Dominique Schnapper se pose la question suivante qui est à la base de l'ouvrage et de sa démarche intellectuelle désormais : comment transmettre aujourd'hui le sens de l'appartenance à la collectivité ? comment conserver le savoir vivre ensemble ? qu'est ce qui cimente les sociétés authentiquement démocratiques ? l'éducation civique est pour Schnapper primordiale : dans les nations historiques, dominées par leur projet politique, l'éducation civique consistait à transmettre les valeurs nationales. Aujourd'hui, il importe de transmettre les valeurs civiques, les valeurs de la citoyenneté. C'est pour cela que l'ouvrage se veut un manuel d'instruction civique. partant du constat que les valeurs civiques sont moins immédiatement compréhensibles, que la citoyenneté est de prime abord abstraite et rationnelle, qu'elle est fragile, Schnapper n'hésite pas à rappeler des choses simples, pour ouvrir sur des réflexions plus actuelles
[...] Parce qu'elle est définie en termes juridiques et politiques, la communauté des citoyens a pour vocation de s'ouvrir à tous ceux qui sont susceptibles de participer à la vie politique ; tous les individus concrets ont donc pour vocation à devenir des citoyens. La société fondée sur la citoyenneté est, par définition, plus ouverte aux étrangers que les autres formes d'organisation politique. Pour que la souveraineté du citoyen soit effective il faut que soit organiser le débat ; l'institution-phare est ici l'Ecole qui forme les futurs citoyens. Le chapitre IV est consacré à l'individualisme démocratique, dont la progression, déjà prognostiquée par Tocqueville, est problématique pour les sociétés modernes. [...]
[...] Dans le chapitre III consacré aux institutions la sociologue fait remarquer que la citoyenneté est une construction historique, dont le champ et la qualité sont variables dans l'espace et dans le temps. La citoyenneté ne peut organiser la société que si elle s'incarne dans des règles juridiques et plus généralement dans un ensemble d'institutions et de pratiques sociales. Par delà ces institutions qui divergent nécessairement d'un pays à un autre, il existe un trait commun à la citoyenneté moderne, sa vocation universelle. [...]
[...] L'auteur fait remarquer que ce lien n'est ni logique ni nécessaire. Et ce lien est remise en cause d'une part par une réflexion sur le multiculturalisme et les droits infranationaux, et d'autre part par les conceptions nouvelles qui s'élaborent à partir de la construction européenne. Après la revendication des droits économiques et sociaux, la société moderne doit tenir compte de la revendication imprécise mais forte des droits culturels. Schnapper part du principe que toute société est par définition multiculturelle ; la citoyenneté permet justement de gérer cette diversité, car elle est ce grâce à quoi la distinction public/privé peut se faire ; le public étant le lieu où les pratiques et les instruments de la vie commune sont unis et organisés autour du principe de citoyenneté, le privé est la sphère de la liberté des attachements ou des fidélités particulières, religieuses ou historiques. [...]
[...] Schnapper rappelle que la démocratie représentative naît aux Etats-Unis entre 1776 et 1787. En France le cheminement fut plus difficile, car il y eut une confusion entre le pouvoir du peuple et la toute puissance de l'assemblée élue par le peuple (Rousseau vs Robespierre). L'idée de la transcendance par le politique et de la représentation fut élaborée et légitimée par deux grandes traditions intellectuelles qui conduisirent à distinguer deux types de citoyens : le citoyen à l'anglaise et le citoyen à la française La première conception se fonde sur le pluralisme libéral anglais dont un des représentants est Edmund BURKE, qui affirme qu'il faut respecter la diversité des appartenances et des attachements particuliers et respecter la tradition, qui veut que l'on défende la liberté des individus face au pouvoir qui peut toujours devenir arbitraire : checks and balances, J.Locke, logique utilitariste de la démocratie britannique selon laquelle les divers groupes sociaux sont représentés de l'espace politique raison même de leur spécificité et, en défendant leurs propres intérêts, ils contribuent à l'intérêt général et au bon fonctionnement de la société toute entière. [...]
[...] La démocratie réelle ne s'accomplira que lorsque le travailleur et le citoyen seront unis. Cette critique fut à l'origine de la distinction entre droits-libertés et droits-créances et à l'origine de l'émergence de l'Etat providence. Pour entrevoir les différentes dimensions de la citoyenneté, liées à ces critiques, Schnapper utilise la distinction faite par Thomas Humphrey Marshall : il considère d'abord la citoyenneté civile, qui fut obtenue au XVIII ; elle est définie par l'exercice des droits-libertés (libertés de la personne, liberté d'expression, de propriété . [...]
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