L'étude des journalistes est un domaine encore peu développé en France, contrairement à la longue tradition de recherche des les pays anglo-saxons. En effet, lorsque l'on recherche « Journalistes » dans les fichiers de bibliothèques, on trouve plus souvent des autobiographies de reporters et de vedettes de la télévision que des ouvrages sociologiques.
Pourtant, le XXème Siècle a fait du journaliste une véritable légende, ne serait-ce qu'à travers les figures mythiques réelles ou fictives de Stanley, Albert Londres, Roulletabille, Tintin…
Cette banalisation d'une connaissance sur les journalistes suscite des obstacles épistémologiques. Tout d'abord, les premiers producteurs d'analyses sur le journalisme sont souvent les journalistes eux-mêmes, ce qui peut susciter des doutes quant à l'objectivité des travaux. De plus, lorsqu'on parle de journaliste, on associe le plus souvent ce terme aux figures des grands du métier, tels que les présentateurs du JT, les éditorialistes de renom… Cet échantillon n'est pas représentatif, puisqu'il n'englobe que 5% des journalistes en exercice. Enfin, les relations entre journalistes et universitaires sont ambiguës, puisque depuis trente ans, les journalistes se sont imposés par rapport aux intellectuels. Cela se traduit par un anti-intellectualisme larvé chez les journalistes, et une tentation dénonciatrice chez les chercheurs.
Les journalistes existent-ils en tant que groupe social homogène, possédant des caractéristiques propres ? Tout d'abord, le milieu des journalistes est difficile à définir en tant que milieu homogène. Pourtant, il existe certaines caractéristiques communes aux journalistes occidentaux. Enfin, même au sein d'un seul pays, la France, il existe de fortes disparités entre les différents journalistes.
[...] Le statut divise le groupe entre journalistes pigistes ( 18.4 en situation précaire, et journalistes salariés mensualisés ( 81.6 C'est le montant du revenu mensuel brut qui les différencie (1100 euros d'écart entre le revenu médian net des pigistes et celui des salariés). La situation professionnelle dépend aussi du média d'exercice : c'est la presse écrite qui fait travailler l'essentiel des journalistes ( 72.8 devant l'audiovisuel et les agences ( 6.1 Les écarts de rémunération selon les médias renforcent l'hétérogénéité des situations professionnelles des journalistes : la presse nationale, les télévisions nationales, les grandes agences mondiales et la presse magazine offrent à 30% de leurs salariés des salaires supérieurs à 4000 euros. Enfin, la formation permet de classer les journalistes. [...]
[...] MacLeod et Searl Hawley ont tenté de déterminer le degré de professionnalisme de gens de presse en mesurant une série d'attributions telles que la formation, le caractère technique du savoir, le rôle social, la responsabilité, la structuration du groupe, dans le but de préciser quelle fonction chaque activité remplissait dans le corps social. Il existerait quatre critères pour définir une profession. Tout d'abord, cela suppose des conditions formelles d'accès à l'activité telles que le diplôme, la certification. Ensuite, la profession doit détenir le monopole sur l'activité qu'elle régit. Puis, elle doit disposer d'une éthique qu'elle peut faire respecter par les moyens contraignants que lui accorde l'Etat. [...]
[...] Le groupe des journalistes français a donc su se construire une identité duale qui mêle la respectabilité sociale et politique (grâce à son statut et sa réputation de compétence) à son adaptabilité (grâce à l'indéfinition de son domaine). Cependant, le fait que le monde des journalistes ait des limites floues est peut-être en train de se retourner contre lui. Il est concurrencé par l'expansion de nouveaux métiers, tels que les chargés de communication, les rédacteurs de journaux d'entreprise et de collectivité locale, qui occupent son terrain et mettent en cause son indépendance. [...]
[...] Il existerait donc certaines caractéristiques communes aux journalistes français et aux journalistes anglo-saxons. Selon les résultats de l'enquête, lorsqu'on demande aux différents journalistes de définir leur profession, reviennent systématiquement les valeurs de diffusion donner rapidement des informations privilégier les valeurs intéressant la majorité du public d'interprétation analyser et interpréter les questions difficiles enquêter sur les informations données par les pouvoirs publics évoquer la politique du pays quand elle est en cours d'élaboration et d'antagonisme se poser en adversaire des pouvoirs en étant sceptique sur les actions Cependant, les journalistes français étaient moins disposés que les journalistes américains à soutenir les valeurs d'interprétation. [...]
[...] La situation des journalistes a peu évolué depuis 10 ans, malgré l'augmentation continue du nombre des journalistes, leur féminisation et leur vieillissement. La répartition des journalistes par qualification, médias et revenu n'a pas beaucoup changé entre 1990 et 1999, à l'exception de l'augmentation de la part relative de la télévision. Toutes ces données permettent de constater qu'il n'existe pas un modèle de journaliste à la française. Aujourd'hui, en France, il n'existe pas à proprement parler un groupe social des journalistes, mais plutôt une nébuleuse composée d'individus aux statuts divers, et qui, dans le quotidien, n'exercent pas vraiment le même métier. [...]
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