En 1987, Elihu Katz déclare : « Certains d'entre nous étudient les textes de la culture populaire, tandis que les autres se penchent sur leurs effets sur le public. Les premiers ne savent rien du public et les seconds ignorent tout des textes ». L'objectif des études de réception, dont les débuts se situent dans les années 40 et qui culminent dans les années 80, pourrait être ainsi résumé comme le dépassement de cette contradiction.
L'idée majeure est donc de surmonter l'aspect sans doute trop mécanique de la question programme de Laswell, selon laquelle le message médiatique, comme tout procédé de communication, peut être résumé par la question programme : qui dit quoi à qui par quel canal et avec quels effets. Il s'agit dès lors de se demander désormais non pas ce que les médias font aux gens mais ce que les gens font des médias. Alors, partant de l'étude de cette relation, que nous apprennent les travaux sur la réception des médias ?
Ces études ont surtout souligné le rôle actif joué par le récepteur dans le décryptage et l'interprétation du message, au point d'atomiser cette réception en une multiplicité de lectures possibles qui créent autant de profils différents au détriment d'une vision d'ensemble du public.
Puis petit à petit, l'approche sociologique de la réception s'est efforcée de distinguer des règles plus universelles au-delà des constatations particulières, insistant alors sur l'importance des éléments contextuels qui conditionnent cette réception.
[...] En fait, il va ainsi signer la vérification empirique du modèle de Stuart Hall selon lequel le décodage peut emprunter trois voies différentes. Trois leçons peuvent être tirées de son enquête D'abord, le décodage est souvent conditionné par le milieu social. En effet, les différents groupes interprètent de façon totalement variable le même extrait d'un débat opposant le dirigeant d'une entreprise automobile à un dirigeant syndical. Les groupes de cadres composés d'hommes blancs y voient un épisode biaisé en faveur du syndicaliste et l'illustration d'une émission socialiste acquise aux thèses du parti travailliste. [...]
[...] Les Russes, en revanche, présentent un récit idéologique qui consiste à reléguer l'histoire au second plan pour mettre l'accent sur le message manipulateur qu'elle contient et qui sert les intérêts des producteurs ou de la société américaine, accusés d'essayer leur faire croire que les riches ne sont pas plus heureux que les pauvres. Les Américains, enfin, ont une lecture systémique, c'est-à-dire qui envisage la série selon ses coulisses : ils appellent les personnages par le nom des acteurs et expliquent leurs allers et retours dans l'histoire par les péripéties qui régissent la négociation des contrats entre producteurs et acteurs. Il faut également s'intéresser à la typologie des mises en perspectives de la série, c'est-à-dire comment elle produit du sens pour le spectateur. Deux possibilités se présentent ici. [...]
[...] Une dynamique inter-médiatique L'individu ne se contente pas de juger le message médiatique de façon isolée, car il le recadre en fait dans un réseau d'interprétations bien plus large. Jean-Noel Jeanneney explique ainsi que les discours politiques télévisés sont enveloppés dans un cocon d'interprétations qui, elles- mêmes, modifient la façon dont le message est reçu à moyen terme Concrètement, cela signifie que quand le Président de la République fait un discours télévisé, le spectateur fonde sa réaction non seulement sur sa propre interprétation, mais aussi sur celle qui sera donnée le lendemain dans la presse et les autres médias. [...]
[...] Ces différentes approches sociologiques ont donc à la fois permis d'isoler les caractéristiques de réception propres à tel ou tel groupe, mais également l'universalité de certains comportements qui affectent la réception. Il demeure cependant que ce courant d'études assez ancien s'est jusqu'ici penché sur les médias traditionnels sans encore explorer la nouvelle piste d'internet et les nouveaux médias numériques, dont les conditions d'utilisation peuvent peser précisément sur cette notion de contexte de réception Voilà donc une possible piste d'étude intéressante pour la suite des recherches. Bibliographie - Revue : A la recherche du public. Réception, télévision, médias Hermès n°11 Article : Deze. [...]
[...] L'étude réalisée par Katz et Liebs sur la série Dallas en 1990 est particulièrement significative à cet égard : il s'agit d'analyser les réactions de six communautés différentes à la diffusion d'un épisode de Dallas. Des discussions sont ainsi organisées séparément entre des groupes de Californiens, de Japonais, de Russes, d'Aarabes, et d'Israeliens. Les résultats montrent alors que chaque groupe ethnique présente des lectures différentes, et elles ont été classées en différentes typologies. La première typologie est celle des lectures du récit, c'est-à-dire les degrés de recul que le spectateur prend par rapport à l'histoire racontée et l'approche avec laquelle il l'appréhende. [...]
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