Avec 80% au bac… et après, Stéphane Beaud déplace son principal objet d'étude : les transformations du monde ouvrier sur le terrain de l'institution scolaire. Dans cet ouvrage, il étudie les trajectoires scolaires de quelques jeunes fils d'ouvrier de la région industrielle de Montbéliard. Il s'agit de montrer comment, dans le contexte de la démocratisation scolaire, des jeunes issus de milieux populaires ont obtenu leur baccalauréat, puis échoué à l'université qui leur offrait pourtant de nombreuses promesses d'avenir. C'est sur la base d'une enquête monographique menée sur dix ans auprès de quelques-uns uns de ces jeunes que Stéphane Beaud propose une étude qualitative des mécanismes d'échec universitaire.
[...] Il se comprend à travers de multiples mécanismes de décrochages scolaires. C'est à travers l'analyse des entretiens obtenus auprès de deux des quatre jeunes qu'il a suivis que Stéphane Beaud essai de saisir ces mécanismes. L'un de ces deux jeunes, Nassim, parle de son échec à la faculté comme d'une défaite lors d'un combat de boxe, il dit avoir finalement jeté l'éponge C'est que la scolarité à la faculté est pour lui un long combat contre lui-même. Coincé entre le quartier et l'université, il ne parvient pas se résoudre au travail universitaire, lequel est vécu comme une contrainte lourde à laquelle il est incapable de s'astreindre. [...]
[...] Ce sont ces ressources que le système ne leur fournit pas. Conclusions. Le point de vue ethnographique. Pour rendre compte des parcours scolaires des jeunes de milieu populaire qu'il observe l'auteur s'efforce de répondre à trois questions qui traversent l'ensemble de l'ouvrage. Quels comportements expliquent leur parcours ? En quoi les normes collectives (que ce soit du coté de la famille, du quartier, du coté de l'université et de ses règles de fonctionnement ou encore du coté du contexte social général des années 1990) agissent-elles sur ces comportements ? [...]
[...] Enfin les DEUG se situent au bas de la hiérarchie. Face à cela les jeunes de milieu populaire se retrouvent à la fac parce qu'ils n'ont pas d'autres perspectives scolaires. Ils sont conscient des inconvénients de l'université et redoutent d'y entrer, mais n'ont pas tellement d'autre choix. Cela montre bien à quel point l'horizon des possibles scolaires se restreint à mesure que l'on descend dans la hiérarchie sociale. L'ouvrage montre ainsi comment réussite scolaire et origine sociale sont corrélé, et même lorsque l'on observe le phénomène de très près. [...]
[...] L'expérience de la faculté confirme leurs craintes. A son contact, ils réalisent que la faculté demande une soumission plus grande encore qu'au lycée à la culture scolaire légitime. La nécessité de lire, de s'informer, de fournir un travail personnel hors des cours y est encore plus grande. Mais à cela s'ajoute une gestion des temps scolaires délicate. Ils n'assistent pas à l'ensemble des cours, revenu dans le quartier en dehors des cours ils se trouvent sans repères temporels et ne parviennent pas à organiser leur temps libre pour fournir un travail personnel minimum qui leur permettrait de s'en sortir. [...]
[...] Il convient d'insister sur le rôle de l'université dans ces échecs. Certes les jeunes des quartiers populaires ne parviennent pas à se socialiser à l'univers des étudiants, mais parallèlement l'université s'avère incapable de les aider. On peut insister sur l'impersonnalité de la faculté, sur le flou temporel qu'on a déjà évoqué Stéphane Beaud parle d'anomie du monde universitaire - mais aussi sur l'abstraction des cours, et enfin sur l'absence d'encadrement pédagogique et d'entraînements écrits et oraux, absence qui n'est pas sans lien avec le manque de moyen des universités (réduction de la durée des épreuves, disparition des interrogations orales, concentration des études sur une seule discipline). [...]
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