Le français sur objectifs spécifiques : "Ou comment oser enseigner en prison"

Résumé du document

Il ne faudrait jamais baisser les bras. Jamais. Personne ne devrait jamais se faire gloire de laisser un citoyen sur la route, en apparence le plus irrécupérable. Il suffit de lire ou relire Rousseau, Hugo, mais aussi Vidocq illustre délinquant devenu ministre de la police. Enseigner en prison, c'est, avant tout faire preuve de souplesse et d'adaptabilité.

L'expérience montre que même dans des laps de temps très courts, il est possible de réactiver ou de déclencher des apprentissages fondamentaux qui permettront par la suite de conquérir des savoirs et savoir-faire porteur de projets nouveaux qu'il s'agisse d'une formation professionnelle qualifiante, d'une appropriation de la lecture et de l'écriture ou tout simplement une envie de découvrir, de porter un autre regard sur la culture.

Il s'agit, on le voit aisément d'un Français sur Objectifs Spécifiques. Pour l'enseignant de FOS, il ne s'agit donc plus exclusivement d'amener l'apprenant à connaître la langue française, mais de le rendre apte à faire "quelque chose" à l'aide du français : l'apprenant, dans un premier temps, n'apprend donc plus le français, mais du français. Le français doit devenir un moyen d'expression privilégiée.

Entreprendre des études en prison, comme nous l'avons vu, est bien souvent animé par la volonté d'être envisagée autrement que comme un simple détenu. Les rapports qui s'établissent étant des rapports enseignants /enseignés, des rapports humains dans le respect des droits, des libertés les plus fondamentales de la dignité humaine. La prison au jour le jour est une réalité qui s'affirme et se confirme pour le détenu. Alors un ouvrage qui sache s'adapter et se confronter à ce type de publics était-il à priori le bienvenu pour les élèves les plus en difficulté…

Extraits

[...] L'accent est ici porté sur les conditions de détention, et sur ce qui peut en résulter sur le fonctionnement d'un système socio-éducatif. En prenant un exemple type, la vie collective d'un établissement pénitencier s'organise autour d'un créneau horaire bien précis. Quoi qu'il en soit, cette réduction du temps intervient comme une privation de liberté, dans le sens où le détenu en prison ne dispose plus de son temps. Maintenant, il se trouve amputé de son propre projet d'existence. Un seul objectif lui reste en tête : sortir. [...]

[...] Lorsque je dis ‘'celles'', je parle des femmes qui appartiennent au centre de détention : Susanne, Rosa-Linda et les autres rechignèrent vite à utiliser ce manuel, ces illustrations, ces exercices, ces grilles fléchées dans la cour de promenade pour m'annoncer : _Nous, Madame, on connaît ça. Tous les jours. Pas besoin d'apprendre, tous les jours, on voit ça. On veut autre chose comme les autres dehors . Bref je me rendais vite compte qu'il s'agissait en réalité d'un problème plus spécifique aux établissements de longue peine. [...]

[...] Dans cette situation imposée, le prisonnier va tenter de s'économiser la lutte en optant pour une attitude conformiste. Tout en offrant à l'institution une image du bon détenu, il tirera tel ou tel avantage, mais à quel prix sur le plan de sa dignité humaine ? Le détenu arrive souvent seul, perdu et livré à lui-même. Le Ministère de la Justice ne lui livre qu'un guide du détenu arrivant Je suis en prison un petit guide broché de soixante-quatre pages. [...]

[...] Il leur suffira alors de les classer soigneusement pour une utilisation future, ou de les transmettre à un tiers de leur famille. N'oublions pas que certains détenus sont d'astreinte au Service Général cuisine. (Service interne à la cuisine). Alors un cours qui sort de l'ordinaire et qui s'adapte à leurs besoins est toujours le bienvenu ! Avec un mélange de français sur objectifs spécifiques et de mathématiques, ce cours a pour objectif de s'adapter à tous. Car bien souvent celui qui ne maîtrise pas le français, ne maîtrise pas les mathématiques, d'où l'intérêt de ce cours innovant en la matière. [...]

[...] L'instituteur. XI. L'éducateur. XII. J.A.P. XIII. Visiteur. XIV. Et la fin Deuxième Partie : La vie quotidienne en prison Chapitre 1 : Les clefs en main Peut-on parler de valeurs humaines dans un monde clos ? Est-ce là l'histoire d'un pari insensé et complètement fou ? Là où la vie collective reste soumise à une rude discipline, la prison reste avant tout un lieu de dépendance, où le détenu se trouve totalement soumis à celui qui détient la clé. [...]