« Les Barbares qui menacent la société ne sont point au Caucase ni dans les steppes de la Tartarie ; ils sont dans les faubourgs de nos villes manufacturières… » écrit Saint-Marc Girardin dans le Journal des Débats, le 8 décembre 1831. Barbares, sauvages… les classes laborieuses sont, au XIXème siècle, décrites dans des termes à forte connotation raciale ou ethnique par la bourgeoisie et l'aristocratie. Les sentiments de la « classe » dominante à leur égard vont du mépris à la condescendance, de la haine à la peur… La peur, l'angoisse, la crainte face à ces classes laborieuses sont en particulier des sentiments très répandus, et qui n'ont pas forcément disparu depuis, comme le prouvent les réactions, en France, face aux émeutes de l'automne 2005 (même s'il est clair que les classes laborieuses d'antan n'ont que peu en commun avec celles d'aujourd'hui).
[...] Les classes laborieuses semblent donc potentiellement moins dangereuses, car davantage intégrées à la nation et aux régimes politiques. Reprenant le titre de l'ouvrage de Louis Chevalier, Classes laborieuses et classes dangereuses à Paris dans la première moitié du XIX° siècle, il était donc intéressant d'analyser les raisons de cette confusion récurrente au travers les siècles entre classes laborieuses et classes dangereuses. Qu'on l'appelle peuple, populace, classes laborieuses ou dangereuses, cette partie importante de la population se trouve reléguée, hier comme aujourd'hui, sinon dans la condition criminelle, du moins aux confins de l'économie, de la société et presque de l'existence dans une condition matérielle et morale favorable à la criminalité et à la rébellion. [...]
[...] Hobsbawm, Fayard L'ère des empires 1875-1914, Eric J. [...]
[...] entre fantasmes et stéréotypes II Des classes laborieuses à la classe ouvrière. L'organisation des masses laborieuses, potentiellement dangereuse pour l'ordre politique et social, se révèle porteuse de pacification des antagonismes sociaux le rôle historique de la classe ouvrière selon Marx et Engels Les Etats cherchent à favoriser des rapports contractuels pour mettre fin aux mouvements insurrectionnels L'intégration progressive des mouvements ouvriers à la nation et aux systèmes politiques nationaux Bibliographie Classes laborieuses et classes dangereuses à Paris pendant la première moitié du XIXème siècle, Louis Chevalier, Plon La peur du rouge, Pascal Delwit et José Gotovitch, Editions de l'Université de Bruxelles Les ouvriers dans la société française XIXè-XXè siècle, Gérard Noiriel, Editions du Seuil L'ère des révolutions, J. [...]
[...] Mais la criminalité n'est qu'un des aspects de la violence des classes ennemies de l'ordre établi. Enfin, il s'agit de distinguer ce qui relève du fantasme et du stéréotype de la réalité de ces classes laborieuses. La criminalité apparaît indistincte de la misère et entretenue par elle ; il semble exister selon de très nombreux observateurs une situation intermédiaire et indéterminée entre misère et violence, une frontière incertaine entre classes laborieuses et classes dangereuses. Frontière qui dépend des circonstances économiques et politiques, qui varie au gré des révolutions, des crises ou des épidémies. [...]
[...] Mais la confusion entre classes laborieuses et classes dangereuses relève avant tout de l'angoisse de la classe dominante face à cette foule miséreuse. Les classes laborieuses souffrent en fait de leur diversité, de leur éclatement : Marx et Engels l'ont compris, leur capacité à révolutionner le système et donc à mettre en danger la classe dominante dépend de leur capacité à s'unifier et à s'organiser. La bourgeoisie eût donc très longtemps peur d'une révolution sociale. Avec l'organisation des classes ouvrières, elle dut affronter une nouvelle crainte : celle que l'importance des mouvements ouvriers suscitait. [...]
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