L'épreuve du chômage de D. Schnapper, s'inscrit dans le vaste domaine de la sociologie du chômage. Cet objet déroutant révèle les difficultés de la sociologie du travail à sortir d'une approche du travail réduite à l'exercice de l'activité professionnelle. Ledrut parlait ainsi de « situation sociale atypique » (1966).
La première enquête sociologique de renom sur le chômage est l'ouvrage de P. Lazarsfeld, M. Jahoda, H. Seizel, les chômeurs de Marienthal, qui met en évidence l'existence d'une fracture sociale. Ce travail permet de désigner l'espace de la sociologie du chômage : il s'agira de combler l'écart entre les statistiques et les impressions vécues.
La deuxième étape de la genèse de la sociologie du chômage est l'ouvrage de R. Ledrut, Sociologie du chômage parut en 1966. Il constitue une référence pour la définition de l'objet. Grâce à une prise de conscience générale le chômage devient une question sociale d'envergure. La spécificité de l'approche de Ledrut est de montrer que pour le sociologue, le chômage n'est pas un simple indice économique, c'est une réalité sociale c'est-à-dire un fait social qui concerne toute la société même s'il elle n'affecte pas tous ses membres.
Longtemps resté l'apanage de l'économie, le développement de travaux sociologiques sur le chômage a été largement impulsé par la réalisation d'ouvrages de réflexion sur la catégorie « chômage » (Salais, l'invention du chômage, 1986).
L'analyse du vécu du chômage n'est venue que plus tardivement. Dominique Schnapper s'inscrit dans ce qu'on pourrait ainsi nommer la sociologie des formes du chômage. Les travaux sociologiques qui se développent au début des années 80 tendent à casser l'unicité du statut de chômeur en mettant en avant la pluralité des façons de vivre le chômage (Schnapper), la diversité des facteurs et des formes de l'expérience du chômage (Balazs, Les facteurs et les formes de l‘expérience du chômage, 1983), la variété des vécus du chômage des jeunes (Le Mouel, Le chômage des jeunes, 1981). Dans cet ensemble de recherches, l'accent est mis sur les différentes manières de vivre ce « statut dérivé de l'emploi » (Schnapper 1989), selon les individus et les groupes sociaux.
D. Schnapper critique les conclusions auxquelles est arrivé Ledrut en 1966. Ce dernier considérait qu'en dehors du « chômage de frottement », le chômage n'atteignait que des « catégories périphériques » : femmes, jeunes, individus peu qualifiés, ce qui est loin d'être le cas aux vues des évolutions que Schnapper a pu constater. (cf. Michon, Chômeurs et chômage 1975)
Schnapper s'oppose aux sociologues qui annoncent régulièrement que la valeur du travail est remise en cause. Pour ces auteurs en effet, le travail aurait cessé d'être la source du statut et la norme du temps collectif. Selon Roger Sue, le temps de travail serait désormais remplacé par le temps « libéré » (caractéristique des sociétés post industrielles). Or Schnapper constate une situation toute autre : ce temps « libre » est souvent difficile à occuper pour la majorité des chômeurs.
L'auteur considère également que le chômage est « multiforme », et s'oppose ainsi à deux visions « partielles donc fausses » : l'une compatissante, qui met l ‘accent sur la détresse morale et psychologique des chômeurs; l'autre qui les rend responsable de leur situation.
[...] L'auteur montre ainsi que la grande majorité des chômeurs n'ont pas choisi cette situation. Malgré ces traits communs, elle essaie de faire ressortir la diversité des expériences vécues, suivant trois dimensions (citées plus haut) qui définiraient ainsi trois formes de vécu du chômage. À l'intérieur de ces trois groupes, trois variables influencent les comportements face au travail et donc au chômage : l'âge, le niveau culturel et les besoins financiers. Le chômage total correspond à un bouleversement complet de la vie du chômeur. [...]
[...] Les secondes atteignent plus rapidement la situation de chômage total. À travers ces différents résultats, l'auteur fait comprendre comment les différents groupes sociaux sont plus ou moins armés contre cette épreuve, comment le chômage est à la fois une sanction personnelle et sociale, fondée sur l'incapacité à mobiliser des stratégies pour trouver un emploi. Elle souligne dans sa conclusion la difficulté de légiférer sur le chômage puisque cela risque de faire bénéficier certains d'une protection excessive et d'en laisser d'autres dans dénuement (p.253). [...]
[...] On voit donc le travail de mise à distance et de vérification des données que doit opérer tout sociologue. L'auteur reconnaît cependant dès l'introduction (et souligne encore en conclusion) la difficulté d'adopter et de garder l'attitude du sociologue sur une sujet aussi lourd (p.57). On peut néanmoins regretter que l'ouvrage ne s'en tienne qu'au ressentiment des individus en situation de chômage, et ne laisse pas davantage de place aux stratégies déployées pour sortir de cette situation. Ainsi, selon Galland O. [...]
[...] Michon, Chômeurs et chômage 1975) Schnapper s'oppose aux sociologues qui annoncent régulièrement que la valeur du travail est remise en cause. Pour ces auteurs en effet, le travail aurait cessé d'être la source du statut et la norme du temps collectif. Selon Roger Sue, le temps de travail serait désormais remplacé par le temps libéré (caractéristique des sociétés post industrielles). Or Schnapper constate une situation toute autre : ce temps libre est souvent difficile à occuper pour la majorité des chômeurs. [...]
[...] Le chômage atteignant des niveaux alarmants, il s'agissait pour moi d'avoir un autre regard sur une réalité de tous les jours et de mieux comprendre ce phénomène. L'ouvrage L'épreuve du chômage de D. Schnapper, s'inscrit dans le vaste domaine de la sociologie du chômage. Cet objet déroutant révèle les difficultés de la sociologie du travail à sortir d'une approche du travail réduite à l'exercice de l'activité professionnelle. Ledrut parlait ainsi de situation sociale atypique (1966). La première enquête sociologique de renom sur le chômage est l'ouvrage de P. Lazarsfeld, M. [...]
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