Isabelle Astier, "Du récit privé au récit civil : la construction d'une nouvelle dignité" : commentaire

Résumé du document

L'exclusion correspond à un processus, une trajectoire, un mouvement, une évolution. Pour la comprendre, il faut s'intéresser aux parcours de vie des individus. En effet, ces derniers entrent dans la précarité à cause de leur histoire personnelle et pour les aider à s'insérer au mieux dans la société dans laquelle ils vivent, connaître leurs biographies et récits de vie est nécessaire. Récits de vie et biographies sont donc devenus essentiels dans le champ de l'action sociale car aujourd'hui, dans notre société, la primauté est accordée à l'individualisme de masse (...)

Extraits

[...] Cependant, il ne faut pas oublier qu'au XIXe siècle déjà, des causes sociales, économiques et politiques étaient incriminées dans les raisons de la misère des individusii. En ce sens, pour Astier, les récits privés pouvaient déjà être opposables à la puissance publique. C'est d'ailleurs sûrement à cause de ces causes de la pauvreté que l'Etat doit aider les plus démunis. Depuis sa création, le RMI est alors victime d'un débat concernant l'assistance. Ce dispositif renvoie à l'idée que la nation a une dette envers les plus démunis. Mais le traitement de la pauvreté n'incombe pas uniquement à l'Etat. [...]

[...] Ce type de récit public peut être projeté dans l'univers du collectif. En ce sens, le récit privé devient opposable à la puissance publique et devient donc un récit civil. A partir de là, il acquiert un nouveau caractère de reconnaissance pour l'action publique. Cependant, dénoncer la cause sociale ne fonctionne pas toujours. En effet, parfois, les conduites personnelles, les défaillances personnelles sont remises en cause pour expliquer les problèmes des individus. Les individus sont donc tenus pour responsables de ce qu'il leur arrive et le RMI est suspendu. [...]

[...] Ministère de l'emploi et de la solidarité (2000), L'insertion par l'activité économique : guide pratique, Paris, La Documentation française p. Ebersold Serge (2001), La naissance de l'inemployable : ou l'insertion aux risques de l'exclusion, Rennes, Presses universitaires de Rennes (coll. Le Sens social) p. ii Paugam Serge (1993), La société française et ses pauvres : l'expérience du revenu minimum d'insertion, Paris, Presses universitaires de France (coll. Recherches politiques) p. iii Ministère de l'emploi et de la solidarité (2000), L'insertion par l'activité économique : guide pratique, Paris, La Documentation française p. [...]

[...] L'objectif du dispositif d'insertion est de permettre aux individus de retrouver leur citoyenneté et leur dignité. Mais est-ce réellement possible puisqu'en parallèle à cet objectif, les individus sont contraints de parler de leur intimité ? Pour redonner leur dignité aux individus, il faut les amener à maitriser leur vie privée et ainsi, ils redeviendront de véritables citoyens. Or, lors de l'examen de leur dossier par les commissions, il leur est demandé d'étaler leur intimité. Mais, pour trouver des solutions adéquates pour aider les individus, il faut connaître très précisément leur vie. [...]

[...] En faisant des projets, les individus peuvent donc se projeter dans l'avenir. La logique de projet rend alors les individus acteurs de leur devenir en plaçant la parole au centre de l'intervention. Cependant, au niveau du RMI, nous assistons à la publicisation des récits privés. Or, lorsque cette publicisation ne provoque pas de solidarité, mais de l'exclusion, l'individualisme appliqué dans la société n'est pas profitable. De même, les récits biographiques servent également à statuer sur la reconduction ou l'arrêt du versement de l'allocation. [...]