Avec les 39 heures, à la fin des années soixante-dix, la durée hebdomadaire moyenne du temps libre avait dépassé celle du temps de travail pour la population citadine masculine et féminine de plus de 18 ans. Ceci marque symboliquement une date repère d'un processus historique de longue période : la diminution du temps de travail. Dans les années quatre-vingt, le travail passe de la deuxième à la troisième place en termes d'occupation de notre temps éveillé, juste après le temps libre.
Le but de ce dossier vise donc à souligner les problèmes entraînés par ces bouleversements, les nouvelles politiques publiques qui pourraient être envisagées, ainsi que les nouvelles inégalités que les 35 heures peuvent générer, en particulier par l'inégal accès à des temps libres de qualité.
Il nous faudra déceler les capacités qu'a eu et qu'aura cette réforme, quand elle sera intégralement appliquée, à favoriser certains secteurs économiques, à modifier des comportements d'achat, voire à contribuer à des créations d'emplois par « effet aval » de cette nouvelle organisation du temps, en particulier dans le secteur du tourisme, du sport, des médias, de la culture et des loisirs.
La réduction du temps de travail est venue bouleverser une norme temporelle figée depuis 1936 sur un modèle issu de la société industrielle. Cette loi vient organiser et généraliser une évolution des modes de vie. Elle donne des droits et restreint des illégalismes. Elle induit de nouvelles égalités entre ceux qui avaient déjà accédé à des arrangements avec la règle et ceux qui n'en bénéficiaient pas. Dans les deux cas – même si cette fois-ci la nouvelle loi a d'abord été votée pour aider à lutter contre le chômage –, ceux qui en avaient élaboré l'idée avaient, eux, une vision très sociétale de la réforme.
[...] Les repères de l'espace et du temps se dissolvent : sphère privée et sphère professionnelle se brassent, mélangeant temps et lieux au point que le travail déborde du travail pour se répandre sur les lieux publics et même dans les foyers, que les week-ends ne sont plus toujours des temps libres pour tous, que les vacances ne se confondent plus avec les congés. Même la frontière diurne nocturne a du mal à résister. Bruno Marzloff nous dit L'ordre fordien est mort. La vie en tranches napolitaines a vécu. La construction d'un temps social à bâtir dans la diversité et la polychronie est à l'ordre du jour. [...]
[...] En résumé, leurs activités professionnelles et quotidiennes envahissent tous les espaces de temps disponibles et déterminent le reste de leur vie, qu'elle soit familiale, personnelle ou amicale. Ils ont donc l'impression de subir le temps, plutôt que de le choisir. [...]
[...] À l'inverse perdure un noyau dur de non-pratiquants que les anciennes politiques ne semblent plus arriver à restreindre Un constat, quelques chiffres : Un constat : quelques chiffres : 1975 marque le moment où un Français sur deux part en vacances, ces départs sont stabilisés depuis dix ans autour d'un taux de départ légèrement supérieur à 60%. Si l'on accepte 10-15% de non-partants volontaires, cela donne une poche dure de 15 à 20% d'exclus envers lesquelles les anciennes politiques de démocratisation paraissent de peu d‘effets. En 2000, plus de sept Français sur dix sont partis en vacances. La consommation touristique des Français couvre des dépenses de consommation des ménages. En des foyers français possèdent la télévision. Mais il demeure des différences et des exclusions. [...]
[...] La loi Aubry du 19 janvier 2000[3] fixe la durée légale à heures annuelles et introduit pour la première fois une norme horaire sur l'année. Les entreprises de plus de 20 salariés doivent appliquer les 35 heures, et les autres structures sont concernées à partir du 1er janvier Les raisons et aspirations heures de vie en plus en une génération Depuis 1945, nous avons gagné environ 11 ans d'espérance de vie (et 25 depuis 1900). Ces heures sont à rapprocher des heures de travail que la loi des 35 heures impose pour ouvrir les droits à la retraite. [...]
[...] Combien de salariés s'autorisent à sortir pendant les heures officielles de travail pour s'occuper d'eux-mêmes ou de leurs affaires ? Combien d'absents les jours de Coup du monde de football, combien de retards et de cernes les matins de J.O.? Les salariés ne se sentent pas en faute puisque beaucoup disent travailler pendant leurs vacances ou leurs week-ends pour ceux qui ont internet) et 26% des hommes déclarent travailler pendant leurs vacances. Cela étant, pourquoi ne prendraient-ils pas de vacances ou des pauses pendant les heures de travail. [...]
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