Pour commencer ce dossier, il est tout d'abord nécessaire de revenir sur la distinction faite entre « graffiti » et « tag ». Le premier est fait de dessins, de grandes fresques sur des murs entiers, tandis que le second désigne des « blazes » (nom de code du tagueur), faits en vitesse sur le maximum de murs ; le « throw up » décrit totalement cela : c'est une méthode facile et rapide qui consiste à poser son blaze au maximum d'endroits pour le faire circuler dans le monde du graffiti, ce qui s'est déroulé en 1998, à l'apogée de cette pratique où tous les toits de Paris, les stores de magasins et tous les camions étaient « throw upé » (M-A. Vecchione, 2004). On constatera pourtant une sorte de hiérarchie entre les deux pratiques, opérée par les acteurs eux-mêmes, comme si le graff était un stade, une forme achevée de la pratique du tag ; en fait, tous les graffeurs sont passés par le stade du tag, mais pour une partie d'entre eux, le besoin de reconnaissance par la forme artistique de l'oeuvre et non seulement du blaze a été plus forte, c'est pourquoi ils ont évolué et qu'au regard de leurs années passées, de la carrière qu'ils ont choisi de mener au sein du graff, ils se permettent de juger ceux qui restent à la seule pratique du tag. Certains iront jusqu'à considérer que « peu de tagueurs ont les qualités artistiques requises pour devenir un graffeur » (Lachmann, 2003).
Nous verrons donc en quoi le graffiti, nous utiliserons ici ce terme pour évoquer autant le tag que le graff, est une pratique sociale, dans quelle mesure il fait référence à la naissance d'une culture alternative et enfin nous aborderons sa conception en tant qu'art « légitime ».
I. Le graffiti, une pratique sociale.
A. Un monde de pairs
La carrière d'un graffeur ou d'un tagueur commence très tôt, alors qu'ils ne sont que lycéens, que ce soit aux Etats-Unis ou à l'arrivée de la pratique en France. Ceci est possible grâce à trois éléments essentiels.
Tout d'abord, ils peuvent rencontrer des « mentors » au sein de leur quartier qui favoriseraient leur entrée au sein du monde du graffiti. Ainsi, selon Becker, « les novices apprennent les techniques et la désirabilité du graffiti de mentors déjà qualifiés » (R.Lachmann, 2003) (...)
[...] D'ailleurs, celle-ci va mener à une criminalisation du tag à travers la théorie du mur tagué selon laquelle ne pas effacer rapidement un graffiti c'est laisser la porte ouverte à la dégradation urbaine, voire au développement de la criminalité (idem) ; on va ainsi mélanger graffiti et criminalité sous prétexte que les tags sont le symbole de l'incivilité qui mènerait automatiquement à une plus grande criminalité. C'est ce qui expliquera la sévérité des autorités face aux auteurs de graffitis, sans pour autant justifier les nombreux passages à tabac dont il est question dans le milieu (Lachmann, 2003). C. Déviance ou culture alternative ? J-S. [...]
[...] Le lieu le plus évident va très vite s'imposer : le métro. Dès 1972, les premiers Writers' corners voient le jour dans les angles des couloirs de métro ; ce sont des forums pour les graffeurs de différents quartiers qui permettent de tisser des liens et de former une communauté de pratiquants sérieux à l'échelle de New- ; ce sont des forums pour les graffeurs de différents quartiers qui permettent de tisser des liens et de former une communauté de pratiquants sérieux à l'échelle de New-York (Castleman cité par Lachmann, 2003). [...]
[...] Ceci est possible grâce à trois éléments essentiels. Tout d'abord, ils peuvent rencontrer des mentors au sein de leur quartier qui favoriseraient leur entrée au sein du monde du graffiti. Ainsi, selon Becker, les novices apprennent les techniques et la désirabilité du graffiti de mentors déjà qualifiés (R.Lachmann, 2003). Le mentor va donc être une sorte de grand frère pour le novice qui pourra ainsi acquérir des conseils, des indications de lieux mais également il pourra découvrir que le graffiti a un public (il était lui-même spectateur avant de devenir un débutant, tout comme l'a été le mentor). [...]
[...] C'est de là que va naître l'idée du graffiti comme symbole d'appartenance à tel ou tel groupe. Pensons ici à l'histoire des gangs nord-américains ; depuis la fin des années 70, les gangs se livrent des guerres sans merci pour obtenir le contrôle d'un quartier. Cette domination se fait par la violence et entraîne de nombreux jeunes dans cette voie-là, qu'ils considèrent comme la seule forme de reconnaissance possible. Or, dès les années 80, les premiers graffeurs reconnus apparaissent et forcent un respect sur lequel à peu près tout le monde dans la cité s'entend. [...]
[...] Une nouvelle forme d'art, le street art, éphémère et moins salissant : Bibliographie Vecchione M-A Writers ans de Graffiti à Paris (1983-2003) Vagneron F., Le tag : un art de la ville (observation) Terrains & travaux, 2003/2 p.87-111. Lachmann R., Le graffiti comme carrière et comme idéologie (traduction de J.S Beuscart, Loïc Lafargue de Grangeneuve, Claire Lemasne et Frédéric Vagneron) Terrains & Travaux, 2003/2 p.55- 86. Beuscart J-S. et Lafargue de Grangeneuve L., Comprendre le graffiti à New-York et à Ivry (Note liminaire aux textes de R.Lachmann et de F.Vagneron) Terrains & Travaux, 2003/2 p.47-54. Banksy, Wall and Piece United Kingdom (Ed. Century) Ella & Pitr, artistes stéphanois. [...]
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