Dans la fiche de lecture ci-présente, il s'agira de développer une analyse phénoménologique de l'image, de sa représentation et de sa perception ; ces questions sont nées de discussions entre philosophes préoccupés de questions esthétiques, de la visibilité de la peinture, du « tableau véritable » qui échappe autant à celui qui signe qu'à celui qui le regarde », de l'image qui « remplace » le monde et tient lieu d'original.
[...] Eriger le milieu invisible en objectif visible, cet objectif paradoxal de l'impressionnisme exige en retour que l'objectif communément visible disparaisse du visible ; et il ne peut sombrer dans l'invisible qu'autant que cet invisible lui-même devenu visible (objet intentionnel) redevient invisible parce que l'invisible (le milieu, le vécu immédiatement éprouvé) l'a destitué du visible. La peinture suspend le principe de corrélation phénoménologique husserlien : chaque vécu de conscience renvoie intentionnellement à un objet qui par l'intentionnalité, concentre en lui (l'objet) le visible parce qu'il joue l'instance invisible. La peinture ne consigne qu'elle-même, à savoir la conscience du visible, conscience qui éprouve et vit le visible avant toute objectivation (tableau) parce que hors de tout objectif (objet intentionnel). [...]
[...] Donc mieux vaut paraître qu'être, puisqu'être, c'est paraître. Mieux vaut une minuscule manifestation en gros plan, qu'une immense manifestation en plans coupés. La possibilité technique d'être vu par une masse indéfinie de voyeurs donne, aujourd'hui, une puissance despotique à l'adage trivial et sartrien selon lequel : je suis ce que le regard d'autrui veut et voit) que je sois ; ce qui revient à dire qu'être, c'est être perçu. L'image est plus que la chose même : ce que je suis ne demeure pas derrière ce que je parais ; au contraire, ce que je parais investit peu à peu et, à la fin, totalement les couches profondes de la personne. [...]
[...] L'idole télévisuelle ne parait que si les voyeurs l'estiment le sondage, dans sa dérisoire tyrannie, illustre sur le mode du ridicule l'évaluation de toutes les valeurs par le surhomme le spectateur minable). Le voyeur qui évalue son idole satisfait absolument au principe métaphysique : être, c'est percevoir. Dès que l'image a perdu l'accès à un original, elle devient elle-même aussitôt et obligatoirement un original, sur le mode du pseudo, du contre original. Devenir image, passer à l'antenne définit le mode par excellence de la présence et non plus son mode dérivé. [...]
[...] Si une telle image se réfère à un original, le spectateur ne le saura jamais : il n'y a plus de différence entre l'image fictive et l'original. Sur quel critère se règle une telle image ? Puisque l'original lui fait défaut, elle se règle donc sur celui qui la voit. Comme tout objet, elle se règle sur le sujet qui, actif ou passif, la constitue du simple fait de pouvoir l'accueillir et la supporter du regard. Et de fait, l'image télévisuelle a pour mesure le voyeur. Strict contraire du voyant (qui, lui voit l'indisponible et l'invisible), le voyeur se gave du visible le plus disponible. [...]
[...] Donc, l'original disparaît soit en restant invisible, soit en s'imaginant (en devenant pure et simple image). La diffusion et la production des images n'ont pas pour but d'ouvrir un monde, mais de le former par un écran ; l'écran substitue aux choses du monde une idole sans cesse renouvelée des voyeurs, idole démultipliée sans limites spatiales et chronologiques afin d'atteindre l'ampleur cosmique d'un contre monde. La communication des images exerce ainsi une stratégie de la consommation des biens visuels et obéit au marché du besoin des voyeurs ; elle suppose le monadisme autistique des voyeurs, loin de l'ébranler. [...]
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