des codes, des attitudes, des savoirs scolairement rentables. Parfois, ils savent déjà ce que l'école est censée leur enseigner : ainsi, ils savent lire avant que cet apprentissage ne devienne obligatoire. Le plus souvent, sans maîtriser d'avance la culture scolaire, ils disposent du capital linguistique et des habitudes de pensée qui placent les apprentissages scolaires dans le droit fil de la socialisation familiale. [...]
[...] Quand on leur demande Aimez-vous la musique ? on n'entend pas J'aime les chansons de Dalida mais J'aime les valses de Strauss parce que c'est ce qui, dans les milieux populaires, ressemble à l'idée qu'on se fait (du reste illusoirement) de ce qu'aime le bourgeois. La violence symbolique correspond à l'imposition de la culture de la classe dominante à travers les agents socialisateurs et en particulier l'école. Ainsi le système scolaire n'est nullement un appareil neutre au service de la culture et de la République. [...]
[...] L'origine sociale est l'un des mécanismes fondamental de la sélection des étudiants des différentes origines sociales à l'entrée à l'enseignement supérieur. Cette sélection se traduit par l'élimination progressive des enfants des classes défavorisées de l'enseignement supérieur. Le livre paraît à une période de croissance importante des effectifs de l'enseignement supérieur. Cette croissance s'observe dès le milieu des années cinquante. Le nombre d'étudiants augmente de de 1952 à 1960, puis il double entre 1960 et 1965. Entre 1960 et 1969, le nombre d'étudiants est multiplié par trois en 1960 à en 1969. [...]
[...] Soulignons aussi que plus de 50% des enfants inscrits dans les grandes écoles sont d'origine de cadres supérieurs. Où est-ce qu'on est aujourd'hui ? En France l'origine sociale des étudiants français évolue très peu d'une année sur l'autre : les étudiants des catégories sociales les plus favorisées continuent à être fortement surreprésentés contrairement aux jeunes des catégories sociales les plus modestes : toutes formations confondues des étudiants ont des parents cadres supérieurs ou exerçants une profession libérale sont des enfants d'ouvriers et seulement fils ou filles d'agriculteurs. [...]
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