L'individu est pour nous une évidence. C'est le fondement de notre vie sociale. Ainsi le fait que certaines sociétés ne possèdent pas d'outil linguistique permettant de dire « je » c'est-à-dire d'outil permettant de se dire ou de se penser comme totalité séparée et autonome, nous déroute. De cette façon, l'individu nous semble si familier, que cela empêche de voir en quoi il fait problème. On en vient à déproblématiser cette catégorie, considérant qu'elle va de soi. On en fait une donnée de nature.
La sociologie étudie moins les individus en tant qu'individus, mais en tant que société, la sociologie héritée de Durkheim ôte toute centralité à l'individu. L'individu ne peut prétendre constituer un niveau d'analyse pertinent. Pour cette sociologie classique, l'individu est surtout une prénotion, une illusion. Ce qui existe plutôt ce sont les groupes sociaux, les sociétés. Les individus ne sont pas cause fondamentale. L'individu est le support des faits sociaux, mais il n'en est pas la cause. C'est la thèse durkheimienne de l'extériorité des faits sociaux par rapport à l'individu. Cf. Les règles de la méthode sociologique chapitre 1.
En économie par contre l'individu est le niveau pertinent de l'étude. Il y a en effet prise en considération et primauté des choix individuels (supposés rationnels). On considère donc la société comme agrégation d'individus. C'est alors l'individu qui est premier. C'est aussi le cas dans l'individualisme méthodologique.
La promotion de l'individu est assez mal perçue. Historiquement, cette promotion de l'individu est liée au libéralisme : il s'agissait de libérer l'individu, de l'émanciper en lui reconnaissant des droits individuels inaliénables face au pouvoir politique, au groupe social. Cependant par la suite, sous couvert d'individualisme on comprend une compétition intersubjective cruelle et égoïste. Le mot individualisme tout comme le terme libéralisme subit donc un certain discrédit. Il est doté de connotations péjoratives.
[...] Car ces ancrages en s'additionnant et en s'agençant de façon originale, procureront à l'individu sa supposée ‘personnalité singulière' Donc pour être lui même, l'individu doit déjà être membre d'un groupe. D'où un rapport ambivalent au collectif. Nécessaire pour créer et valoriser l'individualité différenciée, mais aussi suscitant la méfiance. Grande tension aussi ici entre individualisme différencié et individualisme générique, car pour être soi on peut se revendiquer d'un groupe : homosexualité, identité régionale, etc. Tous les actes des agents sont comme des stratégies pour construire une identité différenciée. Ce n'est bien entendu pas ainsi que le conçoivent les agents. [...]
[...] L'individualisation se poursuit aussi en musique. Du chant sacré grégorien où les moins chantent à l'unisson, on passe à une pratique profane et singulière. Le beau n'est plus le rapport mathématique qui représente le monde divin, il est subjectif et humain. L'art n'est plus imitation mais expression. L'artiste s'affirme comme personnalité d'exception, par la vocation qui le singularise, par l'inspiration qui le touche et le talent qui est le sien. Les moteurs de l'individualisation L'Etatisation. La centralité étatique paradoxalement a permis l'éclosion de l'individualisation. [...]
[...] Tout indice d'individualisation n'est donc pas synonyme d'émancipation. cf. carnet ouvrier. L'individu est certes autonome (juridiquement) mais non conçu dans sa singularité (dans le cas du marché). La société capitaliste fait exister des individus fondamentalement égoïstes, mais paradoxalement très semblables, qu'une même logique d'action anime. Il y a bien individualisation avec le libéralisme au sens où ce sont les intérêts privés et personnels qui sont fondements, et valeur, cependant les singularités individuelles ne sont pas prises en compte. On a donc un appauvrissement anthropologique. [...]
[...] Cette individualisation est un produit social uniquement. La société juxtapose des individus tendanciellement libérés des grands ancrages identitaires traditionnels. L'individu désormais n'est plus réductible au genre : ni comme individu support juridique, ni support d'habitus. Le sujet s'efface au profit de l'individu, c'est-à-dire de cet être centré sur lui même qui cherche non plus le profit mais son épanouissement personnel. Néocapitalisme et individualisation Le capitalisme actuel veut des individus disponibles (hors donc des cadres familiaux si possible) et innovants, donc très individualisés. [...]
[...] Elles sont preuves d'un excès d'individualisation. Durkheim expose une sociologie de l'individualisation. Il montre comment fonctionne le processus d'individualisation, et comment l'individu s'individualise en échappant au contrôle de la foule. Pour lui l'individu n'est donc pas une catégorie qui va de soi, c'est un construit historique et social. Il est donc en rupture avec la philosophie contractuelle. L'individu est alors conçu comme une énigme moderne à expliquer. Il s'oppose à la tradition qui fait du contrat le modèle et fondement de toute relation sociale. [...]
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