"La disqualification sociale" de Serge Paugam

Résumé du document

Paugam mène son enquête dans la ville de Saint-Brieuc, ville fortement touchée par le chômage longue durée. Son enquête se décompose en 3 phases : l'analyse des caractéristiques démographiques et sociales des populations connues des services sociaux ; l'enquête par entretien auprès des habitants de la Cité du Point du jour, grand ensemble briochin, particulièrement dégradé et socialement disqualifié ; l'enquête complémentaire pour élargir le panel des ménages étudiés.

L'intention de sa recherche est double. D'une part, il veut étudier non la pauvreté en elle-même, mais plutôt les formes institutionnelles que prend ce phénomène dans la société française actuelle, et d'autre part, il veut contribuer à l'examen approfondi des expériences vécues de ces populations qui occupent les plus bas échelons de la hiérarchie sociale. Paugam cherche ainsi à analyser dans quelle mesure les populations aidées d'une façon ou d'une autre résistent à la dégradation morale et à la stigmatisation liées à l'infériorité de leur statut, c'est-à-dire de la façon dont est négociée la disqualification sociale.
Les deux dimensions étudiées par Paugam pour mener son analyse sont le rapport à l'emploi et les relations entretenues avec les travailleurs sociaux.

Extraits

[...] L'assistance différée : correspond à la première phase de la carrière morale des assistés. Tant que les assistés gardent espoir de retrouver un emploi et de se libérer des contraintes liées à la dépendance à l'égard des services sociaux, ils adoptent une stratégie de distanciation vis-à-vis des travailleurs sociaux. Ils résistent à l'entrée dans un processus d'assistance qui implique une reconnaissance individuelle de l'infériorité et de l'échec et l'acceptation du contrôle de la vie privée par des professionnels de l'action sociale. [...]

[...] La faible motivation au travail s'explique par la conscience de ces ménages de leurs chances très réduites de se réinsérer dans le marché de l'emploi. Il est même économiquement rationnel de bénéficier régulièrement d'allocations d'assistance, notamment pour les mères de famille, l'inactivité permettant de mieux s'occuper de leurs enfants. A partir de ce moment là, les ménages tentent de rationaliser leur condition (mieux élever les enfants, à cause de leur maladie ou invalidité, à cause de la crise économique) et d'élaborer des stratégies de séduction de l'assistante sociale, c'est-à- dire de gagner sa confiance en faisant preuve de son honnêteté et de sa franchise, afin d'entretenir une bonne relation avec elle et d'obtenir une entière satisfaction de ses services. [...]

[...] D'une manière générale, on peut dire que les types d'expériences vécues sont liés, au moins pour une grande part à la condition sociale objective des populations en situation de précarité économique et sociale. La typologie élaborée reflète la diversité des expériences vécues de la disqualification sociale. Il existe en définitive peu de points communs entre les trois types de bénéficiaires de l'action sociale, si ce n'est le sentiment de l'individu de bénéficier d'un statut peu valorisé et par conséquent d'occuper les plus bas échelons de la hiérarchie sociale. [...]

[...] La disqualification sociale : Serge Paugam Introduction Paugam mène son enquête dans la ville de Saint-Brieuc, ville fortement touchée par le chômage longue durée. Son enquête se décompose en 3 phases : Analyse des caractéristiques démographiques et sociales des populations connues des services sociaux. Enquête par entretien auprès des habitants de la Cité du Point du jour, grand ensemble briochin, particulièrement dégradé et socialement disqualifié. Enquête complémentaire pour élargir le panel des ménages étudiés. L'intention de sa recherche est double. [...]

[...] La marginalité conjurée : révèle les tentatives d'intégration sociale de ceux qui sont si accablés par le malheur qu'ils souhaitent trouver un équilibre et mettre fin à leur vie marginale. Cette acculturation n'est vraiment possible que lorsqu'ils bénéficient du soutien et de l'encouragement d'un proche, le plus souvent un bénévole, qui accepte de les aider dans leur démarche. La marginalité organisée : correspond à la reconstruction symbolique d'un cadre culturel tolérable dans un espace contrôlé par l'expérience des échanges et des activités quotidiennes et parfois grâce aux ressources de l'imaginaire. [...]