Les violences urbaines ne se définissent pas en fonction d'une qualification juridique mais par rapport à un ensemble de comportements et d'actes, plus ou moins violents, ayant certaines caractéristiques et perpétrées en milieu urbain. Selon la définition de la commissaire Lucienne Bui Trong, chef de la section villes et banlieues à la direction centrale des renseignements généraux, les violences urbaines sont des « actes juvéniles collectifs commis de manière ouverte et provocatrice et créant dans la population un fort sentiment d'insécurité ».
[...] Dans un rapport remis au ministre de l'intérieur en mai 1998, Sophie Body-Gendrot et Nicole Le Guennec constataient ainsi un changement qualitatif intervenu ces dernières années dans les violences urbaines par la construction d'un patriotisme de cité et l'augmentation des formes d'agression essentiellement tournées vers les institutions. Ce constat semble sans appel. Rappelant la lente progression des violences urbaines depuis le début des années 80 et sa difficile prise en compte politique, ce rapport souligne le changement qualitatif apparu ces dernières années. Ainsi, des quartiers de province, que l'on croyait sans problème, connaissent désormais des incidents répétés. [...]
[...] La paix civile n'est possible qu'au prix du renoncement de chacun à sa violence privée au profit d'une violence d'État, dont le souverain a le monopole. Ce renoncement à la violence renvoie directement au problème de la légitimité de l'autorité. Le déplacement de la violence s'opère d'autant mieux qu'il impose un ordre légitime. Ainsi, dans le cadre de la violence scolaire, celle -ci implique un refus de la légitimité de l'ordre scolaire. Face à l'autorité autrefois naturelle des adultes, les jeunes opposent leurs contre-normes, leur fierté, leurs propres règles et leurs propres hiérarchies, dont notamment celle de la force physique. [...]
[...] La sociologie classique explique la violence comme le produit de la désorganisation sociale et de l'anomie. À l'état de nature l'homme est porté par des forces de destruction, par le caractère infini de ses désirs et par une sorte de méchanceté naturelle. C'est la socialisation, l'intériorisation de normes et de valeurs qui freinent cette sauvagerie naturelle. L'éducation et le contrôle social dressent des remparts internes et externes à la violence qui, d'un point de vue théorique, est conçue comme la conséquence d'un défaut de socialisation. [...]
[...] L'histoire des violences urbaines remonte, dans leurs caractéristiques actuelles, au début des années 80. Les références vont des événements des Minguettes, des Zup de Vénissieux et de Vaulxen- Velin en 1981, aux quartiers nord de Marseille. Aux violences urbaines stricto sensu se sont ajoutées les violences scolaires, qui peu à peu sortent du strict fait divers. En les associant à un autre débat, celui sur l'immigration, les récits de ces violences confèrent à ces 1 faits divers une autre identité. [...]
[...] Cela ne signifie pas pour autant que les élèves refusent par principe l'autorité et la discipline. Ils souffrent du déclin de la discipline et dénoncent les enseignants trop faibles. Mais la justice de l'ordre scolaire est contestée dès la fin de l'école élémentaire, quand cesse de s'imposer l'autorité naturelle des adultes. La construction d'un ordre juste repose en effet sur un système de droits et de devoirs réciproques, alors que le système scolaire n'est pas parfaitement équilibré, puisqu'il met en présence des acteurs inégaux par nature, des maîtres et des élèves. [...]
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