Le préambule à la Constitution de l'Organisation Mondiale de la Santé de 1946 en définissant la santé comme « un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité » élargit le champ d'action de la médecine. Le rôle social de la médecine ainsi reconnu est d'autant plus fort depuis que la biologie se dote avec le gène d'un concept nouveau et d'un outil révolutionnaire. La découverte en 1953 de la structure de l'ADN par Watson et Crick –suite aux travaux décisifs de Rosalind Franklin– annonce un changement important et peu à peu la biologie passe d'un statut de science descriptive à celui de science davantage explicative. À la suite des premières expériences de manipulation génétique dans les années 1960, un pan entier s'ouvre et trouve progressivement des applications médicales. La génétique s'intéresse aux gènes, ces fragments d'ADN dont la séquence codée par 4 nucléotides détermine la séquence d'une ou plusieurs protéines. Dans "La race : donneurs universels dans une culture vampirique. Tout est dans la famille : les catégories biologiques de filiation dans les Etats-Unis du XXème siècle", Donna Haraway montre que la race a été un objet scientifique cohérent accepté de tous. Si les populations servent progressivement de catégorie d'analyse de substitution à la race, la famille mononucléaire hétérosexuelle reste la référence. Les programmes de séquençage du génome humain mis en place à la fin du XXème siècle ouvrent alors des possibilités nouvelles. En effet, l'homme peut alors être réduit à une carte génétique, à l'ensemble de ses gènes. Le gène apparaît alors comme un vecteur idéologique important dans un ensemble social marqué par la technique et la domination.
C'est d'ailleurs, en utilisant la génétique que la médecine décèle au mieux les cas de différenciation sexuelle atypique puisque c'est l'absence ou la mutation du gène SRY qui est responsable d'une différenciation gonadique et phénotypique femelle. Les ambiguïtés sexuelles sont de mieux en mieux appréhendées du fait de la réalisation de caryotypes. Le progrès de la génétique et des techniques médicales hormonales ou chirurgicales plus globalement a permis une prise en charge accrue des individus présentant un trouble de la différenciation sexuelle. Naturellement ni homme ni femme, disposant à la fois de caractères féminins et de caractères masculins, ces individus transcendent les catégories sexuelles biologiques.
Pourtant la médecine joue un rôle important en contribuant au rétablissement de la normalité alors que, comme toute science, elle n'a pas pour finalité la définition des valeurs humaines. Plus encore que les autres sciences, la médecine doit en effet être mise en relation avec les sciences humaines pour aborder la question du progrès. La bioéthique contribue à définir l'équilibre entre le possible et le légitime en termes de pratiques médicales notamment. Pour reprendre les paroles de Thomas Huxley, « la nature n'est ni morale ni immorale, elle est amorale ». Il revient par conséquent à la société de statuer sur la moralité ou l'immoralité des anormalités biologiques.
Il apparaît alors essentiel de s'interroger sur le rôle joué par la médecine en tant qu'outil de normativité sociale des identités sexuelles biologiques.
Par ses pratiques, la médecine rétablit en effet en partie l'état inexistant perçu comme normal par l'ensemble médical et social, état que les mutations génétiques n'ont pas permis à l'individu d'acquérir naturellement (1). Dans un mouvement contradictoire, la médecine est également à la source de catégories troubles. En effet, elle est amenée à répondre au désir des individus de voir dans la mesure du possible leur sexe biologique coïncider avec leur sexe psychique (2).
[...] Dans un premier temps, il s'agit d'un traitement anti-hormonal, anti-androgénique chez l'homme. Dans un second temps, on passe d'un traitement aux effets réversibles à un traitement hormonal aux effets irréversibles ou partiellement réversibles. Il s'agit d'une oestrogénothérapie, c'est-à-dire d'injecter à l'homme des hormones féminines. Pour la femme qui veut devenir homme, l'injection d'un traitement progestatif puissant qui bloque la stimulation ovarienne précède la prescription de testostérone. Quant aux opérations chirurgicales, les hommes subissent une castration bilatérale qui correspond à la fois à l'ablation des testicules, des corps caverneux et spongieux. [...]
[...] Les programmes de séquençage du génome humain mis en place à la fin du XXème siècle ouvrent alors des possibilités nouvelles. En effet, l'homme peut alors être réduit à une carte génétique, à l'ensemble de ses gènes. Le gène apparaît alors comme un vecteur idéologique important dans un ensemble social marqué par la technique et la domination. C'est d'ailleurs, en utilisant la génétique que la médecine décèle au mieux les cas de différenciation sexuelle atypique puisque c'est l'absence ou la mutation du gène SRY qui est responsable d'une différenciation gonadique et phénotypique femelle. [...]
[...] Cela ne relève pas toujours pareillement de désordre de différenciation sexuelle, qui sont des phénomènes hormono- dépendants. Pour autant, les dégradations environnementales dues à une massification de l'usage des pesticides, herbicides, fongicides et autres agents mutagènes augmentent le nombre d'individus intersexués. La médecine, en limitant ces phénomènes naturels au-delà de la simple prise en compte du risque purement médical, se met au service de nos sociétés occidentales où il n'existe que deux états sexuels possibles exclusifs, à savoir homme ou femme. [...]
[...] La médecine, outil de normativité sociale des identités sexuelles Au moment d'être admise à exercer la médecine, je promets et je jure d'être fidèle aux lois de l'honneur et de la probité. Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux. Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. J'interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité. [...]
[...] Macé, Congélation du tissu germinal chez le garçon, Gynécologie Obstrétrique et Fertilité, Volume 33, issue Septembre 2005, pages 615-619. [...]
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