Une contestation de la figure de l'expert et de l'expertise

Thèmes abordés

Processus de décision, connaissances scientifiques-techniques, intervention abusive, crise de crédibilité scientifique

Résumé du document

Nous pouvons partir d'un constat général relevant presque d'une image d'Epinal : l'expert aurait un rôle particulièrement important dans le processus de décision. Cela se traduit notamment par un intérêt très vif depuis les années 90 pour le phénomène de l'expertise. Mais cette littérature tend aussi de plus en plus à relativiser les idées préconçues que l'on aurait sur l'expert, sur le fait qu'il aurait des interactions uniquement avec le politique, et que son action serait parce que nécessaire, incontestable. Nous avons donc essayer d'aller au delà des considérations générales sur le rôle de l'expert pour prendre en compte les relations sous-jacentes qui existent et les déviances possibles de l'expertise.

Extraits

[...] Par exemple concernant l'environnement, des études montrent que seul un petit nombre de bureaux d'études privés travaillent pour la commission. L'échec de l'expertise discrédite bien évidemment l'expert, mais il affecte aussi le décideur qui se trouve placé dans la situation d'avoir à prendre parti, sans éclairage technique, dans un domaine qui devait être balisé par la science, donc ce qui entache l'expert et son rôle et rend d'autant plus difficile le processus de décision. [...]

[...] On a des exemples, comme la crise du médiator, ou les figures d'experts sont aussi remises en cause. On voit que l'expertise est déterminée par la finitude de ces propres savoirs et qu'on met de plus en plus en avant le principe de précaution. Il faut aussi relativiser le concept d'expertise indépendante, formelle. L'expert invoque cette autorité pour légitimer son rôle et ses recommandations ; mais l'expérience montre que les conditions mêmes de l'expertise rendent souvent beaucoup plus compliquée cette recherche d'objectivité. [...]

[...] Une contestation de la figure de l'expert et de l'expertise I. Décideurs, experts : une relation polymorphique et critiquable Nous pouvons partir d'un constat général relevant presque d'une image d'Épinal : l'expert aurait un rôle particulièrement important dans le processus de décision. Cela se traduit notamment par un intérêt très vif depuis les années 90 au phénomène de l'expertise. Mais cette littérature tend aussi de plus en plus à relativiser les idées préconçues que l'on aurait sur l'expert, sur le fait qu'il aurait des interactions uniquement avec le politique, et que son action serait, parce que nécessaire, incontestable. [...]

[...] De plus on peut critiquer les pratiques de la décision : les conditions dans lesquelles l'expertise est convoquée, souvent dans l'urgence, avec des contraintes extérieures, une certaine contingence ne permet pas une confrontation scientifique organisée, raisonnée et transparente. Au niveau européen on retrouverait aussi cette perte de confiance en l'expertise. L'intervention successive d'experts ayant des avis différents ne produit pas forcément des avis qui ont un sens, car il n'y a pas de lieu où ces positions opposées peuvent se confronter. Il y a plutôt la formation d'un réseau d'expertise très fermé avec des règles de fonctionnement opaque. [...]

[...] Cela pose donc la question de la légitimité démocratique, d'autant plus que selon Cécile Robert, ce débat s'inscrit dans un moment où l'on est de plus en plus en recherche de démocratie participative. Selon Habermas Le vrai problème est plutôt de savoir si, une fois atteint un certain niveau de connaissances, on se contente de la mettre à disposition des hommes occupés à des manipulations techniques, ou si l'on veut que ce soit des citoyens qui en reprennent possession dans leur langage propre Autre critique : Didier Tabuteau (conseiller d'État et actuel responsable de la chaire santé à l'IEP de Paris) affirme que l'on assisterait à des situations ou le politique peut être tenté de se dessaisir de sa compétence, et ainsi ou l'expert sort de son rôle pour assumer les processus de décisions publiques. [...]