Ce texte de Vera ZOLBERG, professeur de sociologie à la New School for Social Research de New York, propose des pistes pour savoir si la culture est transmissible égalitairement à tous, à travers l'objet du musée des Beaux Arts. En prenant cet exemple, la question est de savoir si la fréquentation du musée des Beaux Arts permet le nivellement des statuts sociaux ou en est au contraire un frein.
Quelles sont les relations entretenues par le personnel du musée et le public dans l'accès à la culture ? Vera ZOLBERG soutient la thèse de BOURDIEU et souhaite montrer que les institutions culturelles créent et renforcent les inégalités sociales. Le déséquilibre qui existe entre les différents capitaux culturels est source d'exclusion. Pour elle, le goût de l'art n'est pas le fait d'un processus individualiste.
Elle prend comme sujet d'analyse de la reproduction et des inégalités sociales le musée pour donner un autre exemple que les établissements scolaires, premiers visés habituellement pour montrer les inégalités sociales. Cela permet de se détacher des idées reçues à ce sujet, de créer une phase de rupture. Par ailleurs, le système scolaire n'est qu'un élément d'acquisition de la culture générale, il est intéressant d'en présenter d'autres, dépendant davantage de la socialisation par la famille. L'auteure revoit les deux concepts bourdieusiens d'habitus et de capital culturel en ajoutant des nuances, et compléments. Le choix du musée d'art est alors entrepris car son capital culturel référent n'apporte pas de récompense immédiate, contrairement à l'école. De plus, il est important aujourd'hui, dans une société où 70% des emplois correspondent à des services et des loisirs, de s'attacher à l'éducation amenant aux professions des loisirs.
[...] Si le commun des mortels a accès à la culture générale de manière égale, on assiste à la disparition de l'élite, l'effondrement du rapport de force et de leur pouvoir. La préservation est indispensable et simple pour eux : Les arts nobles sont excessivement codifiés, formatés par les institutions de légitimation (dont les musées). Il suffit alors de ne pas diffuser les clefs de compréhension. Heureusement cependant pour les autres classes, la généralisation de la circulation de l'information par internet leur permet de s'intéresser et d'apprendre si elles le souhaitent sur différents types d'art. [...]
[...] Dans ces établissements très peu de services sont mis en place pour aider le public à comprendre les œuvres, à acquérir une éducation artistique, à enrichir leur culture générale. C'est pourquoi ces musées ne sont pas, en réalité, accessibles à tous. Sans explication de forme et de contenu, les classes inférieures se sentent mal à l'aise, ont un souci de compréhension dans les musées alors que les classes favorisées ont reçu une initiation de leurs parents proches et ont alors la possibilité de décrypter les œuvres, d'en faire des illustrations concrètes des concepts qu'on leur a inculqués. [...]
[...] Ce qui amène à penser que l'école a un rôle important à jouer dans l'éducation artistique, mais est insuffisante, d'où la nécessité d'un complément d'éducation dans les musées. Comme la logique scolaire, le public doit être motivé à s'instruire. Les musées ne sont pas là pour attirer les classes inférieures et démocratiser l'art légitime. Ils sont certes ouverts à tous, mais n'entreprennent aucune action spécifique, donnant envie aux individus de s'y intéresser. L'envie d'acquérir des connaissances culturelles doit se faire individuellement, cela doit venir d'une volonté de la personne. [...]
[...] les différents capitaux sont sources de richesse et de pouvoir, mais ne sont ni maitrisés égalitairement ni facteurs de nivellement des inégalités. Pour Bourdieu, l'inégalité sociale est maintenue par la socialisation familiale, d'où une reproduction sociale. Ainsi, pour niveler les inégalités sociales il faut une réforme de l'éducation. Aujourd'hui, il n'y a plus vraiment de hiérarchie entre les différents types d'expression artistiques. L'art noble, tel la peinture, constituant la culture d'élite, laisse place à un pluralisme esthétique avec l'exemple de l'exposition de diverses cultures dans les musées. [...]
[...] Lors d'une procédure de recrutement, c'est la culture générale qui fait la différence entre les candidats. On exige de nous d'avoir de plus en plus de culture générale, d'avoir des diplômes, du savoir être et des compétences multiples (concours, entretiens d'embauche). Ainsi, les inégalités se creusent encore plus dans l'accessibilité à l'emploi. La compétence dans ces domaines (activités culturelles) est reconnue utile à l'avancement. [...]
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