Féminin-Masculin - Michèle Ferrand

Résumé du document

A partir du XVIIIe siècle, le travail devient une marchandise comme les autres… et s'achète sur un marché : celui du travail. Toutes les activités qui ne sont pas des « marchandises » ne sont plus alors perçues comme du travail. C'est notamment le cas de celui effectué dans le cadre domestique. Lors de la Révolution française, l'ordre de la société se sépare de celui de la famille, le premier relavant du « public », le second du « privé ».
L'affectation des femmes à la sphère privée (c'est-à-dire la famille) et des hommes à la sphère publique (c'est-à-dire au monde extérieur) correspond à la division sexuelle des activités. Ce partage des tâches entre les sexes peut prendre des formes variables, mais dans toutes les sociétés, les tâches plus ou moins nettement associées à la procréation sont systématiquement attribuées aux femmes.

Extraits

[...] Les inégalités et les écarts avec les hommes se maintiennent. L'opposition entre secteur secondaire masculin et secteur tertiaire féminin reste toujours d'actualité et, d'une façon globale, les femmes occupent des emplois moins qualifiés que les hommes. L'explication idéologique de cette ségrégation est toujours niée, car l'on préfère y voir la marque des différences d'orientation scolaire entre garçons et filles plutôt que la conséquence de la construction des qualifications. Une définition sexuée des qualifications La définition de la qualification, parce qu'elle sert de base au calcul des salaires, est un enjeu constant entre le patronat et les organisations ouvrières. [...]

[...] En revanche, le salaire d'une femme, mariée ou non, était supposé couvrir uniquement ses propres besoins. Le travail des femmes soumis au besoin du marché Lorsque le contexte l'exige, les entreprises n'hésitent pourtant guère à se tourner vers la main-d'œuvre féminine. Ainsi, la guerre a toujours vu les femmes assurer le travail que les hommes au front ne pouvaient accomplir. Mais alors qu'on affirme volontiers que ces périodes furent l'occasion d'avancées égalitairement, de travaux récents montrent le contraire. Les femmes sont cantonnées aux fonctions de remplaçantes et d'auxiliaires. [...]

[...] Toutefois, cet écart est moins marqué dans le concubinage et semble se réduire dans les générations les plus récentes. Cette préférence pour les hommes plus âgés, mise en avant par les jeunes femmes, s'atténue après la trentaine. A l'inverse les hommes acceptent d'autant mieux de vivre avec une femme légèrement plus âgée qu'eux qu'ils sont jeunes. Mais ils changent d'avis ensuite. Dans les faits, le marché matrimonial est donc très ouvert pour les femmes jusqu'à la trentaine et le devient pour les hommes ensuite. [...]

[...] La dualité masculine/féminine doit être consacrée politiquement, culturellement et symboliquement. Ce qui qualifie les femmes comme représentante, c'est leur expérience de femmes en tant qu'êtres humains sexués La société n'est pas seulement un regroupement d'individus, mis une cohabitation de deux sexes ou de deux genres. Mais comment expliciter cette spécificité politique des femmes sans tomber dans une nouvelle construction arbitraire et normative d'une identité féminine unique ? Différentialistes et universalistes de méfient pareillement de la nature féminine dont s'est nourrie la domination masculine. [...]

[...] Quel que soit l'âge, les filles sont plus scolarisées que les garçons, du moins jusqu'au troisième cycle, et sur ce dernier point, elles sont en train de les rejoindre. Et cette meilleure réussite des filles se constate dans toutes les catégories sociales, l'écart s'accentuant dès les catégories populaires. Cette réussite des filles est souvent présentée comme paradoxale, car elle ne bouleverse apparemment pas la hiérarchie homme/femme. Les filles se dirigent massivement vers les universités, et si elles investissent de plus en plus des domaines longtemps masculins (droit, médecine), elles choisissent plus nettement les secteurs très féminisés En dépit de l'entrée massive des filles dans les filières supérieures et d'une réduction des écarts avec les hommes, les orientations par domaine ont peu changé en trente ans. [...]