Les auteurs s'intéressent à l'expérience pratique des villes, l'espace urbain que l'on arpente et les interactions qu'il rend possible. L'intérêt, la difficulté et les enjeux de l'aménagement de l'espace public résidant dans la rencontre en son sein des formes sociales et spatiales.
L'aménagement de cet espace croise des dimensions de l'environnement (objets saisis au niveau sensoriel et physique), du milieu (interactions, échanges sociaux) et du paysage (plan esthétique). Comment rendre compte de la coexistence et de la codétermination de ces formes sensitives, sociales et spatiales, de la construction sensible de l'espace public ?
L'oeil posé sur l'espace urbain suppose une mise à distance qui privilégie le paysage et se met en quelque sorte hors champ en même temps que l'environnement visuel est généré par les formes, les signes et l'activité des citadins.
Il faut souligner la porosité du public et du privé : un espace est public quand il est ouvert à tous, et privé quand son accès est contrôlé et réservé à certaines populations. La matérialité de l'espace bâti devrait en théorie permettre de différencier les deux facilement et clairement. Cependant, étant donné la diversité des espaces sensoriels on peut être partiellement présent dans des lieux qui ne sont pas accessibles à notre présence physique : on peut voir à travers une vitre, entendre une conversation dans le couloir,... On doit plutôt parler de "degrés de porosité" que d'imperméabilité entre le public et le privé. Il faut questionner les modalités sensorielles et les possibilités perceptives qui instrumentent notre inscription dans l'espace.
D'un point de vue sociologique, l'espace public est souvent considéré comme un espace où doivent coexister des étrangers. Cet espace est le lieu de la définition des relations en public (civilité, convenances, tact, ...) qui ont un caractère instable. Il y a donc là questionnement de la production même de la vie sociale. Mais le cadre matériel de l'environnement construit interfère avec l'activité des citadins, alors qu'on ne se centre en général que sur les formes d'interaction sociale, sans prendre en compte leur contexte physique. Selon les auteurs, ce sont les relations mutuelles de l'acteur et du cadre qui font la scène publique. L'activité perceptive et expressive des acteurs dans un contexte est l'instrument d'élaboration de l'échange social, il faut qu'en mobilisant leur environnement par une activité perceptive et expressive ils produisent ensemble un champ d'observabilité partagé (...)
[...] Les usagers peuvent soudainement voir et être vu quand le métro sort d'une zone d'ombre, ils prennent conscience qu'ils sont observables en pouvant eux même observer autrui et cela précise les conditions à partir desquelles la réciprocité des perspectives devient possible. La troisième classe de surexposition est diurne et liée à l'espace construit. Des parois claires, des escaliers très saillants dans le paysage par exemple mettent les gens qui y passent en exergue. Cette surexposition par contraste dépend essentiellement du rapport figure/fond. [...]
[...] Note de Lecture : L'espace public, modes sensibles. Le regard sur la ville»[1], Grégoire Chelkoff, Jean-Paul Thibaud. Les auteurs s'intéressent à l'expérience pratique des villes, l'espace urbain que l'on arpente et les interactions qu'il rend possible. L'intérêt, la difficulté et les enjeux de l'aménagement de l'espace public résidant dans la rencontre en son sein des formes sociales et spatiales. L'aménagement de cet espace croise des dimensions de l'environnement (objets saisis au niveau sensoriel et physique), du milieu (interactions, échanges sociaux) et du paysage (plan esthétique). [...]
[...] D'autre part, l'utilisation de matériaux filtrants et non plus opaques dans l'architecture et les ouvertures plus larges amènent non plus des ombres mais des diffractions, des reflets, A l'espace bien délimité succède un espace plus fluide, aux limites incertaines. C'est plus la surimpression et le fondu-enchaîné qui caractérisent le futur espace visuel urbain. L'utilisation du verre dans de nombreux bâtiments conduit soit à des limites plus diffuses entre dedans et dehors soit à des reflets qui renvoient l'image et déstructurent l'espace. Le verre produit également un filtre des sens par la discrimination du voir et de l'entendre. [...]
[...] Trois formes d'accessibilité visuelles repérées lors de la recherche des auteurs semblent très intéressantes : La surexposition, le cadrage et le filtrage. Elles ne sont pas exclusives (dilatation, compression, estompage, découpe, approfondissement, ) mais elles possèdent sans doute une place privilégiée dans la construction visuelle de l'espace public. - La surexposition : Il y a dans cette notion plus que celle d'exposer à la vue, il y a également une idée de différentiation et de hiérarchisation des objets du monde visible. [...]
[...] Les mises en vue, entre paysage et objet visuel trop détaillé, correspondent mieux à l'expérience du citadin et l'analyse des mises en forme visuelles de l'espace urbain. Précisons que les auteurs ne prétendent pas à l'exhaustivité dans leur analyse des mises en vue, et que les différentes formes de celles-ci ne sont pas exclusives mais se combinent souvent dans la complexité des phénomènes visuels relatifs à l'espace public. Cette approche permet également d'intégrer le temps dans l'expérience visuelle du citadin, mobile, qui se déplace et laisse son regard vagabonder. [...]
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