« Les classes populaires ne parlent pas, elles sont parlées ». C'est en ces termes que Pierre Bourdieu décrivait la construction exogène de l'identité médiatique des classes populaires, mettant en avant une sous-représentativité des classes populaires dans l'espace médiatique français.
Le terme « classe populaire » qui désigne une juxtaposition de catégories socioprofessionnelles (principalement ouvriers et employés), aux caractéristiques communes : bas salaires (moins de 1300 euros nets par mois), travail précaire, faible niveau de formation (80% ne possédant pas le bac), regroupant près de 15 000 000 d'individus. Ceux-ci ne proviennent plus uniquement du monde ouvrier, mais également des secteurs tertiaires, dans le domaine privé comme dans le domaine public.
[...] Un contrat implicite et réglementé, sur ce qu'il convient de montrer des quartiers sur un processus de reconnaissance et d'identification. C'est ainsi que les violences spectaculaires et relativement inhabituelles cachent la violence quotidienne, mais participent aussi à une inhibition des populations vis-à-vis de leur propre condition sociale, éludant les questions de discriminations, de chômage, de précarité du travail voire de l'habitat. La mise en perspective des responsabilités est l'occasion d'une transformation de l'intérêt des journalistes, avec l'apparition d'un comportement analytique, qui fait l'objet d'une acceptation et d'une interprétation souvent simpliste par la population des quartiers. [...]
[...] La défiance devient une déviance. En 2002, on avait d'abord stigmatisé le vote populaire au travers de la personnalité d'Arlette Laguiller (un temps troisième dans les sondages) puis lorsque Jean-Marie Le Pen était parvenu au second tour C'étaient alors institutionnalisées plusieurs tendances dominantes dans la caractérisation du vote ouvrier. De nombreux journalistes, qui cherchaient une responsabilité dans l'arrivée du FN au deuxième tour montraient du doigt le vote Le Pen comme un vote de rejet, accompagnant la désaffection pour le PCF, avec une classe populaire anti-européenne et xénophobe. [...]
[...] On retrouve l'opposition entre un vote réfléchi, légitime de la classe dominante et celui, déconsidéré, irresponsable, des classes populaires. Les individus intériorisent le vote contestataire comme moyen d'affirmation d'un contre pouvoir, d'une contre- culture, de stabilisation dans une situation économique et politique, d'une réalité dont on prétend qu'elle leur échappe. L'identité politique de la classe sociale renvoie au «mythe de la base dont certains éléments, conformes à la vision dominante de la société, pourraient être pris en référence. En conclusion, il convient de souligner la logique de domination que traduit la relation entre journalisme et classes populaires. [...]
[...] Certains allant jusqu'à légitimer les reconstitutions au nom du journalisme de terrain ce n'est pas grave puisque ça s'est déjà passé, on peut le montrer Il y a donc un formatage journalistique de la représentation des classes populaires. On peut dire que les journalistes participent à construire une image des classes populaires à laquelle celles-ci sont réceptives. Cette construction sociale progressive que constitue l'identité découle d'abord des rapports de domination sociaux. C'est pour cela que l'identité sociale des classes populaires ne se construit pas, dans les médias, sur un sentiment de solidarité. [...]
[...] À l'inverse de cette exaltation médiatique, principalement focalisée sur l'évènementiel, le social, en tant que contexte et en tant que lieu de vie, devient le parent pauvre de l'espace médiatique. L'actualité des classes populaires dans leur dimension professionnelle est marquée par les difficultés rencontrées pour la préservation de l'emploi. On parle le plus souvent des emplois peu qualifiés ou ouvriers quand ils sont appelés à disparaître. Lors d'une fermeture d'usine, par exemple. On y voit des individus dont l'identité sociale est détruite par la perte de l'emploi, qui sont fragilisés et tentent de se mobiliser. [...]
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