L'égalité des sexes « constitue une mission fondamentale pour l'Education Nationale » (Ministère de l'Education Nationale). De même, elle est un des objectifs principaux du socle commun de connaissances et de compétences. En effet, il y est dit que les élèves doivent apprendre à respecter l'autre sexe et refuser les préjugés et stéréotypes. Selon le Ministère de l'Education Nationale, « l'apprentissage de l'égalité entre les garçons et les filles est une condition nécessaire pour que, progressivement, les stéréotypes s'estompent et d'autres modèles de comportement se construisent ».
C'est à l'école maternelle, lieu de socialisation, que cet apprentissage va commencer. Les enfants vont y acquérir et y intérioriser également les normes et les valeurs de la société. Cette socialisation à l'école va notamment se faire par le biais d'albums pour enfants. En effet, comme le montrent de nombreux auteurs tels que Moret (2010), la littérature de jeunesse est un important outil de socialisation. A travers celle-ci, il est possible d'accéder à de nombreuses représentations notamment celles liées au genre masculin et féminin.
Cependant, de nombreux auteurs tels que Dafflon-Novelle (2002 ; 2003 ; 2004 ; 2011) et Angelot (2008) ont montré que les représentations relatives aux genres féminin et masculin, véhiculées par la littérature de jeunesse, étaient stéréotypées. De plus, ces stéréotypes de genre, en défaveur des filles, semblent avoir des conséquences sur les petites filles et notamment sur le développement de leur estime de soi (Dafflon-Novelle, 2003 ; 2011).
Il existe donc un paradoxe entre ce que stipulent les textes officiels sur l'égalité des sexes et les stéréotypes de genre véhiculés dans les albums pour enfants, « instrument privilégié d'éveil et d'accès à la culture » (Dafflon-Novelle, 2003 ; Angelot, Bijot, Billot, Quillivic & Schlier , 2008).
Cela nous amène au coeur de notre étude qui s'articulera autour des conséquences qu'a la lecture de ces albums sur le développement psycho-social des petites filles. En effet, c'est ce que nous analyserons et développerons au cours de notre recherche et ce, en tentant de répondre à la question suivante :
Quelles conséquences va avoir l'exposition des petites filles à des albums véhiculant des stéréotypes sexistes sur le développement de leur estime de soi ?
Cette recherche a pour objectif de rendre compte des effets qu'ont les stéréotypes sexistes véhiculés dans les albums pour enfants sur le développement de l'estime de soi des petites filles. En effet, par le biais de cette étude, nous espérons faire naître une prise de conscience chez les enseignants qui pourront alors compenser ces effets par la déconstruction des stéréotypes (Moret, 2010).
Pour répondre à notre problématique, nous nous appuierons sur une expérience de terrain (dans trois classes de grande section) ainsi que sur des questionnaires auxquels ont répondu des enseignants.
Notre réflexion s'articulera autour de deux hypothèses générales découlant de la problématique :
- Les stéréotypes de genre véhiculés dans les albums de jeunesse auraient des conséquences sur le développement de l'estime de soi des petites filles. Les petites filles auraient donc une plus faible estime de soi que les garçons de même âge.
- Un accompagnement adéquat des enseignants dans la lecture pourrait compenser les effets délétères des stéréotypes de genre sur le développement de leur estime de soi. De plus, si cet accompagnement est effectué par les enseignants, il l'est d'avantage par les enseignantes que par les enseignants.
Dans une première partie, nous vous présenterons quelques apports théoriques sur la construction de l'identité sexuée, le développement de l'estime de soi et les effets des stéréotypes de genre sur ces deux constructions. Dans une deuxième partie, nous présenterons la méthodologie de notre recherche. Enfin, dans une troisième partie, nous vérifierons nos hypothèses par le biais de tests statistiques (...)
[...] Ochman (1996) a ainsi montré que l'exposition des enfants à des livres dans lesquels il y'a des modèles de même sexe qu'eux influence de manière positive leur estime de soi. Il est donc important selon celui-ci de permettre aux enfants des deux sexes d'accéder de manière équitable à ces modèles de référence Ainsi, l'estime de soi des filles risque d'être affectée puisqu'il y a peu d'héroïnes dans les livres qu'elles lisent (Dafflon-Novelle, 2011). En effet, l'estime que les filles ont d'elles-mêmes a plus de probabilités d'être affectée que celle des garçons, en raison de l'éventail plus restreint de modèles d'identification et de référence offert au public féminin (Dafflon-Novelle 2011). [...]
[...] En effet, confronté à un bébé qui pleure, les participants estiment qu'il est en colère si celui-ci est présenté comme un garçon et estiment, en revanche, qu'il a peur s'il est présenté comme une fille. D'autres études mettent également en évidence des stéréotypes concernant les catégories sociales de sexe. Ainsi, lorsque des nouveau- nés sont présentés à des adultes, leur perception de l'enfant dépend du sexe annoncé par les expérimentateurs et non du comportement de l'enfant (Declercq, 2008). Face au même bébé et selon qu'il soit présenté comme un garçon ou comme une fille, les personnes vont le décrire de manière différente. [...]
[...] Pour ce faire, des images d'ours asexués mais affublés d'attributs leur ont été présentées (tablier, lunettes, cartable, journal Des questions relatives à ces images étaient ensuite posées aux enfants : Qu'est-ce que tu vois ? Qu'est-ce qu'il faudrait changer dans l'image pour montrer que le personnage appartient à l'autre sexe ? Que font les autres membres de la famille pendant ce temps ? Les résultats observés montrent que les enfants sont tout à fait imprégnés des stéréotypes véhiculés dans la littérature de jeunesse. (Decelle, 2002). [...]
[...] Dans les premières expériences réalisées, les enfants devaient classer des images d'objets selon la catégorie masculin/féminin (Thomson cité par Declercq, 2008). Dans ces conditions, un début de sensibilisation au genre avait été mis en évidence aux alentours de 26 mois. Cependant, les enfants pouvaient ne pas posséder les capacités de catégorisation nécessaires pour la réalisation de ces épreuves. Des procédures plus appropriées ont donc été utilisées. Grâce à celles-ci, des formes élémentaires de connaissances relatives aux stéréotypes apparaissent dès 24 mois (Declercq, 2008). [...]
[...] Selon lui, ce changement devait être celui d'une diminution des stéréotypes sexistes dans la littérature de jeunesse. Cependant, cela n'a généralement pas été le cas (Fitzpatrick et McPherson, 2010). En effet, certaines études ont montré des améliorations dans les représentations liées au genre tandis que d'autres telles que celle de Dafflon-Novelle (2002) n'en ont pas trouvées. Dans son étude, Dafflon- Novelle (2002) examine les stéréotypes sexistes présents dans la littérature de jeunesse publiée en 1997. Elle constate alors qu'il y'a deux fois plus de livres racontant l'histoire d'un personnage masculin que de livres racontant l'histoire d'un personnage féminin. [...]
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