C'est chez Hegel que le terme même de phénoménologie apparaît de façon centrale, dans un de ses ouvrages majeurs, précisément intitulé Phénoménologie de l'esprit. Toutefois, lorsqu'on l'évoque de nos jours, il renvoie avant tout à un nom : celui d'Edmund Husserl. Ce qui suit sera donc une très rapide et très lacunaire introduction à quelques points de la phénoménologie husserlienne, et plus particulièrement à la méthode d'analyse phénoménologique proposée par Husserl au début du XXe siècle. Les quelques notes qui suivent ne rendent évidemment en aucune façon compte de toute la richesse et de la complexité de ce mouvement philosophique majeur, qui a influencé de façon durable la psychologie, les sciences humaines, la logique, et même le droit (et certainement d'autres disciplines encore, que j'oublie ici).
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Né en 1859, Edmund Husserl est avant tout un mathématicien et bien qu'il soit à l'origine de l'un des plus importants courants de la philosophie du XX siècle, il n'étudiera jamais de façon sérieuse les grands auteurs qui ont marqué la discipline, à l'exception de Descartes et des empiristes anglais, ce qui se marquera dans son oeuvre par des notions parfois approximatives de l'histoire de la philosophie. D'origine juive, converti au protestantisme, il commence sa carrière comme privatdozent avant de faire l'essentiel de sa carrière à Goettingen (1906-1916) et à Fribourg (1916-1928). Il meurt en 1938.
Il est l'auteur d'une oeuvre monumentale, dont une infime fraction seulement a été livrée au public de son vivant (5 livres et une poignée d'articles divers). Cependant, lorsqu'à sa mort en 1938, un jeune chercheur de l'Université de Louvain voudra sauver ses écrits des nazis, il trouvera plus de 40.000 feuilles sténographiées. La publication de ses oeuvres complètes a été entamée à Louvain dès 1950 et n'est pas encore achevée à l'heure actuelle (...)
[...] La méthode d'analyse phénoménologique À la base, ce qui préoccupe le jeune Husserl, ce sont des questions de logique et de mathématique. Un de ses premiers ouvrages (qui correspond à sa thèse d'habilitation présentée en 1887) est consacré à l'origine du concept de nombre, dans une perspective résolument psychologiste. En effet, à l'époque, le psychologisme est une des écoles dominantes dans le contexte universitaire allemand. Il s'agit d'un courant qui, dans le sillage de Franz Brentano, cherche à faire de la psychologie et de l'étude empirique des phénomènes mentaux le fondement absolu de la logique, et au delà de cette seule discipline, des sciences de la nature en général. [...]
[...] Répondre à cette question, tel est le but de la phénoménologie. Dans la mesure où elle doit servir de fondement à une théorie de la connaissance, la phénoménologie doit à tout prix éviter de tomber dans un travers naïf en prenant les choses de façon naturelle comme allant de soi. Dans une analyse phénoménologique, rien ne peut être considéré dès le début comme échappant à toute mise en question, et l'analyse doit donc à tout instant satisfaire à un principe d'absence de présupposition. [...]
[...] Par exemple, lorsque nous appréhendons une chaise à travers une analyse phénoménologique, ce que nous appréhendons n'est pas tant cette chaise particulière que ce qui fait l'essence même de toutes les chaises. Nous cernons l'idée de chaise, presque au sens platonicien du terme. En effet, notre rapport à l'objet, nous l'avons vu, n'est plus le simple et naïf rapport direct mais un rapport épochal, qui met l'objet matériel et concret à distance de nos préjugés et qui en même temps revient réflexivement sur lui-même en tant que processus. [...]
[...] Tel est le présupposé de ce paradigme auquel Husserl commence par adhérer. S'il est, à l'aube de son parcours intellectuel, influencé pendant un temps par ce courant, Husserl va vite se rendre compte qu'une telle démarche ne peut déboucher que sur un relativisme et un scepticisme radical. Si les sciences ne se fondent que sur des phénomènes psychiques, que peuvent-elles nous dire du monde lui-même ? Comment pouvons-nous donc, dès-lors, avoir une connaissance vraie et rigoureuse ? C'est dans ce sens que Husserl parlera bien plus tard de crise des sciences européennes. [...]
[...] - Sartre et tout le mouvement existentialiste ont également été très marqués par l'influence décisive de Husserl. - Emmanuel Lévinas, qui a contribué à l'introduction en France de la phénoménologie husserlienne et heideggerienne, et en a fait une relecture éthique. [...]
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