Analyse sociocritique de cinq textes de Mounsi, chanteur de rap devenu romancier. Définition de la mentalité actuelle de ce qu'on appelle la "troisième génération" issue de l'immigration maghrébine en France.
[...] Dans ce roman, le narrateur tend à rationaliser sa dérive par la fatalité de sa naissance de fils d'immigré. À cette malédiction sociale, Mounsi ajoute, dans La Cendre des villes, l'espace urbain non périphérique, cette fois, qui programme la déchéance des personnages, tous des pauvres dont certains franco-français. Ils ne vivent pas dans la banlieue, mais dans les bas-fonds : Place Clichy, la Butte Montmartre, le métro Blanche. Paris central où la faim rôde pour les pauvres : La faim, la vie, la jeunesse rongeaient leur ventre et ils rôdaient, n'importe où. [...]
[...] La Cendre des villes rend compte de cette originalité. La fatalité qui s'abat sur les personnages semble les condamner, ce qui n'empêche pas en eux la naissance d'une sensation merveilleuse : Il y avait pour chacun d'eux, dans chacun de ces jours sans âges frappés d'une condamnation si évidente, irrévocable, quelque chose à la saveur libre et sauvage. Cette perception de leur intimité révèle chez les protagonistes l'existence simultanée du châtiment et de la liberté qui montre le double aspect de la déploration et de la fascination que l'on trouve tout au long du roman. [...]
[...] A son image, l'écriture de soi serait la tentative de reconstitution de la totalité de l'être par le dépassement des antagonismes identitaires créés par l'exil. Car l'expérience de l'exil provoque chez les personnages une sorte de sentiment quasi schizophrénique. Le thème de la schizophrénie La schizophrénie est une psychose caractérisée par la perte du contact avec la réalité. Être schizophrène, c'est se prendre pour quelqu'un d'autre ou être étranger à soi-même. Cette inadaptation au réel et à la société, liée à une dissociation psychique, se retrouve quelque peu chez les personnages de Mounsi. Les raisons de leur schizophrénie varient selon les romans. [...]
[...] L'originalité de Mounsi tient au fait qu'il invente une écriture mimétique de la déstructuration identitaire causée par l'exil. L'éclatement du récit dans Le Voyage des âmes traduit la dispersion de l'identité entre le "moi" de l'enfance Kabyle et "l'autre" du périphérique parisien. Mais l'écriture parvient à transfigurer cet éclatement car elle est traduction d'une pensée de la force de l'esprit qui triomphe de la destruction mentale et physique. Ce salut par l'écriture met en évidence le dépassement des antagonismes culturels. [...]
[...] Leur destinée sdemble tragique car sans échappée possible. Ni la drogue ni la prostitution ne parviendront à les exorciser de la malédiction des origines. Puisque l'échappée physique hors du présent est utopique, reste le refuge dans la nostalgie. Un refuge contre le destin : la nostalgie Nostalgérie est le titre du poème situé en conclusion de Territoire d'outre-ville : NOSTALGERIE On est de son enfance Comme on est d'un pays Souviens-toi si je t'oublie Nostalgie, Nostalgérie La ville blanche à midi M'aveugle d'éclaircies Souviens-toi si je t'oublie Nostalgie, Nostalgérie Ce poème semble un écho du psaume 137, le Chant de l'exilé : Souviens-toi si je t'oublie, Jérusalem L'exil se présente comme l'expérience ancestrale des enfants de l'immigration algérienne. [...]
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