Lire aujourd'hui, l'Essai sur le don de M. Mauss, nous montre combien des notions, qui nous paraissent simples, peuvent découler d'un mécanisme complexe.
Cet essai, qui a séduit des intellectuels bien au-delà du cercle de l'anthropologie, remet en question l'idée commune du don, notamment son caractère désintéressé et gratuit.
M. Mauss nous propose d'explorer la notion de don à travers l'étude de sociétés archaïques. Ce sociologue et ethnologue français (né en 1872 et mort le 1re février 1950), agrégé de philosophie, neveu et disciple de Durkheim, publie « l'Essai sur le don » en 1924 dans l'Année sociologique.
Il élabore une véritable théorie sur le don, lui donnant comme base la triple obligation de donner, recevoir, rendre. Il développe l'idée selon laquelle ; ce qui est donné, oblige le donataire à le recevoir et, ensuite à le rendre. Le don entraîne, alors, une obligation de donner.
[...] L'analyse de Mauss justifie le principe de l'anonymat du donneur. En effet, si le don oblige, la levée de l'anonymat pourrait créer un rapport d'obligation entre donneur et receveur, ce qui ne paraît pas souhaitable. Enfin, la continuité de la personne dans la chose se retrouve dans le droit de la propriété littéraire et artistique. La création est protégée, en tant qu'elle est originale, c'est-à-dire portant l'empreinte de la personnalité de son auteur Un retour à l'archaïsme Mauss étend son analyse aux sociétés modernes. [...]
[...] Ce système est traversé par un courant continu et en tous sens, de dons donnés, reçus, rendus, obligatoirement et par intérêt, par grandeur et pour service, en défis et en gages Le don apparaît donc, dans ces deux systèmes d'échanges comme à l'opposé de nos conceptions. D'une part, il est ambivalent. Le don paraît réalisé de façon libérale. En réalité, il doit toujours être suivi d'un contre don. De plus, ce contre- don doit obéir à un code précis (très développé dans le kula). On doit rendre le don, mais bien le rendre. D'autre part, l'action de donner n'est pas une action simple. [...]
[...] La lecture de l'Essai sur le Don, prend un sens particulier en ce début de XXIe siècle, affecté par la crise économique. Mauss semble appeler dans sa conclusion à une sorte de retour à l'archaïsme. En effet, il constate que dans nos sociétés modernes, l'homme est avant tout un animal économique guidé par l'intérêt, l'appât du gain et l'utilité économique dans ses échanges avec autrui. Le don permet de dépasser nos conceptions purement utilitaires des échanges. Le don remet en cause les oppositions entre libéralité et utilité : il est une libéralité pas complètement désintéressée et ne vise pas qu'à la simple utilité. [...]
[...] On remarque que le potlatch permet d'établir une hiérarchie dans la société. Le don et le contre don permettent de monter dans l'échelle sociale. La nature du don est d'obliger à terme. Selon Mauss, il faut rendre plus, mais aussi rendre plus tard. Le potlatch est bien au sens de Mauss un phénomène social total. Il est religieux, mythologique, chamanistique, et économique. Il y a échanges, transactions, transferts de richesse, mais également une présence des dieux incarnés par les chefs. [...]
[...] En donnant, on oblige et, par la même, l'autre devient l'instrument des volontés du donataire. Mais dans ce système ce n'est plus celui qui a reçu qui décide de ce qu'il rend. Il faut également comparer, le don décrit par Mauss et ce que l'on peut appeler le don moderne. Ce dernier est utilitaire et imprégné de tradition chrétienne (don unilatéral). Il peine à trouver parfois sa place dans la société actuelle (en témoignent les problèmes posés en bioéthique). Mais ce don diffère totalement du don des sociétés archaïques. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture