Kaufmann émet l'hypothèse selon laquelle l'existence se formerait dans un "mouvement tournoyant", se développant selon deux modalités très différentes, mais également très mélangées. D'une part, il s'agit d'une "socialisation pure", modalité héritée des sociétés holistes à travers laquelle il n'y a pas de véritable intervention réflexive. Le sens de la vie semble aller de soi, répond à une certaine "logique des choses". D'autre part, la seconde modalité fait intervenir la subjectivité, mettant en image ou en pensée des orientations possibles du cours de l'existence. Ballotté entre objectivité et subjectivité, l'individu cherche son "identité", mot qui apparaît comme une évidence aux yeux de tous, mais qui en réalité, a très rarement été défini de façon explicite. Il est dès lors impératif d'examiner sérieusement le concept, afin de parvenir à clarifier son contenu et préciser ses mécanismes.
1. L'identité et son histoire
Utilisé en philosophie depuis l'Antiquité, le concept d'identité a véritablement pris de l'importance lors de la déstructuration des communautés traditionnelles, provoquée par l'individualisation de la société moderne. A travers ce long et lent processus, l'individu s'est trouvé livré à lui-même, contraint de s'auto définir, de se constituer en sujet.
L'identité n'a donc connu la gloire que parce qu'elle est devenue incertaine. Avant la mise en flottement des repères existentiels, il n'y avait pas à proprement parlé d'identité car l'auteur nous rappelle que pour qu'il y ait identification, il faut une situation où il y a sens à s'identifier.
Auparavant, dans les sociétés traditionnelles, les individus se définissaient en fonction de la place qu'ils occupaient dans la société. Leur identité leur était donc entièrement conférée par des critères objectifs. Avec la première modernité, le mouvement philosophique des Lumières et l'Etat naissant réaxeront le social sur l'individu. Il y a une réelle volonté d'échapper au destin qui se développe chez les intellectuels et les artistes, mais la grande masse continue à se définir selon le rôle qu'il occupe dans la communauté. C'est lors de la seconde modernité que la rupture historique s'est opérée. La société s'est de plus en plus complexifiée, ce qui a obligé les individus à se construire en sujets, maîtres de leur destin (...)
[...] L'émotion s'inscrit dans l'image de soi, grâce à quoi elle a le pouvoir d'emporter l'individu de façon imprévisible vers un autre univers de perception. Chaque image déclenche des perceptions émotionnelles particulières. L'avenir se prépare par un travail de confrontation entre image de soi et émotions. Ego, comme le dit l'auteur, décide en fonction des sensations que lui procurent diverses mises en scènes de soi. Il visionne l'action à venir dans des versions changeantes, pour percevoir les effets émotionnels des divers choix possibles. [...]
[...] Ainsi se dessine le troisième modèle, celui de la loyauté. Discipline régie par une rationalité froide, qui domestique la folie créatrice (ou dévastatrice) des images ou des émotions. L'individu est contraint à la loyauté car la moindre divergence, anéantit très vite les gains identitaires, et peut provoquer au contraire l'explosion d'émotions intenses. L'auteur soulève que ce cadrage institutionnel est très fort soit tout en bas de la hiérarchie sociale, soit tout en haut. En bas, car le risque de désocialisation est grand et donc les individus sont le moins livrés à eux- mêmes. [...]
[...] Mais sous le regard d'autrui les blessures peuvent s'ouvrir dévoilant un affaissement de sens. Rétablir l'estime de soi dans une position de silence n'est pas chose facile. L'auteur y décèle une explication de la montée des votes populistes d'extrême droite. C'est durant la jeunesse que la créativité identitaire est à son apogée. Les cadres de socialisations se transforment dans de nouveaux cadres plus ouverts. Les rêves prennent le plus de forme de sois possibles même si tout n'est pas réalisable. [...]
[...] Histoire et systématique des théories sociologiques TRAVAIL Jean-Claude Kaufmann : L'invention de soi. Une théorie de l'identité. Première partie Introduction Kaufmann émet l'hypothèse selon laquelle l'existence se formerait dans un mouvement tournoyant se développant selon deux modalités très différentes, mais également très mélangées. D'une part, il s'agit d'une socialisation pure modalité héritée des sociétés holistes à travers laquelle il n'y a pas de véritable intervention réflexive. Le sens de la vie semble aller de soi, répond à une certaine logique des choses D'autre part, la seconde modalité fait intervenir la subjectivité, mettant en image ou en pensée des orientations possibles du cours de l'existence. [...]
[...] C'est la plus grande différence entre individu. N'importe quelle identité à une propension à la totalité car elle est un système de valeur globalisant, définissant la direction et le sens. Lorsque le jeu d'identités disponibles est riche les totalisations se succèdent tandis que lorsque ce jeu est limité les totalisations se répètent et risque d'enfermer la personnalité dans un autisme identitaire. Mécanisme aggravé en cas de stigmatisation sociale et atteinte à l'estime de soi. Les plus démunis n'ont souvent le choix qu'entre implosion et explosion psychologiquement réparatrice. [...]
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