« 80% d'une classe d'âge au bac », tel est l'objectif lancé en 1985 par Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l'Education nationale. Entre 1985 et 1995 la notion de démocratisation de l'école a ainsi connu son apogée. Nombre d'espoirs fleurissent et les sociologues se penchent sur une nouvelle école aux allures d'égalité des chances, de massification des effectifs, d'accès à l'éducation généralisé. Effectivement, les chiffres sont séduisants : de 30% de bacheliers en 1985, on est passé à près de 65% dix ans plus tard.
Oui, mais…? Que deviennent ces jeunes qui ont cru voir se dessiner un avenir meilleur, qui croyaient en l'école et pensaient que le baccalauréat ouvrait d'autres portes que celles de leurs parents ? Cet objectif a reçu un accueil mitigé de la part des acteurs du système scolaire et rapidement des sociologues ont énoncé leurs inquiétudes sur les effets de cette politique.
[...] Ils sont perdus dans une université qui apporte aux étudiants un savoir très théorique sans encadrement suffisant. D'ailleurs, ce qui est d'abord éprouvé en quittant le lycée, c'est la perte d'un temps institutionnalisé, plein et dense. Les différentes scansions temporelles de l'ordre scolaire leur fournissaient en effet des points de repère, le contrôle continu des connaissances et le suivi du programme leur permettaient d'inscrire leur travail dans un temps prévisible et planifiable. Au contraire l'université est pour eux un temps vide et fuyant. [...]
[...] Les enfants de la démocratisation scolaire n'aura-t-elle pas, contre toute apparence et en dépit de discours politiques unanimes, formé une génération sacrifiée ? L'enjeu est désormais de réussir une démocratisation qualitative en réévaluant le travail scolaire et en modifiant le système éducatif, notamment à l'Université. Ce livre a vraisemblablement reçu un bon accueil dans le milieu éducatif. Ce qui est également intéressant, c'est que le livre a donné lieu à des réactions de la part de jeunes de quartiers populaires, qui ont écrit à l'auteur pour dire combien ils se retrouvaient dans ce livre. [...]
[...] écrit ainsi Beaud. Ils constituent une seconde génération la génération des enfants de la démocratisation très différente de celle de leurs parents mais dont certains revendiquent la reconnaissance pour le rôle de ces derniers dans la reconstruction de la France, ils se sentent en droit de réclamer le règlement de la dette que la France a contractée à leur égard Conséquence de la politique des 80% au bac sur le système éducatif Contraint de répondre aux injonctions venues d'en haut, le système scolaire a été déstabilisé. [...]
[...] L'échec récurrent aux concours leur fait mesurer l'intensité de la compétition sociale et la faiblesse de leurs chances de réussir ces épreuves. La fuite vers l'emploi prend une autre forme, celle du déclassement de fait vers des emplois sans qualification, comme pour rattraper le temps perdu par ces années d'études pour rien. Les jeunes, fragilisés psychologiquement et moralement avec leur arrivée dans les études supérieures, éprouvent une grande difficulté à s'installer professionnellement et socialement. Premiers lycéens de leur famille, étudiants malgré eux, ces jeunes deviendront des salariés précaires. [...]
[...] L'auteur décrit dans le détail la chronique d'un échec annoncé, échec qui est d'abord dissimulé, ensuite relativisé par ces jeunes qui tentent de se trouver des circonstances atténuantes : un prof incompétent, des conditions familiales défavorables . Dès lors, l'avenir devient de plus en plus incertain. Lorsque, quelques années plus tard, ce sont les études entières qui se révèlent être un échec, soit parce qu'elles ne permettent pas d'obtenir un diplôme, soit parce qu'elles n'offrent qu'un assignat scolaire, il s'agit de gérer l'amertume et de reconvertir les visées initiales en ambitions accessibles. [...]
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