Je me suis intéressée au livre de Patrick Baudry, Le corps extrême, Approches sociologiques de conduites à risques, l'Harmattan, 1991 et plus particulièrement au chapitre intitulé "La disparition du corps". Celui-ci est divisé en quatre parties qui sont la faiblesse du corps, l'exigence de la forme, de la prudence à l'ivresse et le corps éclaté. Son argumentation est basée sur le procédé de caricature. Son ouvrage comporte énormément d'exemples pour étayer ses propos (...)
[...] Il ne faut plus seulement être en bonne santé, mais en forme. Dans la partie suivante, il s'agit de faire disparaître le corps, pour qu'il devienne un engin de puissance. Les conduites à risques montrent un corps qui s'éclate. La dernière partie nous montre divers exemples de publicités qui font l'éloge de la prise de risque et de la jouissance. Les médias mettent en avant le dépassement de soi, ainsi que le dépassement des limites. Il s'agit, via ces dépassements, d'un accomplissement personnel, mêlé à une autosuppression. [...]
[...] Il s'agit pour lui, de s'éclater se défoncer jusqu'à l'épuisement. Ces pratiques poursuivent un idéal de maîtrise de soi, car elles mettent à l'épreuve les nerfs de l'individu, le portant à la limite de la défaillance. L'individu, pour s'assurer de son existence, va au bout de ses forces. Le corps devient adversaire, il faut le soumettre. Il devient le partenaire d'une lutte contre le désir de tout abandonner. C'est lui qui attestera de la réussite de l'exploit. La mort est tenue à distance, elle est métaphoriquement touchée. [...]
[...] Ce progrès laisse transpercer un mépris du corps, on rejette sa vulgarité et sa grossièreté. La manie de propreté apparaît au XVIIIème dans la bourgeoisie. La saleté devient un signe de désordre sanitaire et social. L'hygiénisme n'est plus seulement une logique de protection de soi contre le monde, mais aussi à se protéger de soi-même. En refoulant la nature du corps et ses désordres, c'est la mort que nous refoulons. Aujourd'hui, la promenade est devenue mouvement, et les aliments, calories. La société réduit la vie à un processus chimique. [...]
[...] Le corps devient le lieu d'une reconquête de soi, où l'on explore des sensations inédites. Cette passion du corps est une conséquence de l'individualisation, dans nos sociétés occidentales. II. LA MEDIATISATION DE L'EXTREME A. La dimension du suicidaire La santé ne suffit plus, il faut être en forme. Ce petit plus est un thème que l'on retrouve dans les publicités. Mais cette notion entretient une lutte constante contre le corps. L'embellissement du corps vise sa suppression. En effet, les différentes procédures de mise en forme sont des mises en scène de sa liquidation. [...]
[...] Il en dit plus aux autres que ce que l'on voudrait, il nous trahit par ses défaillances. Nous ne sommes pas surpuissants, bien qu'on le souhaiterait. C'est pourquoi nous voulons maîtriser ce corps, quitte à l'effacer. Bien que nous soyons conscients du processus de cadavérisation qui se joue en nous, la société nous montre constamment des corps lisses et nets. Il faut utiliser la cosmétique pour retarder ce processus. Il faut faire du sport pour montrer un corps dynamique. Le corps doit être beau et fort. Mais cette hantise de la mort n'est pas d'aujourd'hui. [...]
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