Du mythe légendaire de Rémus et Romulus jusqu'à Victor, le « sauvage de l'Aveyron », de nombreux cas d'enfants ayant subi un isolement extrême pendant plusieurs années sont mis en lumière tout au long de l‘Histoire. Cependant, ce n'est qu'à partir du XIXe siècle que ces découvertes passionneront autant les foules que les scientifiques. En effet, cette fascination pour ces enfants privés du contact avec la société humaine peut s'expliquer par le contexte social de l'époque soit, le lendemain de la Révolution française et la diffusion des écrits des Lumières comme "L'Émile" de Rousseau, premier traité sur l'éducation des enfants.
Lucien Malson s'attache dans son livre "Les Enfants sauvages" à recenser et étudier les différents cas d'enfants ayant survécu à un extrême isolement et s'efforce de décrire les conséquences de leur (ré)adaptation à la société humaine. Ainsi, son objectif premier est de mettre en évidence les bases fondamentales de ce qui fait l'Homme entre nature et culture.
[...] Ainsi, Lucien Malson et le Dr. Jean Itard réfutent la thèse selon laquelle les enfants sauvages sont des simples d'esprit car ils ont pu survivre sans défense dans la nature et possèdent un désir d'apprendre et une volonté de dépassement hors du commun. Ils n'ont seulement qu'un retard d'âge mental Par ailleurs, l'homme n'a aucune nature propre car il est histoire . En effet, il est ce qu'il devient par son contact avec la société humaine. Il se construit donc grâce à la présence d'autres êtres humains déjà socialisés. [...]
[...] Jean Itard comme un sauvetage de la morale. Médecin à l'Institut des Sourds-muets à Paris, ayant recueilli ce jeune sauvage ce docteur s'attache à éduquer cet enfant face aux critiques de docteurs prestigieux comme le Dr. Pinel qui ne voit dans ce sauvage qu'un être irrécupérable et idiot L'éducation de Victor durera six années retracées au sein de deux rapports publiés en 1801 et 1808 dans lesquels le Dr. Jean Itard fera part des progrès de son jeune élève. L'éducation itardienne se concentre autour de différentes vues comme l'adaptation à une vie sociale, le développement de la sensibilité nerveuse, de la sphère des idées, de la parole et des facultés intellectuelles chez Victor. [...]
[...] L‘homme ne possède alors que de simples fonctions d'animalité afin de satisfaire ses besoins primaires. En effet, à la différence des autres espèces du règne animal, l'homme ne se définit pas par rapport à des caractéristiques pré-établies à la naissance. Lucien Malson illustre son propos par l'exemple de l'animal qui même éloigné dès sa naissance de son groupe, développera grâce à ses instincts et ses déterminismes, les mêmes caractéristiques que son espèce. Or, l'homme, par les exemples des enfants sauvages ne développe aucune caractéristique particulière propre à l'homme et au contraire va même jusqu'à s'identifier à d'autres espèces animales comme c'est le cas pour les jeunes Amala et Kamala recueillies par une meute de loups et qui vont développer les mêmes caractéristiques lupines soit, une prédilection pour la nuit, l'halètement, la locomotion sur les coudes et les genoux Néanmoins, Lucien Malson contrebalance son propos en soulignant que l'absence de détermination particulière à la naissance permet à l'homme de se définir comme appartenant à l'espèce humaine et ce qui lui autorise des possibilités infinies. [...]
[...] Une société qui libère de l'animalité naturelle ? Par ailleurs, du fait que la société humaine vient déterminer l'individu en lui inculquant des normes à travers son éducation, la question qui se pose est de savoir si cette société libère-t-elle vraiment ? En effet, Kant dans la Critique de la raison pure met en avant que l'interprétation de la pensée ne se fait qu'avec notre logique dont les fondements nous sont transmis par la société. Ainsi, cette domination sociale laisse peu de place à la réflexion propre de l'individu. [...]
[...] En effet, sur 2094 de ses descendants, seulement 757 sont recensés comme marginaux. Ainsi, ce n'est pas d'une hérédité psychologique dont il faudrait parler mais plutôt d'une influence du milieu social sur le développement du jeune enfant. Effectivement, même s'il existe des potentialités biologiques, il n'en reste pas moins que le milieu éducatif, les traditions familiales et la présence des parents vont être autant de modèles imités par l'enfant dans son développement. Par ailleurs, Lucien Malson souligne que l'avantage du milieu par rapport à la position sociale de la famille et le contexte social tendent à déterminer et à actualiser un plus grand nombre de possibilités et de potentiels chez l'individu. [...]
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