Sommes-nous simplement des Homo Faber ?

Résumé du document

Assis devant vous, pourrais-je oser vous affirmer de manière brute que nous ne sommes vous et moi que des créateurs, des fabricants, des Homo Faber. Pourquoi pas ? Ne passons-nous pas notre temps à vivre et de fait à modifier de par notre présence l'environnement, la nature comme si chaque inspiration était non naturel. Ce que nous portons, ce textile travaillé par des techniciens de l'imagination n'est-il pas de la technique. Comme le dit Karl Marx, « ce qui distingue de prime abord le plus mauvais architecte de l'abeille la plus experte, c'est qu'il construit la cellule dans sa tête avant de construire dans la ruche ». Autrement dit, le travail remplace l'instinct. Et ce travail consiste surtout dans l'effort par lequel l'humain se donne les moyens de transformer la nature, soit la technique. Pourtant l'existence de Comité éthique qui cherche à réguler le travail technique de certains, nous interroge sur notre nature. Qu'est-ce que l'Homo Faber ? Sommes-nous simplement des Homo Faber ? Dans cette définition restrictive qui se veut intelligente n'y a-t-il pas bien au contraire de la déraison, de la folie ?

Extraits

[...] Ainsi, il monte une usine et emploie des juifs pour quelques marks. Une scène atteint le plus haut point de technicité humaine, l'homme-objet de sa propre technique, plus efficace que la politique, car militaire, sans débat. Ainsi dans le ghetto de Varsovie, la Waffen SS arrive, encercle et tue, assassine, déracine, détruit dans une organisation millimétrée à l'exécution impeccable. L'on voit la souffrance, les cris, la mort atroce et la peur, voilà l'image de l'Homo Faber. Dans ce film en noir et blanc, seule une couleur subsiste le rouge, symbolisant le sang, ce sang qui éclabousse la pureté, l'innocence symbolisée par cette jeune fille dans un caban rouge qui marche sans comprendre comme perdue vers son inexorable mort. [...]

[...] De ce paradoxe naît des moyens ajustant une fin, l'homo faber est technicien. Le problème se pose en ce qui le concerne que les moyens ne lui dictent pas la fin, concrétisons ; aujourd'hui, ne dit-on pas que la science n'a pas de compte à rendre, l'eugénisme et les organismes génétiquement modifiés (changement de notre héritage biologique) peuvent nous apparaitre comme le produit de Savant fou qui s'amuse sur l'homme. Les conséquences dépassent notre entendement, l'éco système, la nature est une société indivisible dont l'homo faber est le membre, d'où la peur de la technique sur le plan naturel. [...]

[...] D'autre part, la technique en plus d'être présente dans les produits courants est aussi présente dans la gestion de la cité, la polis. Tout citoyen y est soumis, n'est-ce pas le propos d'une forme de réalisme pragmatique, d'une instrumentalisation de la politique. C'est la réduction de l¹art politique à sa dimension technique : le primat de l¹efficacité et la justification des moyens par la fin chez Nicolas Machiavel dans Le Prince. Dans ce livre, il fait tomber les masques d'un monde d'acteur. [...]

[...] Nous sommes donc avant tout des hommes de techniques, l'ordinateur, le frigo, la voiture, les chaussures, mes lunettes tout ceci est le produit de l'Homo Faber. Nous changeons la nature pour qu'elle nous serve, c'est une connaissance fort utile à la vie comme le dit Descartes. Ainsi, Prométhée n'a pas aidé l'humanité en volant le feu, la technique au Dieu, il la créé. Contrairement aux récits bibliques, le travail n'est plus un fardeau à porter, c'est le propre de l'homme, maître de son monde. [...]

[...] Sommes-nous simplement des Homo Faber ? Dans cette définition restrictive qui se veut intelligente n'y a-t-il pas bien au contraire de la déraison, de la folie ? Dans un premier temps, nous aborderons les raisons qui nous permettent d'affirmer que nous sommes un Homme technicien et ingénieux apte au changement, par la suite nous verrons que l'Humanité ne se résume pas à sa capacité de créer et nous aborderons les risques qu'impliquent une définition si restrictive et les dangers de l'homme technicien. [...]