Mère, filiation, parenté, ethnologie
Idéalement, la mère serait cette femme qui aurait « accouchée », reconnu et qui élèverait, éduquerait et chérirait un enfant.
Cependant, aujourd'hui l'évolution et les transformations au sein des systèmes de parenté de nos sociétés ne rendent plus compte de ce modèle, si toutefois a-t-il déjà été universel
C'est donc face à la fragmentation des différentes sphères de la figure parentale ou bien même à la disparition de l'une ou deux d'entre elle, que nous pouvons nous demander comment définir la mère.
[...] L'argument de la biologie et les liens du sang semble être incontestables pour rentre compte du statut de mère. Florence Weber écrit dans son ouvrage le sang, le nom, le quotidien : la contrainte maternelle passe par le corps, les institutions ont neuf mois pour la transformer en autocontrainte. L'auteur révèle la force des liens du sang, et de l'ensemble du processus de procréation propre à une femme enfantant, qui imposeraient d'emblée les droits, les devoirs et les soins affectifs de la maternité, bien plus que dans le cas de la paternité, qui se doit, elle, d'être construite plutôt que «confirmée». [...]
[...] Dans d'autres sociétés, l'adoption n'est pas du tout une réponse à un manque d'enfant : dans toute l'Océanie, c'est pratiquement 70 à 80% des enfants qui sont élevés dans d'autres familles que leur famille d'origine. C'est l'échange d'enfant qui constitue la norme et le non-échange qui pose alors question. Il y a l'idée qu'être parent se mérite et que tout ne repose pas sur le fait que cela est naturel. L'enfant adopté y est appelé l'enfant fait par opposition à l'enfant biologique. La mère biologique se contentera de faire naître alors que les parents adoptifs le fabriquent Dans ces sociétés, le lien de sang apparaît comme le plus pauvre des liens. [...]
[...] Le don et l'adoption d'enfant constituent donc une pratique très courante dans de nombreuses sociétés du monde. L'enjeu de la stérilité n'a pas été le seul facteur engendrant de tels recours : l'adoption a aussi permis de jouer partout ou elle a été pratiqué la fonction simple de pallier les avatars de la procréation dans les liens du mariage, qui a pendant longtemps été garant de la filiation génétique. Notamment, au temps de la Rome antique, il n'était pas nécessaire d'être marié pour adopter, les célibataires y étaient autorisés contrairement au droit établi dans de nombreux pays d'Europe au 19ème siècle. [...]
[...] En témoigne le principe de l'adoption plénière, dont la spécificité est de pouvoir effacer toute trace de la précédente filiation de l'enfant, afin de tout simplement la remplacer par une nouvelle, qui deviendra alors la seule à être reconnu. C'est donc avec toutes ces nouvelles données que la mère doit être définie. On pourrait croire que la tache semble compromise face à la complexité des modèles et à la variabilité des facteurs qui sont en jeu. Cependant, n'y aurait-il pas des invariants parmi ces nouvelles réalités rendant compte de la figure maternelle ? Conclusion : qu'est ce qu'une mère ? [...]
[...] C'est la complexité de ces modèles qui rendent difficile aujourd'hui la définition de mère, le concept initial qu'est celui des différentes dimensions de la parenté réunis au sein d'une seule et même personne, étant maintenant depuis longtemps, largement bousculé par l'ampleur de l'évolution au sein des systèmes de parenté. Dans certaines situations, ce n'est plus une, mais deux ou trois personnes qui apparaissent comme préposées à la place de mère si l'on s'attache à réunir ces trois sphères qui rendraient compte de la maternité. Mais une femme peut n'avoir aucun lien de sang avec un enfant qui est pourtant reconnu comme étant le sien socialement. Et tout porte à croire à l'évidence d'une filiation consanguine entre les deux. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture