L'environnement social japonais peut être symbolisé par deux cercles concentriques. Le cercle intérieur peut être nommé uchi (le foyer), et le cercle extérieur « soto » (extériorité), pour reprendre la dichotomie utilisée par Eric Seizelet (2008). Le premier est l'univers de la communauté, du groupe, le second l'univers extérieur à la communauté, au groupe.
Au sein de l'« uchi », le cercle intérieur, les relations humaines sont si intimes que l'on peut dire qu'il n'y a pas de réelle opposition entre les gens, et qu'ils peuvent compter les uns sur les autres. Si cela peut paraître naturel pour les gens d'une même famille aux yeux d'un Occidental, cela ne l'est plus pour les gens d'une même compagnie, a fortiori s'il s'agit d'une relation hiérarchique. Pourtant, les relations personnelles entre supérieurs et subordonnés dans une entreprise japonaise sont censées être, plus encore qu'amicales, des relations d'ordre quasi parental (Komiya 1999).
Les relations au sein de l'« uchi » ne sont donc pas régulées par des critères universels, par des droits et devoirs engageant légalement l'individu, éléments que l'Occident tient pourtant pour des prérequis indispensables.
[...] Je n'aimerais pas reprendre une chose si ingrate. Elle est à vous. Entendant cette réponse, le charpentier se met en colère, car il a pris la peine de venir chez le plâtrier rapporter la bourse. Ainsi naît une dispute très curieuse, mais violente, les deux hommes refusant de s'approprier l'argent (il faut noter que les gens d'Edo, l'ancien Tōkyō, se vantaient d'être généreux et de ne pas tenir à l'argent). En désespoir de cause, on décide de porter l'affaire en justice. [...]
[...] Le même esprit se retrouve en matière de responsabilité civile. En cas de dommage causé par une personne à une autre, l'acte dommageable nuit à la vie paisible de cette dernière. C'est cet aspect moral qui intéresse avant tout les deux parties. Le dédommagement matériel est une question secondaire. La victime attend de l'auteur du préjudice l'expression d'excuses sincères ; si elle est émue par la sincérité de l'auteur, elle renonce très souvent à lui demander réparation. Imposer le dédommagement à la personne qui se repent de son acte serait un comportement inhumain. [...]
[...] Le tribunal fonctionne au Japon moins comme organe de jugement que comme agent de conciliation. Le nombre des affaires réglées de la sorte est toujours plus grand que celui des affaires résolues par jugement. Certes, le droit japonais se rapproche chaque jour davantage du droit occidental, même dans sa fonction, mais la mentalité nationale ne se modifiera pas si aisément. Pour longtemps encore, elle ne cessera de donner au droit japonais une figure et un esprit très originaux. Règlement des conflits Au Japon, deux parties opposées sont toutes les deux répréhensibles, parce qu'elles ont nui à la paix sociale ; aussi leur faut-il tout faire pour la restaurer. [...]
[...] Déjà elle paraît, dans la jeunesse actuelle, beaucoup plus faible que chez les anciens, mais ce n'est qu'une apparence, du moins pour le moment. Les jeunes ont certes une conscience très vive de leurs droits, mais ils sont peu sensibles à l'atteinte aux droits d'autrui. Ils ne comprennent pas que la même logique domine toute prétention des droits. Il s'avère donc que, sous une apparence différente, ils restent étroitement liés à la mentalité ancestrale. Bibliographie : - Eric Seizelet, L'abolition de la peine de mort et la notion de substitution : le cas japonais, in Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, (2008-07/09) p.541-562 - Komiya, cultural study of the low crime rate in Japan” in British journal of Criminology - Takeyoshi Kawashima, Dispute Resolution in Contemporary Japan in Arthur von Mehren, The Legal Order in a Changing Society, Cambridge - Noda Yosihuki, Droit in Japon in Yves Kirchner et Jean- Marie Pruvost-Beaurain, Encyclopaedia universalis, 5e édition, Paris Eric Seizelet s'inspire de l'usage quotidien de ces deux mots. [...]
[...] Tout le monde sacrifie quelque chose pour le rétablissement de la paix, même le juge. C'est l'idéal de la vie sociale que de ne donner naissance à aucun conflit. S'il s'en produit un par malheur, les intéressés doivent s'efforcer de parvenir à un accord volontaire. À défaut, la personne choisie par les intéressés pour arbitrer le conflit y compris le tribunal doit essayer de les réconcilier dans la mesure du possible, afin d'aboutir à une solution ronde : le rond symbolise chez les Japonais la perfection, la douceur, l'harmonie. [...]
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