Contrairement aux thèses en vigueur originant l'histoire de sciences sociales dans les courants anglais et allemand du I9 ème, Durkheim pense qu'elle est née dans la pensée philosophique française du 18e, et que c'est Montesquieu qui en a été le pionnier. Il a établi les principes de la science nouvelle, particulièrement en étudiant les lois qui sont un fait social spécifique mais présent dans toutes les institutions, et selon une méthode qui est transposable.
Sa contribution ne consiste pas tant dans l'élaboration de savoirs complets actualisables -(les instruments nécessaires à l'exploration étaient alors rudimentaires)- mais parce qu'il a su lui donner un caractère scientifique en élaborant son objet, sa nature, sa méthode, autant d'éléments déterminés sur lesquels elle s'établira comme science sociale.
Selon Durkheim, pour mériter un statut scientifique, un certain nombre de conditions doivent présider à l'existence de cette science sociale. Il lui faut d'abord traiter d'un objet qui lui soit propre : «la chose sociale», qui doit être réelle, observable, descriptible.
Montesquieu s'est attaché à décrire les choses sociales, les diverses sociétés, leurs déterminismes, leurs institutions et leurs valeurs. Il a en a étudié la nature, l'origine, les liens de causalité, il les a observées, classifiées, comparées et interprétées. Pour constituer la science sociale, il a contribué à établir des notions clefs indispensables, en particulier la notion de type et la notion de loi. Montesquieu a instauré ainsi une méthode élaborée et sérieuse que la science actuelle doit retenir comme légitime (même s'il effectue de fréquents aller-retour entre une méthode très rigoureusement inductive ou parfois plus approximativement déductive).
Au fil de son écrit décrivant « la contribution de Montesquieu à la science sociale » et où il lui rend hommage en lui reconnaissant le titre de pionnier de la sociologie, Durkheim indique qu'il en partage la majorité des thèses .
Deux éléments y apparaissent comme étant des concepts fondamentaux de sa propre pensée : l'holisme d'une part, et le déterminisme (bien plus encore que pour Montesquieu,) qui sont pour lui, de manière totale, sans la moindre restriction, les principes qui règnent sur toutes les choses sociales. Sur le plan de la méthode employée dans ce travail d'étude des faits sociaux, l'objectivité est le critère absolument essentiel.
[...] Actualisation des thèses de Durkheim Déterminisme et holisme Dans son étude sur la contribution de MONTESQUIEU à la constitution sociale DURKHEIM reprend à son compte la notion centrale, de déterminisme, conception selon laquelle il existe des rapports de cause à effets entre les faits sociaux. Cette manière d'aborder les faits sociaux était alors nouvelle, et pour beaucoup, cette notion était associée à celle de fatalisme, donc privatrice d'espace de liberté. Le fatalisme implique que les phénomènes se produisent nécessairement sans cause repérable si ce n'est le destin, ou Dieu. [...]
[...] Il retient deux types de sociétés qui se différencient suivant des critères morphologiques de volume et de densité de population. Elles abordent différemment la division du travail qui détermine des formes différentes de solidarité. Dans les sociétés modernes inégalitaires, la répartition sociale est dynamique, la division du travail est fonctionnelle, et engendre logiquement une solidarité organique. Les sociétés traditionnelles sont égalitaires, le travail y est peu différencié, ce qui détermine une solidarité mécanique. Il faut chercher quel principe dicte les conduites dans une société. [...]
[...] Pathologie et santé en sont partie intégrante au même titre. Il faut chercher le signe qui indiquera si l'on est dans un contexte normal ou pathologique dans cette société à ce moment là. II -le holisme méthodologique L'individu ne compte pas, la dimension individuelle, la psychologie, les passions sont exclues de l'approche du fait social. Il est une réalité supra individuelle il est spirituellement et moralement supérieur à la dimension individuelle. Le social ne saurait s'expliquer par une nature extérieure autre que le social ; une société n'est pas réductible à la mise en commun de ses membres, elle est de nature différente. [...]
[...] La méthode déductive est une méthode équivoque à l'image d'une doctrine équivoque, du côté de l'art, source de préjugés, nous éloignant du réel, car la complexité de cette science, l'intrication des liens entre les choses sont telles que la logique des choses sociales échappe à la raison. Les constitutions du pouvoir souverain, à l'image de la vie sociale toute entière diffèrent suivant les sociétés, mais elles peuvent cependant être comparées. Si MONTESQUIEU ne s'en n'est pas tenu à classer les formes de sociétés uniquement suivant les formes de gouvernement et de propriété existants, il a particulièrement analysé leurs différences structurelles pour établir une typologie Contrairement aux Aristotéliciens, il n'a pas pris en compte le critère quantitatif pour les qualifier. [...]
[...] Pour lui, il y a corrélation entre les conditions démographiques et les principes de gouvernement. Ainsi, la République qui englobe Aristocratie et Démocratie, a pour caractéristiques un faible volume (modèles des cités antiques), de type égalitaire, administré par le peuple, avec une similitude des individus ce qui engendre une solidarité de type mécanique, un intérêt communautaire, la vertu politique est l'amour de la patrie, le principe régulateur est l'obéissance aux lois. La Monarchie, quant à elle, à pour caractéristique d'être de volume moyen (modèle des nations modernes d'Europe occidentale) de type inégalitaire, le pouvoir est réparti, la répartition sociale est dynamique, et changeante, c'est une société en mouvement qui pratique la division du travail, une différenciation des rôles. [...]
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