La notion de «risque» connaît un engouement certain depuis quelques décennies : en effet, il semble que le succès de la gestion du risque soit indéniable depuis que les premières avancées sociales aient consacré l'Etat providence comme le protecteur des risques encourus par son citoyen simplement en vivant (les risques de maladies, chômage, accident du travail, risques liés à la vieillesse, et même depuis peu les risques liés à l'environnement dans lequel on vit). Certains vont même jusqu'à penser que le type de société dans lequel nous évoluons serait à même de produire des risques inédits dont Tchernobyl, la crise de la vache folle ou l'histoire du sang contaminé seraient emblématiques. C'est ce qu'affirme par exemple le sociologue constructiviste Ulrich Beck dans son livre « La société du risque ». Il nous propose une analyse selon laquelle la modernité (c'est-à-dire le développement des techniques, des capacités de la manipulation de la nature, le recul des frontières du savoir…) produirait elle-même les germes de sa disparition. Sans aller jusque-là, certains dénoncent même le fait que nous soyons entrer dans une « société assurantielle », où finalement nous tentons de tout prévoir, tout anticiper et nous nous assurons désormais pour de plus en plus de choses car nous avons de plus en plus peur des aléas de l'existence.
[...] Cette production serait aussi l'expression contemporaine d'une société occidentale vieillissante qui se perçoit comme menacée de l'extérieure par des pays moins chanceux (émergence de l'expression risque migratoire et de l'intérieur par l'augmentation de l'insécurité sociale comme le décrit le livre du même nom de R. Castel L'insécurité sociale. Qu'est qu'être protégé ? Sachant de plus que la moitié de la population mondiale est devenue urbaine au début du XXIème siècle, cette représentation du risque, cette prolifération des discours du risque va de plus en plus se faire dans un contexte urbain, c'est-à-dire au niveau des villes. [...]
[...] Ainsi en novembre 2001 on a assisté à une opération policière spectaculaire avec confrontations et arrestations, dans le but de reprendre en main de façon sécuritaire le quartier de Nurtepe. En c'est le démantèlement de filières qui alimentaient un pan de la criminalité d'Istanbul qui s'opère : en effet, les banlieues servaient de zone d'entraînement par certains gangs et dès lors, on fait l'amalgame entre Kurdes, criminalité et organisation politique illégale. On glisse doucement vers la question du risque terroriste à Istanbul, question qui a un lourd passé dans cette agglomération (cf. : luttes urbaines à la fin des années 70). [...]
[...] Dorso la muraille devient une marge interne un territoire du risque (stigmatisation criminalisante). Et c'est dans les années 90 que se forge cette représentation négative de la muraille. Cela va de pair avec une stigmatisation ethnique, dans le sens où par exemple dans le quartier de Sulukule une importante concentration de populations kurdes est présente. La stigmatisation criminalisante est dès lors directement associée à cette forte concentration de kurdes en ce lieu. Ainsi, la stigmatisation socioéconomique découle d'elle-même, dans le sens où la marginalité, la pauvreté sont des éléments que l'on retrouve dans ce quartier. [...]
[...] Avec toutes les précautions terminologiques et épistémologiques que l'on doit prendre lorsque l'on parle d'un concept, le risque peut se concevoir comme le produit de l'aléa et de la vulnérabilité. Seulement, il ne faut pas perdre de vue que le risque est une construction sociologique ; il est le résultat d'une conception, d'une croyance subjective plus ou moins forte et plus ou moins rationnelle en fonction du niveau de la prise en compte des éléments empiriques et scientifiques pour fonder notre idée de la réalité du risque. [...]
[...] Mais l'argument du risque est souvent manipulé pour arriver à la régénération urbaine Face à ces risques, certains n'attendent pas que les pouvoirs publics mènent des politiques contre l'insécurité et préfèrent avoir recours à des habitations type Gated Communities ou le phantasme d'une ville sans risque. Les Gated Communities sont des complexes résidentiels sécurisés et doté d'un équipement réservé et d'un mode d'administration propre. Ce phénomène est très récent à Istanbul mais très spectaculaire, il y en aurait près de 700, ce qui représente logements, alors que seulement 1/3 serait habité réellement. Les lieus favoris de ces complexes sont les quartiers comme Sariyer, Uskudar, Bekoz, Besiktas. A Acarkent on trouve la plus grosse qui regroupe 600 logements dans 5 blocs. [...]
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