Jean Rouch commente les images tout au long du film. La narration est très importante car elle guide le spectateur dans sa façon de recevoir les images. Nous avons constaté qu'il y avait plusieurs types de narration dans ce film:
- la narration explicative, où il contextualise, explique ce qu'il se passe, qui sont les personnes filmées et ce qu'elles font.
- ce que nous avons appelé la narration à sens unique, dans le sens où il n'y a que Rouch qui parle et surtout que l'on comprend. Les dialogues des Haouka ne sont pas directement accessibles au public.
- la narration-récit, où le ton utilisé est presque celui d'un conteur.
- et ce que nous avons appelé la narration subjective, dans le sens où il ne s'agit plus de descriptions ou d'explications mais directement de l'avis du narrateur.
Mais avant de s'attarder avec plus d'attention sur ces différents types de narrations présents dans le film, il convient de se pencher sur le texte introductif qui apparaît au tout début du film, car lui aussi a une fonction explicative et oriente la façon dont le film sera reçu.
[...] Les explications données par Jean Rouch dans cet extrait nous permettent de comprendre de quelle façon les Haouka se sont réappropriés des éléments du colonialisme britannique: les tissus appelés Union Jack comme le drapeau britannique, la statue du gouverneur avec ses moustaches, son sabre, son fusil et ses chevaux, le casque que le nouveau n'a pas encore le droit de porter qui est en fait le casque porté par les colons, etc. Ce sont des éléments que l'on n'aurait pas pu comprendre en ne regardant que les images. Extrait : Les maîtres fous. [...]
[...] D'ailleurs, la première image dans laquelle les Haouka se trouvent est une image de nuit, où ils sont directement présentés comme étant en transe. C'est une façon de laisser présager ce qui va suivre, de susciter la curiosité du spectateur occidental qui n'est pas familiarisé avec ce genre de phénomènes. De plus, cela contraste énormément avec les images antérieures de jour, animées par des gens qui travaillent ou qui manifestent, s'adonnant à des activités auxquelles le spectateur occidental peut s'identifier. [...]
[...] Mais ce qui est intéressant au niveau de la narration est que cette fois-ci, le commentaire ne décrit pas, n'explique pas et ne retranscrit pas ce que disent les Haouka. Il s'agit directement de ce que pense Rouch, de son avis. Et son avis est de suggérer qu'à travers ce rituel, ils ont trouvé un remède pour affronter une situation d'oppression. Un remède que nous, occidentaux, ne connaissons pas encore. Tout comme il a commencé dans le texte introductif, Rouch termine en mettant à nouveau cette distance entre la civilisation africaine et la civilisation occidentale tout en critiquant implicitement notre civilisation. [...]
[...] Il ne s'adresse pas aux Africains, mais à des spectateurs occidentaux. Dualité entre civilisation occidentale et civilisation africaine La dualité entre civilisation africaine et civilisation occidentale est à nouveau mise en avant dans le dernier texte qui s'affiche et qui dit venus de la brousse aux villes de l'Afrique noire, de jeunes hommes se heurtent à la civilisation mécanique Le texte commence par brousse et se termine par civilisation mécanique. Il s'agit d'introduire le fait que de jeunes immigrants venus du Niger se retrouvent confrontés à la civilisation occidentale imposée au Ghana par le colonialisme britannique, d'où leur difficulté à s'adapter. [...]
[...] D'où le concept d'« anthropologie partagée Le ton du narrateur (ou la narration-récit) Extrait : Les maîtres fous. La discussion à la fin du rituel :18 :08 à 00 :18 :40 Source : Les maîtres fous, Jean Rouch, Ghana minutes Commentaire : Cet extrait se situe à la fin du rituel. C'est un extrait dans lequel Rouch allie les commentaires pour expliquer ce qu'il se passe et la retranscription de ce que disent les Haouka. Il parle en leur nom et essaie même d'y mettre du ton sûrement pour paraître plus authentique et fidèle à ce qu'ils disent. [...]
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