Dans la vie quotidienne, les individus ne cessent de se regarder mutuellement. Ils regardent les personnes, les évènements et les actions et ceci semble naturel, banal. Cependant, il semblerait que le regard possède une certaine importance qui va au-delà du simple fait d'observer. On peut alors se demander quel est son rôle dans la vie sociale. Chaque regard a un sens et, à lui seul, il règlemente le comportement des individus, que celui-ci soit porté sur les autres ou sur soi-même. A ce sujet, Jean-Claude KAUFMANN, dans son ouvrage Corps de femmes, regards d'hommes expose les attitudes des femmes qui veulent porter les seins nus en fonction des regards portés sur elles. Il met donc en évidence des fonctions inconnues de ce qui est souvent considéré uniquement comme l'un des cinq sens humains (...)
[...] A ce sujet, KAUFMANN relève une citation de LE BRETON : La prise d'image s'inscrit habituellement dans un halo émotionnel qui permet d'évaluer l'attirance ou la répulsion dans l'expression des yeux Le regard peut légitimer ou non des comportements et parfois même nos conceptions. Cependant, on ne peut effectuer qu'une interprétation des regards des autres car on ne possède jamais de certitude sur le sentiments qu'il exprime. De ce fait, c'est la représentation de soi qui va orienter cette interprétation. A ce moment là, c'est celle ci qui va faire que l'on estime que le regard vient confirmer ou infirmer les interprétations que l'on a effectuées. [...]
[...] De ce fait, il garantit la stabilité de l'édifice social dans son ensemble. Enfin, chaque regard individuel participe à l'édification d'une norme collective. Étant donné que chaque individu se fait une opinion différente à partir de ses observations, cette construction s'avère assez complexe. De plus, il est aujourd'hui assez difficile d'imposer des règles communes car chaque personne a tendance à accorder plus d'importance à son avis individuel. Selon Norbert Elias, c'est à partir du Moyen-âge que les individus commencent à regarder les autres afin d'ajuster leurs comportements à ceux observés. [...]
[...] De ce fait, c'est le regard qui permet ou interdit ce dévoilement, qui rend plus ou moins facile son accomplissement. Puisque l'individu émet un jugement en observant, le ragrée témoigne du degré de tolérance et remplace souvent un avis oral. Par l'intermédiaire du regard, les individus se constituent une réserve de connaissances, construisent des catégories. En classant chaque événement, chaque comportement, ils construisent une certaine réalité. En relation avec celle-ci, ils établissent des normes et c'est alors que le regard porteur de jugements joue un rôle. [...]
[...] Ces définitions atteignent un certain degré de perception lorsqu'on ne prête p^lus de véritable attention à certains comportements, lorsqu'ils sont devenus ordinaires. Kaufmann, à propos de la banalisation, affirme : C'est elle qui crée les conditions de l'établissement du lien social, c'est elle qui rend la vie plus facile Cependant, celle-ci n'est possible qu'à l'aide du regard qui, à force d'observer des actions similaires, les rend invisibles puisque banales. De ce fait, le regard impose la normalité car il va lui-même effacer ce qui posait problème, typifie les comportements. Il ne fait plus entrer ces images dans le champ de conscience. [...]
[...] En parlant d'un de ces individus, il observe : Sa phrase se termine par un mais que nous allons réentendre, indiquant l'intention de glissement vers le contraire de ce qui a été dit avant Ils sont donc tiraillés entre le désir de laisser à chacun sa propre liberté d'agir et celle de juger, de condamner. Dans ce cas, le regard joue le rôle de barrière symbolique. Lorsque certaines personnes dépassent les limites du normal, le regard des autres va les rappeler à l'ordre et l'on voit alors pondre l'intolérance. [...]
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