Il semble fort difficile, voire impossible, de donner une vue d'ensemble de l'histoire et de la culture indienne : les textes et vestiges que nous possédons s'étalent sur au minimum trois millénaires et nos repères chronologiques sont aussi flous que soumis à caution. L'Inde a une image fondamentalement intemporelle, et c'est la volonté même de sa propre société que de se voir comme un ensemble bien réglé, un ordre sociocosmique éternel.
Aussi, le changement n'est que superficiel, et on ne peut prétendre “périodiser” son histoire ainsi qu'on le ferait dans le cas pour un pays occidental. Il importe de trouver l'unité sous l'apparente diversité de la culture indienne qui pourrait paraître à première vue irréductible.
Pour comprendre l'hindouisme, une reconstruction historique de faits hypothétiques n'a pas d'intérêt : une telle étude doit se structurer à partir des valeurs atemporelles de cette civilisation et c'est l'objet de cet ouvrage.
[...] On n'a donc pas le sentiment d'un progrès, et la littérature philosophique comme religieuse est en grande partie composée de commentaires. Le système de pensée hindou s'est ainsi développé tout en restant totalement clos sur lui-même ce qui le rend ardu de compréhension pour les conceptions occidentales. Le brahmanisme, tout comme le bouddhisme, applique la notion d'instantanéité dans le cadre de la connaissance : la perception empirique est une succession d'instants discontinus car le manas (organe interne qui assure la relation entre monde extérieur et tman) est aussi mobile que l' tman est immobile. [...]
[...] Les différentes doctrines se distinguent par l'importance plus ou moins grande qu'elles donnent à la Déesse (dans le ktisme, elle devient le principe suprême). Le désir amoureux fonde ici tous les désirs qui ne sont qu'un moyen de réaliser la félicité essentielle - le dharma passe à l'arrière- plan, derrière le symbolique. Le rituel qui avait été abandonné en premier lieu par le renonçant brahmanique est ici élevé à la dignité d'instrument privilégié du k ma pour réaliser en soi la présence du divin. [...]
[...] Cependant, l'existence d'un Absolu à chercher hors de cette société, si c'est bien l'idéal de cette même société, interdit une telle réduction. Dans la perspective de la Révélation, seules les trois premières classes comptent : il faut être “deux-fois et donc subir un rite d'initiation (vers huit ans) pour devenir un être social à part entière. L'enfant une fois initié partira vivre chez son guru pour apprendre les textes révélés, après quoi il pourra se marier, devenir maître de maison et accomplir les rites et devoirs dévolus à son varna pour s'acquitter des dont il est chargé depuis sa naissance (envers les dieux, ses ancêtres et les rsi). [...]
[...] Néanmoins, il subsiste une contradiction fondamentale entre cette affirmation et les faits : la sanny sa exige que l'on ait accès à la Révélation upanisadique, or beaucoup en sont exclus. On cherchera à cela une solution autour de la notion de k ma, soit en tant que désir sous toutes ses formes auquel il faut renoncer même dans le cadre de la vie séculière pour sortir de la dynamique du karman et de la transmigration, ce qui est la bhakti, soit, à l'opposé, en le valorisant et en le mettant au service de la délivrance (tantrisme). [...]
[...] Madeleine Biardeau: l'hindouisme, anthropologie d'une civilisation Il semble fort difficile, voire impossible, de donner une vue d'ensemble de l'histoire et de la culture indienne : les textes et vestiges que nous possédons s'étalent sur au minimum trois millénaires et nos repères chronologiques sont aussi flous que soumis à caution. L'Inde a une image fondamentalement intemporelle, et c'est la volonté même de sa propre société que de se voir comme un ensemble bien réglé, un ordre sociocosmique éternel. Aussi, le changement n'est que superficiel, et on ne peut prétendre “périodiser” son histoire ainsi qu'on le ferait dans le cas pour un pays occidental. [...]
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