Les Naufragés – avec les clochards de Paris - Patrick Declerck

Thèmes abordés

Les Naufragés – avec les clochards de Paris, Patrick Declerck, ethnographie, centre d’Accueil et de Soins Hospitaliers, CASH

Résumé du document

Né à Bruxelles en 1953, Patrick Declerck est docteur en anthropologie de l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales. Philosophe de formation, il est également psychanalyste. Il se lance dans l'ethnographie dans les années 1980 et c'est donc à cette période qu'il entame son travail – au départ de simple observation – auprès des clochards de Paris. C'est à l'issue de ces observations, de son investissement en tant que psychanalyste au sein des « missions France » de médecins du Monde, dont il est l'un des fondateurs, ainsi qu'ensuite de son expérience de consultant au Centre d'Accueil et de Soins Hospitaliers (CASH) de Nanterre, que Patrick Declerck a publié son livre Les Naufragés – avec les clochards de Paris. Ce livre est un concentré de témoignages, de récits de vie ainsi que d'analyses tantôt très techniques, tantôt beaucoup plus instinctives, sensibles. Le livre se structure en deux grandes parties, l'une offrant un panorama des différentes expériences de l'auteur au cours de presque vingt années de recherche, l'autre consistant en une objectivation de l'objet étudié, des résultats obtenus afin d'en tirer des conclusions de permettre à l'auteur d'exprimer son point de vue et ses propositions sur la question.

Extraits

[...] Il est ici question du rapport de la société avec la population étudiée. Patrick Declerck dénonce justement le terme utilisé d'exclusion auquel il va préférer la désocialisation Après avoir énoncé huit travers du concept d' exclusion dont le fait que c'est un terme très englobant, qui regroupe ensemble des individus ayant peu à voir les uns avec les autres mais également qui assigne une cause univoque à l'ensemble [des] situations (p. 291). Or l'on a bien vu que les situations des clochards et les causes de leur clochardisation pouvaient être très différenciées. [...]

[...] c'est parce qu'il a trouvé cette déviation pour pas trop penser Sur le coup c'est un soulagement, un moyen de trouver du plaisir. Lorsqu'il opère à son observation participante, il a besoin de se déguiser, de se mettre en condition pour ressembler au maximum aux clochards. Il doit également en imiter les pratiques. Ma pensée cherche frénétiquement une échappatoire, et je me récite mentalement tous les poèmes que je connais. (p. 50) Il a besoin, par moments, de repenser à ce qu'il est vraiment pour ne pas se laisser emporter par la situation. [...]

[...] C'est en quelque sorte une manière d'intérioriser le caractère chronique et irréversible du mode de fonctionnement de ces sujets. L'objectif passe ainsi de la réinsertion, dont il explique bien qu'elle est quasiment inatteignable ou du moins pas durablement à la volonté plus élémentaire d'éviter le pire. Enfin, l'auteur dénonce également. Le paradoxe général de l'aide sociale : l'aide doit servir en premier à ceux qui en ont le plus besoin, c'est à dire les plus malades physiquement, socialement et psychiquement. Mais les personnes à la rue sont les plus difficiles à approcher et à aider . [...]

[...] Mais le fait de se placer en situation de la sorte va surtout lui permettre de ressentir des choses, de repérer des éléments qui ne sont pas toujours évoqués par les clochards eux-mêmes qui ont plutôt tendance à se concentrer sur leurs propres comportements, leur vie et peut-être moins l'environnement dans lequel ils se trouvent. Il va par exemple pouvoir se rendre compte du décalage entre les consignes officielles qui prônent un véritable contrôle policier de cette population et la légèreté avec laquelle les identifications sont réalisées (p. 48). Identification d'un décalage qui prend tout son sens avec l'exemple de Lev Bronstein Patrick Declerck choisi de donner le nom de Trotski lorsqu'il doit décliner son identité, et personne ne se rend compte de rien. [...]

[...] Puis, de 1988 à 1997, il devient consultant au Centre d'accueil et de soins hospitaliers de Nanterre, le CASH. Il a ainsi consacré quinze années de sa vie à ces clochards qu'il a suivis, interrogés, tenté, pour certains de soigner etc. La première partie de cet ouvrage donne un aperçu des différentes pratiques sociologiques, ethnographiques mises en œuvre par l'auteur pour mener à bien son étude. Parmi celles-ci, on note l'importance des entretiens directs avec les clochards ainsi que des consultations auxquelles il a pu assister au CASH de Nanterre. [...]