Selon Chantal Jacquet, professeur à l'Université de Paris I et auteur de plusieurs études sur le corps, l'espèce humaine se divise en deux genres essentiels, suivant une base anatomique. Le terme « sexe », du latin sexus, renvoie en effet étymologiquement à l'idée de « séparation ». Cependant, cette division des corps en masculin et féminin a, dans un second temps, légitimé une autre division plus contestable, celle des esprits, en féminin et masculin. Or cette interprétation de la division de l'humanité par rapport à la différence sexuelle se heurte à deux écueils principaux que sont l'essentialisme et l'historicisme...
[...] La réflexion sur les corps féminin et masculin a en effet montré que la différence des êtres est secondaire, par rapport à une union originelle lors de la gestation. La maternité a donc une portée ontologique essentielle et donc également une importance philosophique majeure. A la différence de Simone de Beauvoir qui réduit la maternité à une dimension physiologique inessentielle, Chantal Jaquet confère pour la première fois à l'acte d'être mère une dimension véritablement philosophique. Dont : Jaquet Chantal, Le corps, P.U.F L'aptitude corporelle est l'ensemble indéfini de ce que le corps peut faire compte tenu de sa nature. [...]
[...] Non, car l'existence d'un organe (l'utérus) donne une aptitude (être enceinte) mais n'oblige pas à la développer (car il existe des moyens contraceptifs). On ne peut donc affirmer que l'essence de la femme réside dans la maternité. Celle-ci relève d'un choix personnel pour certains, ou d'une construction (d'un rôle) historique pour d'autres. La maternité n'est ni un titre de gloire, ni la marque d'une dépendance à l'égard du biologique. Le corps féminin, à travers les cycles menstruels, n'est pas plus marqué par la naturalité que ne l'est le corps masculin (à travers par exemple les érections matinales ou les pollutions nocturnes). [...]
[...] Du point de vue féminin, cet acte devrait être désigné sous le terme d' accueil Or l'accueil, loin d'être passif, est bien le signe d'une activité. L'action n'est donc pas le privilège de la sexualité masculine, mais caractérise également la sexualité féminine. En conclusion, on peut affirmer que la différence anatomique entre l'homme et la femme est loin d'être décisive en matière de sexualité. La différence individuelle peut l'emporter sur la différence sexuelle, comme en témoignent l'homosexualité et la diversité des pratiques érotiques. [...]
[...] En effet, cela conduirait à affirmer qu'une femme après la ménopause ou avant la puberté n'est pas une femme (du moins plus ou pas encore). Par ailleurs les scientifiques ont démontré que la présence d'un chromosome Y ne suffisait pas à distinguer physiologiquement un homme d'une femme. Les phénomènes d'hermaphrodisme et de transsexualisme doivent également nous conduire à relativiser l'importance des organes génitaux sur la détermination d'une identité en féminin ou masculin. On en vient alors à se demander jusqu'où est-on libre par rapport à ses organes génitaux ? [...]
[...] Un manque s'établit toujours par rapport à une norme, qui permet de mesurer la distance qui sépare l'inachevé de l'accompli (le sexe féminin du sexe masculin pour Freud). Or le pénis n'est pas une norme sexuelle universelle. Si manque il y il ne peut être défini qu'à partir de l'examen de la nature de la chose propre, qu'à partir de son essence. Or la femme ne manque pas de pénis car elle n'en possède pas (par essence) ! La différence anatomique ne définit donc pas une déficience mais une nécessité, chaque être étant complètement ce qu'il est et n'incarnant pas la totalité du genre humain. [...]
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