Selon Daniel Thin, au coeur des relations entre les familles populaires et l'école se trouve la socialisation. Le mode scolaire de socialisation est devenu dominant/légitime. Mais bien qu'il soit le plus diffusé, il n'est pas le seul mode de socialisation dans notre société. Il en existe d'autres et notamment le mode de socialisation populaire.
Au terme de cette enquête qualitative (s'appuie sur des entretiens et observations), Daniel THIN conclut que l'école est reconnue légitime par les familles populaires dans le domaine pédagogique ; par contre, celles-ci veulent maintenir leurs prérogatives dans le domaine « éducatif domestique » le plus discuté, voire contesté par les parents (à propos par exemple, de l'hygiène, de la surveillance dans la cour...).
Selon THIN, dans le projet pédagogique, il y a un projet de transmission de savoir mais aussi un projet d'inculcation et de comportement particuliers. La scolarisation est donc la mise en place d'une socialisation particulière.
La socialisation n'est pas seulement l'apprentissage de vivre ensemble mais plus précisément la transformation des enfants en des êtres sociaux. L'école propose une socialisation particulière et d'après THIN, les parents de famille populaire en dispensent une autre. Ce cadre théorique est un premier point par rapport au sens commun parce que cela met en évidence que le comportement des enfants, perçus comme déviant par la plupart des gens, est le résultat d'une socialisation particulière. Pour comprendre les relations entre école et familles populaires, il s'agit de comprendre les relations structurelles entre la socialisation populaire et la socialisation scolaire. Cependant cette relation structurelle est inégale car les enseignants sont ceux qui exercent le mode de socialisation légitime dans notre société (...)
[...] Il faut que l'adulte soit présent pour pouvoir rappeler les limites et les interdits au coup par coup. Si l'adulte n'est pas présent, l'enfant peut transgresser sans forcément le savoir les limites prévues par les parents. Le mode d'exercice de l'autorité est contextualisé : cela dépend aussi de leur humeur. Dans certaine situation, les mouvements intempestifs (courir, sauter ) des enfants sont acceptés (repas familiaux . et dans d'autres moments, ils ne seront pas acceptés (fin de journée de travail). [...]
[...] Selon eux, ces sorties ne sont pas des activités qui permettent à leurs enfants de comprendre les exigences scolaires. Ils considèrent ces activités comme un jeu alors que pour eux à l'école il faut travailler et non pas s'amuser. Daniel Thin constate que parfois, les parents de milieux populaires se sentent jugés par les enseignants mais à l'inverse ils retournent le stigmate dont ils font l'objet vis-à-vis des enseignants. C'est le cas quand ils estiment que ce sont les enseignants et non eux qui ne parviennent pas à exercer leur autorité au sein des classes. [...]
[...] Leur vision des classes populaires est donc extérieure. Les enseignants ne les connaissent que par les enfants populaires auxquels ils enseignent et les rencontres parents/enseignants. Cependant, les rencontres se font à l'école où les enseignants se sentent à l'aise contrairement aux parents. Dans les discours des enseignants sur les parents de milieux populaires, il y a souvent un glissement du regret des mauvaises conditions de vie des familles à la dénonciation de l'incompétence des parents en matière éducative. On remarque donc une certaine stigmatisation par les enseignants des familles populaires. [...]
[...] Parfois la domination se retourne dans la mesure où certains parents interviennent pour exercer une autorité d'adulte dans un lieu où c'est l'autorité de l'enseignant. Les relations entre enseignants et parents sur ce que signifie l'éducation sont sujettes à de forts malentendus qui ne peuvent pas forcement être levés par la seule explicitation. Ces malentendus découlent de positions sociales particulières. [...]
[...] Les parents des milieux populaires sont à leurs yeux défaillants, démissionnaires de leur métier de parents. Les enseignants sont payés pour dispenser et diffuser le mode scolaire de socialisation. Pour qu'une scolarité se passe bien, l'école et les familles doivent interagir et que chaque partie prenne en charge la scolarité des enfants. Du point de vue des parents, cette cohabitation est perçue comme une obligation et que cette coéducation n'irait pas de soi parce qu'il peut y avoir des malentendus sur ce qu'est l'éducation et la façon de prendre en charge la scolarité. [...]
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