Sociologue et anthropologue, Roger Bastide (1898-1974) a laissé une œuvre très riche, orientée autour de trois thèmes : l'ethnologie religieuse, l'acculturation et les rapports entre inconscient et société. Il s'est illustré dans de nombreux travaux de recherches (notamment sur les cultures afro-brésiliennes), de riches enseignements, et de nombreux ouvrages qui ont véritablement permis l'introduction de l'étude des civilisations afro-américaines dans l'anthropologie et la sociologie française. Dans son ouvrage Les Amériques Noires (1967), il s'attache à étudier la diversité et les convergences de ces civilisations afro-américaines. Il veut dépasser le débat qui opposait Herskovits à Frazier au sujet de l'intégration des noirs en Amérique. Ainsi, en soulevant les problèmes du mélange des cultures, de l'acculturation, de l'assimilation, de l'intégration, des résistances et des survivances culturelles, du syncrétisme religieux, et en étudiant le personnage de l'esclave créole, Roger Bastide produit une analyse tout à fait nouvelle de la question. Sa réflexion sur les influences culturelles africaines au sein des sociétés américaines, issues de l'esclavage, le mènera à la mise en évidence d'une logique métisse, dont on le considère être le précurseur. Pour se faire, il se concentre tout d'abord sur le dépassement du débat Frazier/Herskovits, et l'analyse qu'on doit y substituer (il introduit ainsi la nécessaire contextualisation de l'analyse, et la distinction entre civilisations africaines et civilisations nègres). Puis, il nous invite à une réflexion sur les phénomènes de syncrétisme et de métissage. Il peut alors, enfin, mettre en évidence l'existence d'une véritable culture métisse.
[...] C'est là l'apport fondamental de Bastide, qui est qualifié par certains de créateur de la pensée métisse III) . qui aboutit à la mise en évidence d'une logique métisse 1 - Les communautés nègres ou le noir créateur Roger Bastide revient dans son Chapitre sur la mise en évidence (opérée au début de l'ouvrage) d'un double mouvement auquel le nègre est soumis : il a tendance à se tourner vers son passé perdu pour le revivre, et en même temps, il doit s'adapter à son nouveau milieu pour vivre. [...]
[...] En Amérique catholique en revanche, la pression évangélisatrice a été moins forte. Certes, on voulait convertir les noirs (et eux-mêmes savaient qu'ils devaient le faire pour s'intégrer), mais on a laissé des vannes ouvertes (on ne leur apprenait que quelques prières Les traits culturels africains ont pu se maintenir, et même s'il y a eu quelques tiraillements parfois, il y a eu métissage religieux, et syncrétisme. Avec une exception tout de même : le culte des morts est resté en partie africain. [...]
[...] Dans le cadre d'une étude complète des cultures afro-américaines, il serait en effet réducteur de ne pas tenir compte des interactions entre culture noire et culture indienne, alors même que ces deux peuples ont un point commun non-négligeable : ils sont soumis à la domination des blancs. Leurs relations peuvent faire l'objet de plusieurs remarques. Tout d'abord, malgré l'agressivité des noirs envers les Indiens (entretenue par les blancs), le métissage a été assez large. Par cette fusion de sang il y a eu fusion de civilisations selon les propres termes de Roger Bastide. [...]
[...] Bastide conclut donc à une survivance religieuse très forte, qu'il met en parallèle avec une adaptation dans le domaine économique. Il peut ainsi introduire la notion de Coupure : l'américain noir vit dans deux mondes : il s'adapte à la société environnante, et maintient par ailleurs, dans un autre domaine, la religion de ses pères Ce principe permet d'expliquer que les noirs vivent très bien cette acculturation, ils ne se sentent pas tirailler, car à différents secteurs de la vie, ils associent différents repères culturels. L'Afrique traditionnelle peut donc survivre en Amérique, sans problème, d'après Bastide. [...]
[...] Il fait allusion au marronnage comme l'expression d'une résistance culturelle. De plus, il se réfère aux Bosh des Guyanes hollandaises et françaises et estime que ce sont eux qui ont le mieux conserver les modes de vie africains. On explique cela par le fait qu'ils vivaient dans la foret, donc le changement d'environnement n'est pas radical, par rapport au cadre africain. Cette explication est essentielle pour soulever la conclusion principale de cette étude des nègres marrons : il n'y a adaptation des modes de vie africains, que là où les contraintes du nouvel environnement exigent cette adaptation. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture