L'anthropologie française a été fondée par un groupe de chercheurs réunis autour d'Emile Durkheim (1858-1917) et désigné comme « Ecole française de sociologie ». Il s'agit en effet d'une véritable école de pensée, qui développe des programmes collectifs de travail et se dote, dès 1896, d'un instrument précieux, une revue, L'Année sociologique. Celle-ci, d'abord destinée à réunir des comptes-rendus des dernières publications de sciences sociales à l'échelle mondiale, accueillera aussi des articles importants des différents membres du groupe (...)
[...] Ainsi, en dépit de la possible attente intéressée d'une contre-partie, le don continue d'exprimer la générosité de celui qui l'accomplit. C'est en ce sens qu'il agit positivement sur le statut du donateur. On comprend donc que des formules de don comme le potlach et la kula, tout en mettant en circulation des richesses, soient loin d'avoir une signification essentiellement économique. Ce qui est en cause, c'est la structure sociale elle-même : comme on l'a écrit, le lien compte plus que le bien, et ce lien, dans les deux exemples cités, est inséparable de l'affirmation d'une hiérarchie. [...]
[...] L'« Essai sur le don est sans doute l'ouvrage le plus célèbre de Marcel Mauss. La question du don est assez liée à son nom pour qu'un groupe de chercheurs français intéressé par l'exploration d'alternatives à la forme libérale du marché se soit intitulé le MAUSS (Mouvement Anti-Utilitariste en Sciences Sociales). Les travaux émanant de ce groupe traduisent bien l'ambiguïté du texte fondateur : tout en décrivant le mode de fonctionnement de sociétés très différentes de la nôtre, il semble avoir voulu fonder anthropologiquement un idéal toujours actuel en matière d'échanges, différent du modèle de l'échange marchand. [...]
[...] Second aspect important de l'œuvre de Durkheim, l'abandon partiel de l'évolutionnisme. Cela apparaît en particulier dans Les formes élémentaires de la vie religieuse. Ce livre montre, certes, que Durkheim continue de partager les présupposés des évolutionnistes puisqu'il pense comme eux qu'il y a des religions et des sociétés primitives et d'autres qui ne le sont plus. Mais, en même temps, comme le soulignent J.-C. Galey et G. Lenclud dans l'article cité, Durkheim opère une rupture radicale d'avec toute une tradition d'investigation du fait religieux [l'évolutionnisme] hantée par la question des origines Le projet de cet ouvrage, en effet, n'est pas de définir l'origine de la religion et son évolution (à la différence de ce qu'avaient fait, dans ce même domaine, Frazer ou Tylor) mais de définir l'essence du phénomène religieux en s'appuyant sur l'analyse de la forme religieuse la plus primitive c'est-à-dire la plus simple, le totémisme australien. [...]
[...] C'est ce qu'il fait dans Les règles de la méthode sociologique (1895). Cela passe en particulier par l'affirmation de l'objectivité des faits sociaux et de leur autonomie à l'égard des consciences individuelles. La société est formée d'individus, mais les faits sociaux sont extérieurs à eux et s'imposent à eux. Ce n'est donc pas en partant de la psychologie individuelle que l'on peut les comprendre : La cause déterminante d'un fait social doit être cherchée parmi les faits sociaux antécédents et non parmi les états de la conscience individuelle écrit-il dans Les règles (1973, p. [...]
[...] A la différence des fondateurs de l'anthropologie anglaise et américaine (Morgan, Tylor, Boas), Durkheim n'a certes pas eu - pas plus que Mauss d'ailleurs - de pratique du terrain : les données qu'il utilise sur les sociétés autres sont des données de seconde main. Il reste que son projet définir les principes théoriques et la méthode d'une science du social incarne une ambition proprement anthropologique comme l'écrivent J.-C. Galey et G. Lenclud dans l'excellent article qu'ils lui ont consacré (in P. Bonte et M. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture