La lutte pour la reconnaissance est devenue la forme paradigmatique du conflit politique à la fin du 20e siècle. Les revendications de « reconnaissance de la différence » alimentent les luttes de groupes mobilisés sous la bannière de la sexualité notamment. L'identité collective remplacerait les intérêts de classe. Dans ces nouveaux conflits comme lieu de mobilisation politique, l'injustice fondamentale ressentie n'est plus l'exploitation mais la domination culturelle. Notre étude s'est fondée sur le constat d'un investissement de revendications identitaires que des personnes au statut dit « minoritaire », en prenant le cas des lesbiennes, engagent dans une certaine forme de supports médiatiques, culturels ou associatifs.
Ces supports fédèrent autour de styles de vie ou de goûts communs, ils traduisent parfois des stratégies (op)-positionnelles, ils apparaissent comme rassembleurs en réunissant des groupes d'individus autour de références partagées, et simultanément comme distinctifs car chacune engage son identité en revendiquant son adhésion (ou sa non-adhésion) à tel ou tel support. Le terrain de notre enquête nous a conduits à nous placer dans le cadre du processus de construction/socialisation identitaire chez un échantillon d'adolescentes et de jeunes adultes à travers l'identification à une personnalité médiatique affichant son homosexualité durant une émission de télé-réalité, et à travers son fan-club virtuel présent sur Internet et tenant lieu d'instance homosocialisatrice selon nos hypothèses.
[...] Très souvent, les individus entendent des injures sur l'homosexualité avant même de connaître leur propre sexualité. De ce fait, les membres du fan-club ont parfois tendance à parler de leur homosexualité ou de l'homosexualité en général en des termes d'aveu et de honte en se situant dans une logique de discrétion et d'intériorisation de ces schèmes de perception de ce qui est socialement acceptable. L'utilisation de guillemets notamment dans les messages du forum de discussions renvoie à cette connotation, comme s'ils avaient du mal à prendre ce sujet à leur compte ou pour justifier l'emploi de termes jugés peut être trop évocateurs pour eux : coming out communauté lesbienne hétéros homosexualité gay De cette façon, les adolescentes lesbiennes ne peuvent se définir dans ces discours de façon positive, elles s'enferment alors dans ce qu'on appelle le placard, sorte de secret, de place négociée qui leur est d'emblée destinée. [...]
[...] Le sens de l'altérité. Penser les (homo)sexualités. Paris : L'Harmattan, Coll. Sexualité humaine. MOATTI, Michel (2002). La vie cachée d'Internet: réseaux, tribus, accros. Paris : Imago. MOULIN, Caroline (2005). Féminités adolescentes. Itinéraires personnels et fabrication des identités sexuées. [...]
[...] De la visibilité à la reconnaissance : réflexions sur la construction identitaire des lesbiennes La lutte pour la reconnaissance est devenue la forme paradigmatique du conflit politique à la fin du 20e siècle. Les revendications de reconnaissance de la différence alimentent les luttes de groupes mobilisés sous la bannière de la sexualité notamment. L'identité collective remplacerait les intérêts de classe. Dans ces nouveaux conflits comme lieu de mobilisation politique, l'injustice fondamentale ressentie n'est plus l'exploitation, mais la domination culturelle. Notre étude[1] s'est fondée sur le constat d'un investissement de revendications identitaires que des personnes au statut dit minoritaire en prenant le cas des lesbiennes, engagent dans une certaine forme de supports médiatiques, culturels ou associatifs. [...]
[...] Paris : PUF BOURDIEU, Pierre (1980). Le sens pratique. Paris : Minuit. BOZON, Michel (2002). Sociologie de la sexualité. Paris : Nathan Université, Coll.128. CARAGLIO, Martine (1997). Les lesbiennes dites masculines ou quand la masculinité n'est qu'un paysage Nouvelles Questions Féministes 58-75 CHAMBERLAND, Line (1997). Présentation du fléau social au fait social : l'étude des homosexualités Sociologie et sociétés, Vol XXIX, CHETCUTI, Natacha & PERRIN, Céline (2002). Au delà des apparences. [...]
[...] La dimension latente du nous contenue dans chaque personne interrogée[3] permet de décliner une identité au travers de formes d'appartenance. Les individus se replieraient donc sur des groupes d'affinité et de proximité, et ces derniers se trouvent largement accessibles et éclectiques au sein des nouveaux moyens de communication comme Internet. La volonté de créer ces nouveaux liens correspond au besoin de reconnaissance, qui s'inscrit ici dans un processus d'identification et va donc passer par un certain nombre de références qui vont permettre aux acteurs de se construire et de s'intégrer dans un groupe. [...]
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