Comment l'interaction de facteurs économiques, politiques et sociaux a-t-elle abouti, en plusieurs décennies, à l'émergence d'un réel marché aux enfants ? Comment des êtres humains dont on reconnaissait de plus en plus la valeur sacrée, ont-ils pu se voir attribuer un prix ?
Cet article de V. Zelizer, professeur de sociologie économique à l'université de Princeton qui a beaucoup travaillé sur la marchandisation d'objets à forte valeur symbolique permet d'apporter des réponses à ces questions. Pour cela, l'auteur a conçu un article en 2 parties.
Dans un 1er temps, elle se livre à une réflexion théorique présentant les différentes critiques à la théorie néo-classique du marché, réflexion qui a pour but de démontrer la supériorité scientifique du dernier modèle proposé par V. Zelizer.
Ensuite, l'auteur tente d'illustrer ses propos théoriques par une étude concrète, celle de l'émergence du marché aux enfants aux Etats-Unis à la fin du XIXème et au début du XXème siècle. Cette analyse chronologique montre le rôle des interactions entre facteurs économiques, politiques ou sociologiques dans la mise en place et l'évolution de cette institution économique qu'est un marché.
[...] Comment fournir une interprétation culturelle du marché ? En étudiant les valeurs qui sous-tendent l'échange marchand, leur évolution et leur influence sur la vie sociale. L'auteur dégage trois grands types d'analyse de l'intégration de la culture au marché La culture de marché comme ensemble de significations appropriées (Taussig et Agnew) Taussig et Agnew, en étudiant respectivement les mineurs d'étain boliviens et le marché et le théâtre en Angleterre et aux Etats-Unis de 1550 à 1750, tendent de comprendre comment se forme une culture de marché Ce concept désigne un ensemble de valeurs qui émerge en réponse à l'expansion d'une économie de marché. [...]
[...] Des bébés au marché noir : le prix d'un enfant sans prix Le fort développement de la demande de bébés favorise la croissance d'un marché noir. Parallèlement à l'attrait affectif que les bébés suscitent chez de nombreux parents, l'adoption qui voit dans les enfants le moyen de gagner de l'argent se poursuit au début XXème siècle. Des maternités ainsi que des prêtres prennent part à ce trafic commercial et acceptent d'aider les mères à se débarrasser de leur bébé en échange d'une somme d'argent. En fait, le développement d'un double marché aux bébés est perceptible dès 1910. [...]
[...] Zelizer sur La Signification sociale de l'argent. Le sujet étudié est assez original pour l'époque, mêlant relations de parenté et économie. Cet article, qui présente sans doute la recherche la plus connue de V. Zelizer, a rencontré un grand écho dans le monde de la sociologie. Il a renouvelé l'intérêt des sociologues pour les phénomènes économiques et est à rapprocher d'autres recherches sur l'économie domestique (telles que celles de F. Weber) et de travaux sur les aspects sociaux de la monnaie, tels que ceux d'A. [...]
[...] Ce modèle des marchés multiples est celui qui sous-tend l'analyse que l'auteur développe dans la suite de l'article, celle de l'évolution du marché aux enfants aux Etats-Unis de 1870 à 1930. L'auteur propose en fait de bâtir une théorie à mi-chemin entre l'absolutisme culturel et l'absolutisme socio-structurel qui rendrait compte des interactions entre facteurs économiques, culturels et structurels. L'élaboration de ce modèle des marchés multiples a été l'objet des différentes recherches de V. Zelizer à travers l'étude de cas empiriques : le marché de l'assurance-vie, puis celui des enfants. [...]
[...] On peut ajouter au passage que Weber voyait également dans le marché un type de rapport déshumanisant, dans la mesure où l'intérêt y est tout entier consacré à l'argent et aux objets, sans considération pour les individus. Notons que ces conceptions d'une extension potentiellement infinie du marché se basent sur une vision de l'argent comme intermédiaire neutre. A l'opposé, certains travaux récents, tels ceux de V. Zelizer elle- même sur la signification sociale de la monnaie montrent que l'usage de l'argent est conditionné par des facteurs sociaux : s'il a telle origine, il ne pourra pas être utilisé de telle façon (par exemple, l'argent qui provient d'un héritage devra être utilisé d'une manière socialement acceptable). [...]
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