La religion a perdu dans les pays occidentaux la place privilégiée dont elle bénéficiait. Sa capacité à dicter les comportements individuels et politiques est devenue faible. Son influence morale est déclinante comme en témoigne l'évolution des législations sur le divorce, le mariage ou l'avortement. Elle a perdu semble-t-il le rôle prééminent qui était le sien dans l'organisation et le fonctionnement de la société.
Pourtant, la formule attribuée à André Malraux, « Le 21e siècle sera religieux ou ne sera pas » ne semble guère être démentie par les faits : des attentats commis le 11 septembre 2001 contre les Etats-Unis aux émeutes de 2005 dans les banlieues, l'influence du facteur religieux est abondamment discutée, comme la trame sous-jacente aux évènements d'actualité. Faut-il voir dans ces évènements un retour du fait religieux dans nos sociétés sécularisées ?
La réponse dépend en partie de la définition du mot « religieux » retenue, selon qu'on y associe formellement l'idée de Dieu ou qu'on admette plus largement le rapport que l'homme entretient avec ce qui le transcende (le surnaturel mais aussi pour Raymond Aron, l'idéologie ou pour Emile Durkheim, la société). Pour notre part, nous considérons plus opératoire de rester sur une définition restrictive du religieux afin de conserver à celui-ci le caractère de phénomène social perceptible et susceptible d'une analyse.
[...] Henri Bergson notamment a montré comment le caractère inéluctable de la mort pousse chaque individu à chercher une réponse à la question du sens de la vie dans une démarche de type religieux. Selon lui, la religion est une disposition naturelle de l'homme qui lui permet de continuer à vivre en sachant pourtant qu'il va mourir. Le religieux tient en fait autant à la présence du sacré, manifestation du divin dans la société, qu'à l'attente elle-même des hommes et à leur quête de sens. [...]
[...] Les Etats modernes entament un long processus de séparation et d'autonomie par rapport au religieux. Ce mouvement prend un caractère passionnel en France à partir de la Révolution française. En 1789, soucieux de ne pas faire apparaître la religion comme une source de légitimation de la Monarchie, les révolutionnaires cherchent à renforcer leur emprise sur l'institution catholique et proclament en 1791 une Constitution civile du clergé fortement gallicane : cette constitution prévoit que les prêtres ne sont plus nommés par Rome, mais élus par les électeurs et les évêques sont élus par les prêtres. [...]
[...] Les rapports entre religion, politique et conflits ne sont pas nouveaux. Les guerres de religion du XVIe siècle ont marqué durablement l'histoire de France par l'ampleur des massacres qui ont été perpétrés. Au XXe siècle, la guerre du Liban des années 1970 ou le conflit yougoslave ont vu s'affronter dans des guerres civiles sanglantes des communautés structurées par leur appartenance religieuse. Cette instrumentalisation des religions au service de causes politiques est une manifestation du rôle culturel et social des églises. [...]
[...] Conclusion On a beaucoup parlé depuis quelques années du retour du religieux écrivait Ernest Renan dans L'Avenir de la science paru en 1848. Cette phrase semble encore d'actualité tant il est vrai comme l'affirme le philosophe Marcel Gauchet que le religieux dès qu'il s'enfuit ne cesse de revenir Dans l'expression la fin de la religion sans doute il faut entendre la fin du rôle de structuration de l'espace social des religions, mais non la fin de la religiosité individuelle ni même celle des religions historiques. [...]
[...] Plus encore, on peut dire que les religions modernes, caractérisées par l'idée d'un salut individuel, ont ouvert la voie à l'individualisme. Dans son livre Le désenchantement du monde (expression qu´il a empruntée à Max Weber) Marcel Gauchet insiste sur le rôle à cet égard ambigu du christianisme religion de sortie de la religion Le christianisme introduit en effet dans la culture occidentale deux prémisses essentielles à la modernité : l'idée d'une égale dignité de tous les hommes devant Dieu, et la distinction entre le spirituel et le temporel, qui entérine une séparation des autorités politiques et religieuses. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture