Sociologue, directeur de recherche au CNRS, membre du conseil scientifique des revues : Actes de la recherche en sciences sociales, Politix, Sociologie du travail et Agora, Gérard Mauger cible ses recherches depuis une trentaine d'années sur la jeunesse, la déviance, les pratiques culturelles et intellectuelles. Au cours des dernières années, la place croissante prise par le thème de l'insécurité l'a amené à revenir sur ses travaux antérieurs portant sur « la jeunesse des milieux populaires » et à soumettre à l'épreuve de nouvelles enquêtes un schème d'interprétation construit à partir de l'ensemble de ses recherches.
La « révolte » des jeunes dans les banlieues qui s'est produite en France en novembre dernier s'inscrit pleinement dans le terrain de recherche de l'auteur. Ce dernier en propose une analyse par le biais de la construction médiatique de ce fait social dans son ouvrage : « L'émeute de novembre, une révolte protopolitique ».
En synthétisant dans une première partie les différents « récits » de « l'émeute » relatés par les médias, il reprend cette multiplicité de récits dans une seconde partie pour en dégager plusieurs analyses et confronter ses dernières à la réalité des faits établis.
La thèse finale apportée par l'auteur est que cette « révolte » réside plus dans une construction « protopolitique » orchestrée consciemment ou pas par les médias et récupérée politiquement qu'à un mouvement social revendicatif et organisé. Gérard Mauger expose au travers de cet ouvrage comment un mouvement social isolé peut, par la construction médiatique des faits sociaux être « analysé » pour être récupéré par les politiques pour asseoir ou dénoncer les politiques sécuritaires.
[...] La recherche a consisté à concentrer toutes les informations bibliographiques nécessaires à l'élaboration de sa recherche, sans confrontation au terrain. Il a donc rassemblé des journaux, des discours, des rapports, des ouvrages sociologiques, des propos rapportés par la presse et toujours contradictoires à partir desquels il a pu formuler son travail de déconstruction. C'est en cela même que réside une partie de l'originalité de l'œuvre : sociologiser un problème récent (les sociologues à la vue de la contrainte temporelle lourde et contemporaine de leur travail fournissent des analyses et des explications une fois les évènements passés) sans en apporter véritablement de réponse à cause des contraintes de temps et d'actualité. [...]
[...] L'important est la réception de ces représentations ont auprès du peuple, représentations construites et diffusées par les médias. Les possibilités que ce soulèvement ait été porté par des revendications politiques ne sont pas avérées. Pour l'auteur, si les thèses produites pour expliquer ce soulèvement ne sont pas viables, il ne propose pas de réelle analyse de l'émeute. Il réfute les motivations politiques construites et explique que la validation de ces postulats demande une enquête approfondie dans le temps. Pas une analyse à chaud pour donner du sens à un évènement médiatique. [...]
[...] En bref la jeunesse est en soi quelque chose de mauvais prompt à toutes les incartades. Là est le parallèle avec L'émeute de novembre Les déclarations du ministre de l'Intérieur et d'une partie de la droite réactionnaire s'inscrivent complètement dans ce schéma de pensée :les jeunes notamment ceux des classes populaires sont mauvais et criminels par essence. Il faut les dresser C'est ce schème de pensée qui conduit à la répression policière et au couvre- feu instauré par le gouvernement. [...]
[...] Le récit de l'émeute est complexe et difficile à déterminer de manière objective : interprété par les médias et le ministre de l'Intérieur, les jeunes victimes sont d'abord accusées de cambriolage et ensuite on attribue aux émeutiers les propriétés d'une mafia islamiste organisée. L'auteur tente donc de déterminer qui sont objectivement ces émeutiers à partir des médias et des rapports des renseignements généraux mais il va également lister l'interprétation que l'on fait de ces pratiques émeutières Il apparaît que la mise en scène du ministre de l'Intérieur vise à criminaliser les émeutiers. On note dans leurs pratiques qu'il n'y a pas eu d'agressions à l'encontre des personnes physiques. [...]
[...] Cette vision dangereuse de la jeunesse décrite dans le chapitre de Michelle Perrot est toujours inscrite dans les représentations de certains hommes politiques. Ce thème est bien repris par G. Mauger : la construction médiatique des faits sociaux est récupérée par les politiques pour criminaliser la jeunesse issue des classes populaires. L'émeute de novembre 2005 une révolte protopolitique a pour intérêt de montrer comment les médias s'approprient les phénomènes sociaux. Les reconstruisent et véhiculent les représentations. Ici celle de la jeunesse des quartiers populaires. Il dénonce également le lien entre la mise sur agenda médiatique et politique. [...]
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