Extrait de La manifestation, paru en 1990 et dirigé par Pierre Favre, « Les manifestations dans la dynamique des conflits » est un article rédigé par le sociologue français Patrice Mann, professeur à Bordeaux II et auteur de nombreux ouvrages, tel L'action collective, mobilisation et organisation des minorités actives (1991). Dans cet article, l'auteur démontre le rôle spécifique de la manifestation, qu'il voit comme un des modes privilégiés de l'action collective; et utilise la théorie de la mobilisation des ressources, qu'il critique et analyse de manière stratégique afin d'approcher la dynamique des conflits. Il illustre sa démonstration avec l'étude des mobilisations qui émergèrent lors de la lutte pour l'indépendance de l'Algérie (19541962).
Afin d'en analyser son contenu, nous appréhenderons donc ce texte en trois temps. D'une part, nous verrons que le résultat de la stratégie d'action des acteurs ne découle pas nécessairement de leur forte capacité de mobilisation; d'autre part, nous étudierons la triple logique propre aux manifestations; et, enfin, nous verrons à quel point la structure et la stratégie contraignent les individus.
[...] De la capacité de mobilisation au résultat de la stratégie d'action A travers une analyse dynamique, Patrice Mann démontre qu'un conflit est une interaction au cours de laquelle s'effectue une redistribution des ressources et les attentes des acteurs changent. Les acteurs les mieux pourvus en ressources ne restent donc pas nécessairement les maîtres du jeu tout au long du conflit, et les stratégies d'action s'adaptent aux différents coups qui ont pu être portés. Ainsi, le résultat de la stratégie d'action des manifestants ne découle pas obligatoirement d'une force capacité mobilisatrice. [...]
[...] Long et sanglant processus au cours duquel la capacité à mobiliser et à négocier des leaders indépendantistes, des ultras du colonat et des autorités détermina l'issue finale de la stratégie d'action. Plus généralement, Mann conclut sa démonstration en s'interrogeant sur la massive et fréquente utilisation du mode d'action collective qu'est la manifestation, en dépit de son efficacité incertaine et de son caractère illusoire (dixit Pierre Favre). Nous pourrions lui répondre que, comme il l'a démontré à travers son article, la manifestation est simplement une fin en soi. [...]
[...] Par ailleurs, notons que pour mobiliser des ressources (qu'elles soient matérielles, coercitives, cognitives ou symboliques), celles-ci doivent être mobilisables pour l'action collective et les acteurs doivent détenir un minimum d'informations quant à leur mode d'emploi. III- Les contraintes structurelles & tactiques dans la dynamique des conflits Le choix de ce mode d'action nécessite une concertation et une mise en œuvre structurellement et stratégiquement contraintes. Du côté des manifestants, leur capacité à mener une action concertée et à recruter dépend de leur degré et de leur type d'organisation. [...]
[...] Le résultat de l'action collective dépend donc de la capacité de mobilisation des acteurs, mais aussi de la capacité de négociation des leaders. Par la suite, Patrice Mann définit l'action collective comme étant un processus qui contraint les acteurs à perpétuellement mobiliser les ressources nécessaires au succès stratégique. Ceci afin de démontrer en quoi la manifestation, en tant que mode de l'action collective, est à la fois productrice de ressources et une ressource en soi. II- La triple dimension de la manifestation: mobilisatrice, expressive et instrumentale L'auteur nous amène à considérer la manifestation comme un moment privilégié au cours duquel le groupe de conflit affirme son existence, son identité, la solidarité entre ses membres et rend visible les témoignages réciproques d'appartenance. [...]
[...] A l'instar du vaste mouvement prônant les valeurs républicaines, qui anima les manifestations anti-OAS de novembre 1961 à février 1962, et qui ne put s'unir en 1960 qu'à force de révisions doctrinales. Sur le plan tactique, la décision de manifester dépend des risques encourus par les leaders en optant pour la manifestation (calcul coût/bénéfice de l'acteur rationnel), soit: l'échec de la mobilisation qui pourrait être imputable aux free riders, mais serait interprété comme un désaveu du groupe de conflit envers ses leaders; ou le risque de défection, qui varie en fonction de la variable temps et de la menace que fait peser la partie adverse sur les manifestants. [...]
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