Dans la mythologie grecque, Hermès est le dieu des marchands, tout échange économique est ainsi placé sous son autorité par les commerçants, ce dans un contexte où l'économie constitue déjà un lien fondateur entre les hommes. Pourtant, Hermès est aussi le dieu des voleurs et des alchimistes. Il apparaît dès lors que le rapport entre société et économie est ambigu et il semble donc pertinent de le questionner : l'échange économique suffit-il à fonder le lien social ? Si l'échange économique est un des éléments structurant de ce dernier, il convient de se demander si l'ensemble du tissu social peut se résumer à des échanges de nature économique. La société peut-elle et doit-elle ne trouver son fondement que dans le seul registre des échanges économiques ? L'économie constitue tout d'abord un moteur essentiel de la socialisation en ce qu'elle vient d'un besoin de l'homme de subsister et de trouver ce dont il ne peut se passer. Pourtant l'échange économique fragmente la société par un processus d'uniformisation ; enfin, il vise sa propre fin et n'a donc aucun autre ancrage dans le temps que dans le présent, l'immédiateté.
L'échange économique est tout d'abord un moteur de la socialisation car il favorise l'émergence d'un nous qui trouve sa source dans la sphère économique. Seuls les hommes échangent, tel est le constat d'Adam Smith qui montre que les animaux sont adaptés à leur milieu naturel et qu'ils possèdent un instinct spécifique que n'ont pas les êtres humains. Ainsi, pour survivre, les hommes doivent s'allier entre eux et commercer. Par ailleurs, « l'homme a besoin d'un maître » (Kant, Idée d'une histoire universelle d'un point de vue cosmopolitique). C'est donc par nature qu'il est porté à échanger des biens matériels : n'étant pas un absolu, il a besoin d'échanges économiques, affectifs et spirituels pour se réaliser. Enfin la théorie des jeux, mathématisée par la suite, reflète la nécessité pour l'homme de se mettre en rapport avec autrui, la recherche frénétique de ses intérêts personnels conduisant à la pire des situations possibles pour chacun. Il apparaît donc que seuls les êtres humains soient aptes à échanger des biens (...)
[...] L'échange économique suffit-il à fonder le lien social ? Dans la mythologie grecque, Hermès est le dieu des marchands, tout échange économique est ainsi placé sous son autorité par les commerçants, ce dans un contexte où l'économie constitue déjà un lien fondateur entre les hommes. Pourtant, Hermès est aussi le dieu des voleurs et des alchimistes. Il apparaît dès lors que le rapport entre société et économie est ambigu et il semble donc pertinent de le questionner : l'échange économique suffit-il à fonder le lien social ? [...]
[...] Cette dérive, observée par Aristote puis formalisée par Marx, qui fait entrer le commerce sur le terrain de l'essence humaine (vente de litres de sang aux USA), ne remet pas en cause le fait que les vertus ne peuvent s'échanger et donc ne peuvent en aucune façon trouver un fondement dans l'échange économique. L'économie fragmente donc la société si elle sort du cadre initial auquel on l'a assignée. L'uniformisation ne peut ainsi pas s'appliquer à tous les domaines de l'existence humaine. Par ailleurs, l'échange économique ne peut fonder à lui seul un lien social en ce qu'il vise continuellement sa propre fin. [...]
[...] Il apparaît donc que l'échange économique est un des éléments fondateurs du lien social. Pourtant, l'évolution de l'économie et notamment son expansion à travers la mondialisation tendent à montrer le contraire. La 4ème définition du Litré à propos du mot échange renvoie au vocabulaire des papetiers : pour eux, échanger consistait à supprimer le grain du papier afin qu'il soit possible d'écrire dessus. Cette définition éclaire sur un autre sens du mot échange : échanger, c'est uniformiser. Dès lors, une interrogation survient : peut-on uniformiser le lien social ? [...]
[...] Il apparaît donc que seuls les êtres humains soient aptes à échanger des biens. L'échange économique entraîne la création de codes qui eux-même favorisent l'émergence des premières castes, des premiers réseaux humains. En effet, il ne peut se faire qu'au sein d'un groupe ayant des institutions communes et pousse ainsi les hommes à s'organiser socialement. L'économie est enfin un terrain d'épanouissement pacifique pour l'égoïsme de l'homme, la recherche de ses intérêts peut se développer sans porter atteinte à ses voisins. [...]
[...] Or la notion de don est, de manière symétrique, condamnée à rester un idéal : le fait d'offrir quelque chose à autrui sans attendre un retour est inconcevable pour l'homme. Il apparaît donc une complémentarité entre don et échange économique qui tendrait à renforcer ce dernier dans le passé. Il semble que l'échange économique ne suffise à fonder le lien social. En effet, bien qu'il participe à la cohésion entre les hommes, sa qualité d'agent uniformisateur et son instantanéité rendent la thèse impossible. Don et contrat semblent ainsi constituer une réponse à la carence temporelle de la notion d'échange économique. [...]
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