Ce document, complet et entièrement rédigé, est un travail final d'observation qui consiste en un dossier composé de deux parties :
La première partie est une partie personnelle de réflexivité qui revient sur notre rapport au terrain, la mise à distance de nos prénotions, la manière dont nous avons essayé de les dépasser, de les maitriser et de les utiliser dans nos observations. L'idée est de montrer que nous nous sommes interrogés sur notre position d'enquêteurs, de montrer notre regard et de montrer que cela nous permis d'avancer dans la compréhension.
La seconde partie est une personnelle de description des audiences auxquelles nous avons assisté et quelque pistes d'analyse (c'est à dire des interprétations possible de ce que nous avons observé). Pour cette partie nous avons choisis un angle particulier : un aspect des procès, une approche appuyée sur un concept sociologique.
[...] Je me sens impuissante face à cette justice en souffrance. Je ne suis pas sociologue, je ne suis pas avocate, je ne suis pas procureur ni juge, je ne suis pas psychologue ni scientifique mais je suis humaine et à ce titre cela me suffit pour dire après ce premier jour que les comparutions immédiates ne fonctionnent pas. Elles ne peuvent être efficaces, déjà car elles émergent d'un constat erroné et aberrant, celui qui porte à croire que les petits délits sont simples à comprendre. [...]
[...] C'est une lacune il manque quelque chose dans ce verdict, de la compréhension, de la réflexion surtout de l'humain. Je suis confrontée à une justice mécanique et déshumanisée là où je croyais rencontrer une justice sociale. Je ne sais pas quoi faire, quoi dire, Stephane repart écrouée, les épaules encore plus basses, le regard dans le vide, il n'est plus là, il n'est plus tout simplement . Je ne blâme personne, je comprends que le système doit être revu, repensé, que la société industrielle et capitaliste doit arrêter de se pencher vers l'automatisme et la robotisation pour replacer l'humain au centre de la société. [...]
[...] C'est ce qu'il avait dit au juge lors de la première comparution immédiate. La dernière fois . mais personne n'y croyait, personne ne l'écoutait non plus, personne ne le regardait . la promesse d'une dernière fois personne ne l'entendait mais en tout état de cause ce n'était convainquant pour personne : Ni pour la victime que d'ailleurs personne ne nommait pas si ce n'est sous trois lettres ITT 1 mois, comme si 3 lettres suffisaient à résumer les conséquences d'une agression. [...]
[...] La justice est pauvre elle aussi elle manque de moyens matériels, humains . mais elle manque aussi d'humanisme, d'écoute, d'empathie. En s'inscrivant, elle n'est pas plus riche que Stephane et elle ne fait au contraire que de nourrir la pauvreté qui le pousse au délit. Ce qui me dérange dans ce constat n'est pas tant que la justice soit pauvre mais plus que tout un chacun sait qu'elle ne changera rien pour Stephane, bien au contraire . Tout le monde le sait mais personne ne s'en préoccupe. [...]
[...] C'est une course au chiffre, c'est une course . La suite est ponctuée par la même course contre la montre : rappel des faits au prévenu, l'intervention écourtée des avocats, la découverte des dossiers par les juges avec une lecture en diagonal survolée, l'audience chronométrée, la délibération finale accélérée. Aucune stratégie, aucune compréhension, j'ai l'impression d'être confronté à un mauvais algorithme. Ce n'est pas une justice sociale, c'est une justice mathématique ou économique où la productivité est devenue essentielle. Je ne blâme personne mais face aux mots de l'accusée, aux réactions du juge, à l'intervention du procureur, à l'absence de la victime à peine prise en considération, le constat me glace le sang. [...]
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